L'Organisation de défense du consommateur (ODC) a été prévoyante car elle a présagé tôt la crise qui a traversé le pays. L'ODC n'a pas cessé d'appeler les pouvoirs publics à atténuer l'inflation qui avait atteint lors de l'année écoulée les 6,8%. Le Tunisien issu de la catégorie sociale défavorisée et de celle à moyens revenus a connu des difficultés énormes en matière d'achat de produits alimentaires, compte tenu de leur cherté. A cela vient s'ajouter la loi de finances 2018 qui avait fait déborder le vase. M. Slim Saâdallah, président de l'ODC, a, à maintes reprises, appelé au renforcement du contrôle économique des prix. Et notre interlocuteur de souligner : «Il fallait afficher les prix d'achat et de vente ainsi que le boycott des produits qui ont connu une hausse excessive due à la spéculation tels que les tomates et les pommes de terre». Déjà, tous les partis politiques et l'Etat ainsi que les instances concernées ont fait la sourde oreille aux appels des citoyens, ce qui a entraîné des spéculations avec des prix revus à la hausse. Outre la flambée des prix, s'ajoutent des augmentations arbitraires des commerçants suite à l'annonce de la nouvelle loi de finances stipulant une augmentation de 1% de la TVA sur certains produits alimentaires. Pouvoir d'achat affaibli «C'est le résultat de sept ans d'accumulation d'augmentations des prix, ce qui a affaibli le pouvoir d'achat de la classe moyenne et appauvri davantage les laissés-pour-compte, commente le président de l'ODC. L'Etat et les partis ont axé leur effort sur le terrorisme et ont oublié de respecter la marge de manœuvre des couches sociales démunies et leur pouvoir d'achat de plus en plus alourdi par les dépenses», souligne M. Saâdallah. Et d'ajouter : «Les prix compensés sont quasi absents du marché tels que l'huile végétale et le sucre en poudre dont le prix est moins cher que celui empaqueté. Certains restaurants et hôtels profitent des produits homologués pour préparer leurs plats vendus au prix fort. Cela a détérioré davantage le pouvoir d'achat du Tunisien. L'épargne était estimée à 54% pour être ramenée, actuellement, à 13%». Les fonds mobilisés pour la caisse de compensation, nous fait savoir notre interlocuteur, sont estimés à 325 milliards. C'est une caisse de compensation qui profite à 12% seulement des personnes qui en ont réellement besoin si l'on se réfère à une étude élaborée dans ce sens. Les accumulations successives de l'inflation et le manque de transparence des circuits de distribution ainsi que le non-respect de la loi concernant le problème des circuits parallèles ont compliqué la situation. Ainsi, 40% uniquement des produits entrent au marché de gros, 60% sont répartis dans les marchés parallèles, ce qui a engendré des augmentations de prix, estime M. Saâdallah. Certains grossistes pratiquent des prix flous et font des spéculations sur les produits les plus consommés par les citoyens. D'où la hausse des prix, notamment pour les produits libéralisés. Ainsi le prix de l'huile végétale dont le plafond en gros est estimé à 900 millimes s'écoule à 3D,800. Les circuits parallèles contribuent, eux aussi, à la dégradation du pouvoir d'achat et suscitent la flambée des prix. La loi de finances doit être accompagnée d'autres mesures afin de faire face à la cherté de la vie. Les classes moyennes vont également être touchées par les répercussions négatives de l'augmentation des prix. Par ailleurs, la loi de 1992 relative aux prix et à la concurrence a incité à la libéralisation des prix et a autorisé l'ouverture des cafés dont le nombre a atteint les 24 mille, et qui sont des refuges pour les jeunes oisifs. Une mentalité de laisser-aller est constatée chez certains administrateurs. Aussi, les moyens dont dispose la classe nationale sont fort limités, souligne M. Saâdallah. En un mot, le consommateur tunisien est à bout de souffle. «L'Etat ne peut plus procéder à d'autres augmentations car le citoyen est déjà assez lésé. L'augmentation du Smig est dérisoire», conclut-il.