Le dynamisme de l'Association des Tunisiens des Grandes écoles (Atuge) est frappant. Elle se définit sur son site (www.atuge.org) comme le "premier réseau de compétences tunisiennes expatriées". Siégeant à la fois à Tunis et à Paris, coordonnant des clubs étudiants et professionnels, au travers de nombreuses antennes essaimées dans différentes villes françaises et européennes, l'association s'est, en effet, dotée d'un réseau efficace et essentiel pour la communication, et a, qui plus est, acquis une importance considérable au regard de la vie économique du pays. Avant-hier, samedi 16 octobre, comme chaque année, le conseil d'administration de l'Atuge France a tenu son assemblée générale. L'occasion de dresser le bilan global du fonctionnement de l'association ; bilan d'autant plus marquant qu'il fut ponctué par une soirée de gala dans un superbe château bicentenaire, aux alentours de Paris, pour y célébrer les vingt ans de l'Atuge. Au cours de ces dernières années, l'ascension de l'Atuge a d'abord été due à la mise en place d'un forum de recrutement à Paris, il y a cinq ans, puis d'un autre à Londres, il y a trois ans. Ces deux nouveaux points de ralliement ont permis à l'association de mobiliser un indéniable surcroît de forces vives. Or, le forum de recrutement, c'est justement l'origine même de cette fédération qui réunit, sous une même bannière, les professionnels et les diplômés chercheurs d'opportunités de carrière, ainsi que tous les étudiants tunisiens des établissements figurant dans la liste des membres de la Conférence des Grandes Ecoles. Parmi ces établissements, l'Ecole centrale, l'Ecole normale supérieure de Lyon, l'Ecole nationale d'administration, Arts et Métiers ParisTech, l'Ecole polytechnique, et beaucoup d'autres... Encadrement et soutien Il y a presque vingt ans de cela, des Tunisiens, fraîchement diplômés de l'étranger, ont fondé un forum de recrutement en Tunisie, pour faire face aux difficultés qu'ils rencontraient sur le marché de l'emploi, une fois rentrés au pays. On retiendra, à titre de fondateur et de premier président de l'association, le nom de l'économiste et universitaire Elyès Jouini. A partir de là, l'Atuge a pu devenir un promoteur des compétences diplômées à l'étranger, tout en maintenant parmi ses membres ceux qui avaient déjà été lancés dans le monde du travail. Parallèlement, en s'installant à Paris et dans les villes de province françaises (Lyon, Bordeaux, Grenoble, Toulouse, etc.), l'association a offert aux Tunisiens des grandes écoles une structure d'encadrement et d'intégration qu'elle n'a cessé de renforcer. Ainsi, elle repose sur un système de membres actuels et anciens, ce qui lui permet à la fois de consolider l'encadrement des plus jeunes et de couvrir un réseau de relations plus étendu dans le cadre de ses forums de recrutement. Car ce rôle d'intermédiaire entre les employeurs et les actifs à la recherche de travail par les forums de recrutement représente la principale source de financement de l'Atuge. Quant au sponsoring, "il sert surtout, pour tel ou tel événement organisé, à rendre les prix d'accès ou de participation plus accessibles", rapporte Béchir Tourki, chargé de la communication. Et de continuer: "Nous sommes une association à but non lucratif, et nous vivons à l'équilibre". Une action diversifiée Le caractère non lucratif de l'Atuge ne l'empêche pas pour autant de prendre à sa charge de nombreux voyages et excursions, ainsi que l'organisation de divers évènements culturels et intellectuels. En effet, outre le gala de samedi dernier, on va de la sortie au Parc Astérix, à Paris, jusqu'à l'iftar à Dar Zarrouk, à Sidi Bou Saïd, animé par des universitaires autour du thème "Le soufi est-il de son temps ?", en passant par des réflexions sur l'avenir de l'éducation et de l'insertion professionnelle. Pour les étudiants adhérents qui débarquent à Paris depuis la Tunisie, ils sont directement accueillis à leur arrivée à l'aéroport. Les journées qui suivent sont consacrées à la visite de monuments et de places fortes de la capitale française. En outre, les étudiants membres qui bénéficient de structures d'encadrement ne sont pas forcément élèves dans une grande école, ils peuvent également étudier à la faculté pour intégrer l'association. C'est le cas, par exemple, de Abdelaziz, parti à Toulouse pour obtenir son master d'informatique à l'université Paul-Sabatier, et que l'Atuge a accompagné dans l'adaptation à son nouvel environnement. "Pour l'Aïd El Kebir, nous sommes allés faire des grillades et pique-niquer dans la région, raconte-t-il, j'ai pu faire de nouvelles rencontres à l'intérieur de l'association et donc je n'étais plus seul comme lorsque j'ai débarqué." L'Atuge se montre également présente dans l'action caritative. En mai dernier, elle a organisé, à titre d'exemple, avec l'humanitaire TunAction, un concert pour récolter des fonds servant à rénover l'établissement qui abrite les enfants de l'Union tunisienne d'aide aux insuffisants mentaux (Utaim) à Kerkennah. Ces deux organisations (Atuge et TunAction) n'en sont pas à leur première collaboration, elles ont, en effet et entre autres, coorganisé le spectacle "Poids Plume" du jeune artiste Ghazi Zaghbani en avril 2009, ainsi qu'une projection pour la sortie du film "VHS Kahloucha", il y a maintenant quelques années. Enfin, l'Atuge s'investit particulièrement dans les questions de la coopération économique, de l'employabilité, de la relation entre les milieux académiques et professionnels, et supervise ainsi de nombreux débats, conférences et réflexions sur les perspectives d'avenir. Par exemple, avec les anciens de l'Ipest (Institut préparatoire aux études scientifiques et techniques), elle a mené une étude sur le positionnement de cet institut, seul en Tunisie à préparer ses élèves pour les concours des grandes écoles d'ingénieurs françaises et tunisiennes, dans le but de le recentrer dans un cadre d'excellence. Nouveaux horizons "Nous avons œuvré pour que notre association devienne une référence dans le paysage associatif tunisien", nous confie M. Mondher Khanfir, membre et ex-président de l'Atuge. Celle-ci, bien qu'apolitique, areligieuse et à but non lucratif, a su mettre en avant de la scène économique des membres hautement formés, agissant dans des secteurs très divers, allant du monde de l'entreprise à celui des technologies, en passant par les domaines de la finance et des métiers de l'art, tout en constituant un trait d'union entre la culture tunisienne et européenne, et en développant les échanges entre les deux rives de la Méditerranée. Ainsi, malgré, ou plutôt grâce à sa neutralité, l'Atuge s'est érigée en servant les intérêts du pays, et beaucoup de ses membres ont bénéficié du soutien de l'Etat, notamment à travers des bourses d'études. Tout au long des dix-neuf éditions de son Forum annuel, l'association s'est efforcée de soulever des problématiques des plus pertinentes. Dans le cas du dernier en date, qui s'est déroulé le 30 mai 2010 pour la session parisienne et le 30 juin en Tunisie, l'Atuge s'est penchée sur les enjeux de l'éducation et de l'employabilité. Elle a connu un succès notable par rapport aux années précédentes, recueillant des visiteurs à la fois tunisiens et internationaux, réunissant des cadres jeunes ou expérimentés et des étudiants à la recherche de projets professionnels en Tunisie, et faisant intervenir les entreprises les plus représentatives des secteurs clés de l'économie. Pour ce qui est de l'extension du réseau, qui a déjà fait ses preuves en Tunisie et en France, et qui se développe plus largement en Europe depuis la mise en place d'un nouveau forum de recrutement à Londres, "nous envisageons l'ouverture vers de nouveaux espaces", explique M. Béchir Tourki. "Par exemple, l'Amérique du Nord ou le Moyen-Orient sont des espaces à fort potentiel. Mais pour s'y implanter, la prise d'une telle initiative suppose la mise en œuvre de moyens techniques et humains qui n'ont pas encore été réunis." L'Atuge ménage ses ambitions et reste, pour le moment, à une ouverture à l'échelle de l'Europe. Ouverture, donc, sur d'autres pays, mais aussi entre les générations ; ouverture sur la culture, sur le savoir et sur le social, au travers de ses évènements intellectuels, caritatifs et de loisirs. Ouverture sur des projets communs autour desquels il y a lieu de se rassembler. Nous pouvons souhaiter à l'Atuge un heureux vingtième anniversaire.