Réalisé en 1946, le film en noir et blanc La 7e porte du réalisateur français André Zwobada sera pour la première fois à l'affiche dans le cadre de la 23e édition des Journées cinématographiques de Carthage. Sa projection s'inscrit dans le cadre d'un hommage dédié à la mémoire de Hédi Jouini, qui a écrit et composé les chansons du film. Tourné en deux versions, l'une interprétée par des acteurs français et l'autre par des acteurs maghrébins, le film d'une durée de 90 minutes sera projeté dans le cadre de la section "Cinéma et mémoire". La première projection aura lieu au théâtre municipal de Tunis le 28 octobre avec la version arabe sous-titrée en français. Cette version est interprétée par l'acteur marocain d'origine tunisienne, Béchir Gabsi, et la grande actrice algérienne Keltoum, héroïne du film Le vent des Aurès, le premier long métrage de Mohamed Lakhdar Hamina, primé à Cannes en 1967, ainsi que par l'actrice et chanteuse tunisienne Anissa Jamel (second rôle). La projection de la version française, interprétée par de grands acteurs de l'époque comme Georges Marchal et la tragédienne Maria Casares, est prévue le vendredi 29 octobre à la maison de la culture Ibn-Rachiq. Le choix de ce film peu connu, La 7e porte, est significatif à plus d'un titre. En effet, c'est une œuvre qui révèle les rapports peu connus d'un artiste hors pair, Hédi Jouini, avec le cinéma. Ce grand auteur, compositeur et interprète de Taht el yasmina fi ellil et lamouni elli gharou minni avait approché le septième art au Maghreb au milieu des années 40, période où il fut invité au Maroc pour être acteur dans le film Le possédé (al majnoun) de Jean Bastia et pour écrire et composer les chansons du film La 7e porte d'André Zwobada, où il fait deux apparitions aux côtés de son épouse, la chanteuse tunisienne Widad, qui y interprète ses chansons. La participation tunisienne à La 7e porte fut très importante. Outre les chansons de Hédi Jouini et les prestations chantées, jouées et dansées de Widad et Anissa Jamel, l'adaptation et les dialogues de la version arabe furent confiées au tunisien Noureddine Ben Mahmoud, journaliste, poète et directeur de Radio Tunis à cette époque. Les chansons écrites par Hédi Jouini en langue arabe figurent, ce qui est rare, dans les deux versions du film. Par ailleurs, le choix de ce film est une manière de saluer André Zwobada, ce réalisateur français qui a toujours défendu l'image et la culture africaines. C'est d'ailleurs grâce à lui que le premier long métrage La noire de ...du cinéaste sénégalais Sembène Ousmane a vu le jour et remporté le Tanit d'or de la toute première session des JCC en 1966. Il avait aussi soutenu le premier court métrage de Sembene Borom Sarrett ayant obtenu le prix de la première œuvre au festival de Tours en 1963. Il est à signaler que la projection de la version arabe sera précédée notamment d'un court métrage Papa Hédi, en cours de réalisation (work in progress) de Claire Belhassine, la petite-fille de Hédi Jouini. Outre un récital a capella de sa fille Afifa, ainsi que d'un concert de rue de l'orchestre de son benjamin Adel Jouini, réinterprétant en jazzy des mélodies de Hédi Jouini, son fils Naoufel signera le livre Hédi Jouini, la trace d'un géant illustrant les étapes clés de la vie de Jouini. La 7e porte et son auteur occupent une place à part dans l'histoire du cinéma de la période coloniale au Maghreb. En effet, alors que la majorité des films, qui y furent tournés à cette époque, montraient des images pour le moins négatives, André Zwobada créa l'exception en valorisant la culture maghrébine en choisissant de réaliser deux films inspirés de contes et légendes maghrébines, Noces de sables et La 7e porte.