Il était question lors de cette rencontre de témoignages de sculpteurs appartenant à la première génération (Abdelhamid Bouden et Hachmi Marzouk), à la deuxième (Mohamed Yangui, Belaifa Boujemaa et Houda Gorbel) et à la troisième (Mohamed Bouaziz, Yosri Bahrini et Zinet Triki) qui ont tous parlé de leurs expériences réciproques en les inscrivant dans le processus de l'évolution de l'histoire de la sculpture en Tunisie, depuis ses débuts jusqu'à nos jours. Le Musée national d'art moderne et contemporain a organisé, le 20 avril 2018, en marge de l'exposition «Sculptural sculpté» qu'il abrite actuellement, une table ronde et un hommage au doyen des sculpteurs tunisiens Hédi Selmi. A l'ouverture de cette manifestation, qui a vu la présence (assez timide, à vrai dire) d'artistes et d'universitaires. Sami Ben Ameur, conseiller chargé de la direction du Musée national d'art moderne et contemporain, a noté que cette rencontre s'inscrit dans le cadre du programme pré-inaugural officiel du musée et s'articule autour de l'exposition «Sculptural sculpté» (le mot «Sculptural» dans le thème de l'exposition renvoie au traitement de la matière dure et «Sculpté» renvoie à cette matière souple) inaugurée le 21 mars dernier à l'occasion de l'ouverture officielle de la Cité de la culture et qui se prolongera jusqu'au 30 avril. Cet événement vise à créer une synergie entre les différentes générations des artistes sculpteurs et céramistes qui ont travaillé sur les surfaces en relief et sur les formes tridimensionnelles. Le but étant de mettre en exergue cet important aspect de la mémoire picturale en Tunisie depuis ses balbutiements. L'exposition est composée d'une collection d'œuvres de plus de 60 artistes tunisiens de divers courants artistiques et appartenant à différentes générations et qui ont été sélectionnées parmi un premier lot d'œuvres déjà disponible au musée après avoir été transféré du palais Ksar Saïd. Un hommage est rendu au sculpteur Hédi Selmi, considéré comme le doyen de la sculpture en Tunisie et dont le parcours a marqué l'évolution de cet art dans le pays. Trois de ses œuvres sont visibles à la salle, avec baie vitrée, située à l'entrée du musée (sculptures en fer et en métal) et une autre sculpture en marbre blanc, socle en bois, intitulée «L'oiseau», dans la salle d'exposition principale. Une sélection de dessins de sa signature a été présentée, vendredi dernier, dans la salle qui a abrité la rencontre. Table ronde et hommage En prélude à la rencontre, Ben Ameur a souligné que la tâche fut difficile, celle de récupérer et de sélectionner les œuvres qui étaient placées dans les dépôts du palais Ksar Saïd dans de très mauvaises conditions. «Les conditions étaient très difficiles et la sélection devait se faire rapidement pour préparer l'exposition, cela explique l'absence de certains artistes», a-t-il souligné. Rappelons que le palais abrite près de 13.000 œuvres artistiques acquises depuis les années 60 et dont certaines sont dans un état critique. Dans le cadre d'une campagne nationale pour le sauvetage du fonds national des œuvres d'art plastique de l'Etat (qui s'est vraiment fait attendre!), 1.007 de ces œuvres ont été transférées, le 5 février dernier, vers les réserves de la Bibliothèque nationale de Tunisie (BNT) et d'autres vers les dépôts du musée de la Cité de la culture. Les travaux de cette rencontre ont démarré avec la présentation par l'universitaire Rachid Fakhfakh de «Sculptural Sculpté», intervention au cours de laquelle il a fait savoir, en sa qualité de membre d'organisation de cette exposition, que cette initiative revisite les parcours des artistes sculpteurs tunisiens, partant de l'artiste Hédi Selmi en passant par des artistes de la génération qui a suivi, tout en donnant la place qui lui sied à la jeune génération. Place a été donnée ensuite aux travaux de la table ronde dont la modération a été faite par l'artiste et universitaire Sarra Ben Attia. «Une lecture dans la pratique sculpturale moderne», telle était l'intitulé de la conférence donnée par l'universitaire Wahid Awi à travers laquelle il a révélé que le processus sculptural contemporain en Tunisie a été témoin des développements généraux observés dans le domaine des arts plastiques depuis les années soixante du siècle dernier jusqu'à aujourd'hui avec trois générations successives qui se sont formées chronologiquement. La première génération a vu le jour pendant la période des années soixante et soixante-dix, avec la formation des premiers sculpteurs à l'étranger. La deuxième génération a vu le jour entre les années 1980 et 1990 avec le développement d'expériences initiées par des pionniers. La troisième génération est celle d'aujourd'hui, traversant une période d'expérimentation visant à se soustraire des démarches précédentes en proposant une large diversité des expériences. L'universitaire Kamel Kchaou a, de son côté, souligné dans sa conférence sur «La céramique artistique en Tunisie ; entre authenticité et modernité» que la céramique est une pratique profondément enracinée dans notre patrimoine et dont les artistes ont puisé leur technique et inspiration. La richesse et la diversité de la céramique en Tunisie ont permis aux artistes de développer cet art à travers des approches modernes qui ont ouvert les horizons devant pour plusieurs générations d'artistes. L'universitaire a évoqué l'expérience pionnière d'Abdelaziz Gorgi, et celle de Khaled Ben Sliman qui se distingue par son expérimentation sans limites des signes et des symboles. Il était question, également, lors de cette rencontre de témoignages de sculpteurs appartenant à la première génération (Abdelhamid Bouden et Hachmi Marzouk), à la deuxième (Mohamed Yangui, Belaïfa Boujemaa et Houda Gorbel) et à la troisième (Mohamed Bouaziz, Yosri Bahrini et Zinet Triki) qui ont tous parlé de leurs expériences réciproques en les inscrivant dans le processus de l'évolution de l'histoire de la sculpture en Tunisie, depuis ses débuts jusqu'à nos jours. Au terme de cette journée et dans le cadre de l'hommage rendu à feu Hédi Selmi, Sami Ben Ameur a remis (le programme annonçait la présence du ministre des Affaires culturelles à qui revenait cette tâche) à la famille de Hédi Selmi, représentée notamment par sa veuve Rose Marie, un trophée en signe d'honneur et de considération pour l'œuvre magistrale du pionnier de la sculpture en Tunisie.