Le Centre de recherches, d'études, de documentation et d'information sur la femme (Crédif) a organisé jeudi dernier une conférence-débat portant sur l'étude des «Représentations sociales des violences à l'encontre des femmes chez les hommes, les jeunes et les adultes». Ce projet entre dans le cadre du programme «Mousawaat» (égalité), chapeauté par le centre en partenariat avec l'Union européenne et le Fnuap L'événement a eu lieu au siège du Crédif en présence d'une audience majoritairement féminine. Pour Mme Larguech, directrice générale du centre «la violence est un phénomène qui intéresse et implique tout le monde. Les acteurs sociétaux et gouvernementaux doivent mener le même combat afin d'élever les voix contre la violence, devenue malheureusement endémique. Aujourd'hui, nous vous présentons une étude assez particulière. Elle porte sur la représentation sociale des femmes et de la violence qu'elles subissent, aux yeux des hommes». La représentante de l'Union européenne, Mélanie Bride, était également présente et a réitéré le soutien inconditionnel de l'UE aux projets qui luttent contre ce fléau, ainsi qu'à la loi qui est mise en vigueur et qui protège les femmes contre les violences. Une loi qu'elle appelle «révolutionnaire». «Aujourd'hui, d'autres questions doivent se poser. On veut comprendre. Pourquoi malgré l'émancipation des femmes et l'acquisition continue de ses droits, elles continuent à vivre des situations sexistes au travail et à subir les violences ?» S'est-elle interrogée. Les violences contre les femmes ? Pourquoi ne pas demander aux hommes... Pour la sociologue Samira Ayad, qui a travaillé pour cette étude, «nous avons voulu, à travers notre enquête, changer l'angle par lequel est prise l'étude du phénomène de la violence. D'après les statistiques, les hommes sont les acteurs principaux et les femmes les principales victimes. Mais il faut voir la représentation sociologique qu'a l'homme. Afin de comprendre et les conscientiser». Les principales questions sur lesquelles s'est basée l'étude portaient sur la représentation des femmes par les hommes, quels actes considèrent-ils comme acte de violence, quelles sont leurs prises de position face à cela et comment conçoivent-ils la prévention. «Malheureusement, les hommes ne vénèrent la femme en général que quand elle endosse le rôle de mère. La maman reçoit beaucoup de respect et d'admiration de la part du sexe masculin. Mais quand on parle de femme, elle est associée au désir, au sexe, à la tentation par référence à Eve...». Quant aux types de violences, elles peuvent aller de l'agression verbale au viol, en passant par la violence économique. Pour la plupart des hommes interrogés, certains actes ne sont pas considérés comme violents, tels que le claquement de portes, les hurlements, etc. Pour eux, ce sont des choses qui se font et que les femmes ont tendance à exagérer. Interrogés sur les mesures préventives afin d'éviter que les femmes ne soient violentées, les hommes ont recommandé à ce qu'elles «soient patientes, évitent de se plaindre, respectent leurs maris sans les humilier, soignent leurs apparences vestimentaires quand elles sortent... ». La sociologue a achevé sa présentation en insistant sur l'importance de dénoncer les violences et de porter plainte afin de sanctionner l'agresseur en appliquant les lois en vigueur visant à protéger la femme contre toute forme de violence. Le changement de la représentation commence par le changement de la mentalité La psychologue Wafa Amar a, quant à elle, révélé à l'audience l'importance d'impliquer les hommes, les inviter à réfléchir et reconnaître leur rôle dans ce phénomène. «Les facteurs sociologiques, culturels et familiaux persistent encore aujourd'hui. Les hommes naissent avec cette idée qu'ils sont dominants et que les femmes sont vulnérables, fragiles et dépendantes. Ils se trouvent ensuite dans une société patriarcale, machiste, qui accorde plus de chances et d'opportunités au sexe masculin», a-t-elle martelé. Elle dénonce également l'utilisation de la femme dans les médias et les publicités comme objet d'incitation à la vente, car elle estime qu'aucun changement des représentations ne peut se faire sans le changement des mentalités. La chercheuse considère que la refonte du système éducatif est une nécessité aujourd'hui, afin de pouvoir changer les mentalités.