Entraîneur adjoint de l'équipe de Belgique depuis deux ans, Thierry Henry va retrouver la France, dont il est le meilleur buteur historique (51 réalisations). Tout le monde fait comme si de rien n'était, alors que la relation entre Titi et son pays s'est distendue depuis bientôt une décennie. Il sera là, sur le banc de touche. Et personne ne pourra s'empêcher de penser que Thierry Henry aurait pu (ou dû) se retrouver de l'autre côté, assis non loin de son ancien capitaine, Didier Deschamps. Vingt ans après leur conquête planétaire commune, quand l'un était chef de file et l'autre un jeune sans peur et sans reproche, l'image aurait eu de la gueule. L'histoire aurait été belle. Elle restera dans les cartons. Aujourd'hui, Henry, 123 sélections et 51 buts en équipe de France, n'aura qu'une envie : faire barrage aux Bleus. Pour la première fois de sa vie. Une fois qu'on a dit ça, on n'a pas dit grand-chose. Et surtout pas l'essentiel. A savoir : comment Thierry Henry s'est retrouvé dans le staff de Roberto Martinez, en qualité de second adjoint responsable des attaquants ? Et pas chez les Bleus ? Parce que personne n'est allé le chercher au moment où il tournait la page de sa glorieuse carrière de footballeur, pas plus que lui ne s'est rapproché de la France, pays avec qui le lien s'est sérieusement distendu au tournant des années 2010. Perdu de vue ! Il y a eu ce 18 novembre 2009 et cette main irlandaise, qui a envoyé la France au Mondial et jeté son auteur aux orties médiatiques. Dans la tempête, le capitaine des Bleus s'est retrouvé seul au monde. Jamais, il ne s'est senti soutenu ni défendu par la Fédération française de football. Le crash de Knysna — dont il fut un acteur passif, mais conscient — n'a rien arrangé. Du fond du car, il n'a jamais essayé d'éteindre le feu. Et en a pris plein la tronche, comme les autres. L'éloignement a été physique et symbolisé par un départ aux Etats-Unis. Noel Le Graët n'était pas le patron de la 3F quand Titi a quitté le navire bleu, sur une note amère au possible. Mais le président a son avis sur la question. Et sa réponse en laisse entendre suffisamment sans en dire beaucoup. Les liens de l'ancien attaquant phare des Bleus et d'Arsenal sont-ils distendus avec la Fédération? «C'est la vie qui est comme ça. Il est en Angleterre depuis longtemps, j'ai très peu de contact pour ma part. On l'a un peu perdu de vue... Il a peu de présence en France et peu de contacts avec la Fédération», a reconnu le patron de la FFF. «Ça fait bizarre, n'a pas caché Didier Deschamps dimanche dans Téléfoot. Je suis content... enfin, je suis content de le revoir parce que, là, je suis sûr que je vais le revoir. Comme il est pas mal pris, on ne se croise pas souvent. C'est quelqu'un que j'apprécie beaucoup, il y a toujours eu beaucoup de respect entre nous. Il était très jeune quand il est arrivé avec nous, il avait pratiquement l'âge de Kylian. Mais ça fait bizarre parce qu'il est Français et sur le banc de l'adversaire. Pour lui aussi, ça va être bizarre» Probablement. Mais ça, on ne le saura jamais parce que le principal intéressé, également consultant sur Sky quand il n'est pas sur le banc belge, ne s'exprime pas dans les médias sur son rôle. Un coup d'avance Membre du collectif France 98, Lionel Charbonnier ne nourrit pas de rancœur quant au choix de son partenaire : «Ça ne nous pose aucun problème. Je ne suis pas jaloux qu'il bosse pour la Belgique. Je leur dis bravo. La Belgique a un coup d'avance : le foot de demain passera par des staffs élargis, comme au rugby avec un entraîneur pour chaque ligne. Si l'attaque de Belgique est si bien, elle le doit à Henry qui a su faire passer un message. Henry est capable de faire le lien». Le lien, l'expérience et la connaissance XXL de l'ancien buteur d'Arsenal, les attaquants bleus se seraient bien vus en profiter. Giroud en tête. «Ça fait bizarre de l'avoir contre nous en tant que français, mais tout le monde sait qu'il a entamé une carrière d'entraîneur, comprend le Blue de Chelsea. Il a la chance d'être au sein d'une équipe avec une belle génération. C'est une légende vivante du football français, il a beaucoup apporté. Mais on ne pense pas trop à son choix, on se concentre sur le terrain et sur le jeu et peut-être qu'il entraînera les Bleus un jour. Ou peut-être pas».