Un film léger. C'est de cette manière que nous pourrions qualifier La mosquée, le film qui représente les couleurs du Maroc dans la compétition officielle des longs métrages. Un opus produit en 2010 et écrit et réalisé par Daoud Oulad Sayad. Tout tourne autour d'une fausse mosquée construite comme un décor pour En attendant Pasolini, le précédent long métrage du réalisateur. En effet, Moha loue son terrain, sa seule source de revenu, à l'équipe du film pour y reconstituer une petite cité à Zagora, un village reculé du Maroc. Mais, une fois le tournage terminé, les habitants démolissent tout le décor à l'exception de cette mosquée qui n'en est pas vraiment une. Et ils font de cet espace un lieu de prière permanent, et du figurant qui a campé le rôle d'un romain dans le film, leur imam. Moha n'arrive plus, donc, à récupérer son bout de terrain : pour lui, c'est le désarroi total. Cherchant une issue à son problème et le moyen de retrouver la jouissance de son bien, il tente tout, mais se perd dans le labyrinthe des interprétations religieuses personnelles non dénuées, pour la plupart, d'intentions «douteuses», sans obtenir gain de cause. A travers cette fiction tirée d'une histoire vraie, Daoud Oulad Sayad se focalise sur la problématique de la lecture des textes sacrés. Une thématique très actuelle, surtout à l'heure où l'on assiste, ici et là, sur les chaînes satellitaires arabes ou ailleurs, à un déferlement de fatwas dont certaines sont aussi incroyables les unes que les autres, créant ainsi polémiques et controverses. Mais ce problème très délicat est appréhendé à travers un traitement très original où légèreté, suggestion et humour décalé sont les modes d'approche principaux. Le réalisateur pousse parfois jusqu'à la caricature certaines situations pour faire passer son message ; et ce n'est pas pour nous déplaire ! La mosquée dénonce aussi, à travers cette histoire assez anecdotique, mais pourtant vraie, l'hypocrisie et l'opportunisme de certains pseudo-religieux qui manipulent les esprits simples et crédules au nom de la foi pour servir en vérité leurs propres intérêts. Nous verrons alors, entre autres, cette mosquée servir de lieu de propagande pour des élections et un faux imam qui n'hésite pas à porter le costume du tournage à l'arrivée des touristes, pour gagner quelques sous ! A-t-on idée ! Mais à travers tous ces sujets, le réalisateur nous fait voyager au fin fond du Maroc et nous présente des esquisses et des bribes de la vie de ces villageois, avec une narration qui se veut principalement sociale. Ce qui est frappant, en outre, dans ce film marocain, c'est le naturel déconcertant du personnage principal, Moha. Mais le mokaddem ou l'imam sont des personnages à la limite du burlesque et ne sont pas moins intéressants. Dans La mosquée, les dialogues sont «étrangement» succincts, laissant davantage l'image s'exprimer d'elle-même et articuler son propre langage. Tout mène à croire que l'œil du photographe qu'est Daoud Oulad Sayad l'emporte sur celle du réalisateur : et c'est tant mieux ainsi ! La fin de ce long métrage est aussi suggestive que tout le reste : elle laisse ouverte l'interprétation... Bref, La mosquée est un film où l'on rit. Que dire, sinon qu'on a envie de le revoir encore une fois ? Ça tombe bien, le film repasse aujourd'hui à 20h30 au cinéma Amilcar.