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De l'inconscient collectif à l'Esprit dans l'Histoire
Philosophie et psychanalyse
Publié dans La Presse de Tunisie le 31 - 08 - 2018


Par Raouf SEDDIK
Q uand la théorie psychanalytique en vient à nous parler, en particulier avec le Suisse Carl Gustav Jung, d'inconscient collectif, nous savons qu'il s'agit à travers cette notion d'une sorte d'accumulation de données héritées par l'humanité au fil des générations. L'inconscient collectif est un lieu d'archivage, mais aussi de pensée secrète, qui échappe à notre délibération individuelle. Quand nous rêvons, mais aussi quand nos poètes produisent des mythes en s'abandonnant à une sorte d'état second, nous puisons dans les images de notre inconscient collectif et nous parlons aussi un langage qui n'a pas de frontières et que nous n'avons jamais appris parce qu'il nous précède.
Sans doute y a-t-il un parallèle à faire avec l'animal qui, par le biais de son «instinct», transporte tout un savoir ancestral, si l'on peut dire, grâce auquel il n'a guère besoin par exemple d'un long apprentissage pour apprendre à chasser, s'il s'agit d'un animal prédateur, de construire des galeries s'il s'agit d'une fourmi ou d'une termite, etc. Il porte en lui ce savoir, ou ce savoir-faire, qu'il lui suffit de réveiller à la faveur de quelques gestes, qu'il aura d'abord vu faire durant la première période de sa vie, puis qu'il aura faits lui-même... Et tout le reste suit, abondamment !
La différence avec nous les hommes est que ce qui s'est accumulé dans la mémoire de notre espèce, à l'insu de chacun de nous, c'est un ensemble de connaissances qui relèvent, non pas seulement de notre instinct en tant qu'animaux, mais aussi de notre qualité de membres de la civilisation humaine... Ce qui remonte à de nombreux millénaires, depuis la période où l'homme a expérimenté la vie sociale et où son langage — celui de son état conscient — était tout à fait fruste.
Hartmann contre Darwin
L'accumulation des données dans l'inconscient collectif, selon cette théorie, a été réalisée par strates successives. Ce qui signifie que les strates les plus anciennes renvoient à un état de la civilisation qui est à la fois le plus commun à tous nos congénères et le plus primitif. Mais, à mesure que l'on se rapproche de l'époque actuelle, les strates — certes plus fines parce que correspondant à des périodes plus brèves — se différencient et épousent les contours des différentes cultures de la planète. De sorte qu'entre un Chinois et un Espagnol, par exemple, il y a dans les profondeurs de l'inconscient collectif un héritage commun mais il y a aussi, dans les parties moins profondes, des éléments qui vont renvoyer à des traditions distinctes. Ainsi, les rêves de l'un et de l'autre peuvent, comme nous l'avons dit précédemment, exprimer une langue universelle et uniforme, mais ils peuvent engager aussi, par référence à un patrimoine plus récent, une forme de langage davantage marqué par le passé de leurs cultures respectives.
Comme chacun sait, une controverse va se déclarer entre Freud et Jung autour de cette notion d'inconscient collectif. Sans doute parce que cette dernière est issue de deux sources et qu'il est possible de mettre l'accent sur l'une ou sur l'autre quand il s'agit de proposer une définition : première source, l'inconscient en tant que réceptacle des désirs refoulés par l'individu suite à l'expérience précoce et violente d'une «censure». Le passage de l'inconscient personnel à l'inconscient collectif s'explique dans ce cas de figure par le fait qu'il existe des interdits collectifs : les tabous ! Deuxième source, plus positive : cet héritage du passé archaïque de l'homme, dans sa double dimension, naturelle et culturelle, pour lequel la psychanalyse trouve une première thématisation dans l'évolutionnisme de Jean-Baptiste Lamarck et de Charles Darwin...
Freud aura sans cesse des réserves au sujet de cette dimension positive de l'inconscient collectif, sur laquelle insistera au contraire Jung ! Mais nous avons vu la semaine dernière que ce qu'il est convenu d'appeler la «psychologie romantique» a, elle aussi, poussé dans la direction de la conception d'un inconscient collectif. Elle l'a fait essentiellement à partir de la philosophie schellingienne. Eduard von Hartmann (1842 - 1906) est l'auteur d'un livre intitulé «Philosophie de l'inconscient» et il en est une bonne illustration. D'autant meilleure, du reste, qu'on trouve chez lui une critique du darwinisme. Ce qui veut dire que sa conception de l'inconscient se rapproche suffisamment de la conception darwinienne — celle d'un patrimoine non conscient véhiculé par l'espèce et dont le principe est commun à l'ensemble des êtres vivants — pour qu'il éprouve le besoin urgent de s'en démarquer... Sans s'attarder sur le contenu particulier de cette critique, il nous suffit de relever qu'en tant que représentant de l'idéalisme allemand, il est attentif à la dimension spirituelle de l'inconscient. Le point de départ — schellingien — est celui de l'expérience d'une réalité spirituelle irréductible au moi : la nature est emplie d'Esprit ! L'inconscient manifeste la présence en l'âme humaine de cette nature tout entière chargée d'esprit.
Hölderlin ou Hegel ?
Du point de vue de Hartmann comme de tous les représentants de la psychologie romantique, il n'y a pas de divin en dehors de la nature — position spinoziste — mais toute la nature est traversée par le divin et fonde d'ailleurs un certain retour au religieux qui, pour le coup, est étranger à Spinoza.
Or cette conception d'un Esprit présent — et agissant — au cœur de la nature est encore plus étrangère à Darwin. Elle fonde l'idée d'un inconscient collectif plus vivant, qui va déboucher naturellement sur une nouvelle conception de l'Histoire, comme œuvre de l'Esprit : l'homme est désormais l'acteur — inconscient — d'un drame invisible conçu et réalisé par cette part divine dont le sujet éprouve la présence en dehors de lui. La césure entre nature et histoire est abolie : ce qui anime la nature, c'est cela même qui conduit la marche de l'histoire ! Mais qui donc se fait la voix de l'Esprit parmi les hommes : le poète qui chante ou le philosophe qui pense ? Est-ce Hölderlin ou est-ce Hegel ? Qui, le mieux, nous sort de notre sommeil pour nous ouvrir à la vérité du drame universel dont nous sommes tous les acteurs ?


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