Les parents, sur le qui-vive, s'inquiètent des menaces proférées par les syndicalistes. Le gouvernorat et le commissariat régional à l'Education examinent depuis plusieurs mois tous les dossiers scolaires dans une région qui compte 73.000 écoliers (313 écoles) et 46.997 collégiens et lycéens (73 collèges et lycées). Et plusieurs travaux de restauration et de maintenance des établissements ont porté sur les réseaux d'électricité, l'eau potable, le renouvellement des équipements scolaires, le badigeonnage des locaux et des clôtures ! Malgré cela, beaucoup d'établissements vont entamer la nouvelle année sans qu'ils aient été rénovés puisque les travaux de restauration vont se poursuivre pendant du longs mois. En outre, plusieurs écoles en milieu rural souffrent de délabrement de leur infrastructure et n'ont ni eau potable, ni cantine, ni toilettes, ni clôture, ce qui va obliger des centaines de jeunes écoliers à faire leurs besoins en pleine nature avec tout ce que cela comporte comme risque. Cela sans oublier le transport rural scolaire qui fait défaut dans plusieurs localités. Même chose pour les bus de la Soretrak qui ne desservent pas beaucoup de localités à cause d'une infrastructure de base défaillante. D'où le calvaire des élèves, obligés de parcourir plusieurs km à pied et d'affronter les dangers des animaux sauvages, des crues des oueds et des délinquants. Tout cela explique le taux important d'absentéisme, d'échec et d'abandon scolaire. Notons dans ce contexte que la Soretrak a consacré cette année 109 bus, 79 en milieu rural et 30 en milieu urbain, pour le transport scolaire. Et on attend l'arrivée de 9 nouveaux bus, outre la création de trois nouveaux trajets en ville. Les menaces de l'Ugtt Par ailleurs, toutes les familles ont accueilli avec beaucoup de désapprobation les récentes déclarations des syndicalistes, prédisant une nouvelle année scolaire très difficile. En fait, les citoyens en ont ras le bol des menaces de dirigeants qui ne font plus dans la dentelle avec leurs discours tranchants. Salah Makhloufi, père de 4 enfants scolarisés, nous confie dans ce contexte : «On n'accepte en aucun cas qu'on touche aux études de nos enfants. Trop, c'est trop, non seulement les enseignants ont tendance à se calfeutrer de plus en plus dans le corporatisme, mais l'Etat est lui aussi pris à partie par l'opinion publique pour son laxisme face aux exigences et aux menaces de l'Ugtt. C'est pour toutes ces raisons qu'on préfère de plus en plus inscrire nos enfants dans l'enseignement privé». Inscription à distance : que de déceptions ! La campagne d'inscription à distance lancée par le ministère de l'Education avec pour objectif de rapprocher les services administratifs aux citoyens et d'atteindre «le zéro papier» a démarré le 3 septembre dans le gouvernorat de Kairouan dans une ambiance de vraie pagaille et de longues attentes dans les différents bureaux de poste avec des files d'attente de citoyens ayant le même but : procéder à l'inscription. Au bureau des PTT situé à El Mansourah (Kairouan-Sud), plus d'une centaine de jeunes attendaient leur tour dans une chaleur suffocante. Ridha Selmi, 17 ans, nous interpelle : «Bien que ce nouveau projet, poursuivi par tout gouvernement qui se veut moderne, nous permette d'oublier une fois pour tout les timbres, les enveloppes et beaucoup de paperasse et d'entrer ainsi de plain-pied dans le tout digital, je constate qu'il y a beaucoup de précipitation et de déception. En effet, il ne suffit pas de dire que tout élève pourra procéder à son inscription par le PC, les tablettes ou même les smartphones… Et on oublie le fait que la couverture web n'englobe pas les zones rurales éloignées. Et même ici, en ville, on passe de longues heures à attendre car «le réseau est saturé», où est donc le gain de temps ? Le ministère aurait dû recourir à l'inscription selon les niveaux de façon à ce que les lycéens et les collégiens ne viennent pas tous en même temps…». Par ailleurs, dans les zones rurales, c'est le désenchantement des jeunes, notamment dans les délégations de Oueslatia, Hajeb El Ayoun, El Ala, Sbikha et Haffouz où les élèves n'ont pu accéder à la numérisation de leur inscription faute d'une bonne connexion internet. Et beaucoup d'entre eux ont dû faire des déplacements coûteux en ville pour se faire inscrire : «Avant de prendre une telle décision, il fallait tout d'abord moderniser le réseau internet et le généraliser à travers tout le pays… Sinon c'est la pagaille, la déception et les frustrations qui nous font regretter les vieilles méthodes», nous dit Ali Rebhi, 16 ans, de la zone de Mouisset.