La première édition du Festival Premier film documentaire méditerranéen se déroule à la maison de la Culture Ibn-Rachiq, du 26 au 29 décembre. Un festival indépendant et alternatif, qui prône l'engagement pour le film documentaire de création et invite à la découverte de jeunes auteurs méditerranéens. Dr Fethi Saïdi, fondateur du festival et président de l'Association du cinéma documentaire tunisien, nous a parlé de cet espace de rencontre et d'ouverture et de sa vision engagée pour les nouveaux talents et des états actuels du documentaire. «Il n'y a ni tapis rouge, ni strass, ni paillettes, mais c'est une vraie fête du cinéma, d'un cinéma de la vérité». C'est avec ces mots que Fethi Saïdi, auteur réalisateur et fondateur du Festival Premier film documentaire méditerranéen, lançait, mercredi dernier, à la maison de la culture Ibn-Rachiq, le coup d'envoi du Festival «Premier documentaire méditerranéen». Le festival organisé par l'Association cinéma documentaire tunisien (présidé par Fethi Saïdi) en partenariat avec la Maison de la culture Ibn-Rachiq est né dans les suites du Docu Med – Regards documentaires méditerranéens (avril 2018), «un festival du cinéma documentaire méditerranéen pour promouvoir un cinéma du réel, indépendant et créatif». C'est dans le manque d'espace offert aux premières œuvres cinématographiques qu'est née l'idée de créer ce festival. Ce sont 25 films documentaires, des premières œuvres, qui ont été sélectionnés et qui seront projetés sur 4 jours. Vingt-cinq jeunes réalisateurs, 13 pays méditerranéens (Algérie, Espagne, France, Grèce, Italie, Liban, Maroc, Palestine, Portugal, Tunisie, Turquie) et des thématiques universelles, aussi actuelles qu'intemporelles : les migrations, les exils économiques et les transformations écologiques. Quatre jours pour questionner la réalité à travers cette forme méconnue et marginalisée qu'est le film documentaire. Outre les projections, des rencontres et des débats sont prévus, autour des thématiques et des films et un atelier d'initiation à la réalisation d'un documentaire de création sera proposé au cours du festival. Donner la chance aux premières fois Ce festival est un espace de rencontre entre de jeunes cinéastes indépendants et le public. Il a pour but de révéler de nouveaux réalisateurs méditerranéens à travers une sélection de 25 premières œuvres du cinéma documentaire . C'est l'occasion également de faire découvrir davantage ce genre cinématographique au public tunisien et de faire naître des vocations chez les jeunes auteurs réalisateurs tunisiens. Le festival permettra, également, à travers un atelier de formation, d'initier les étudiants en cinéma aux techniques et à l'esthétique de la réalisation du documentaire. M. Saïdi a souligné l'importance de cette opportunité pour les jeunes auteurs. «Cette rencontre est une occasion rare de confronter leurs premiers projets au regard du public et réciproquement. Elle permet au public de découvrir une façon spontanée, neuve et parfois surprenante de filmer le réel». Une sélection exigeante Le festival s'inscrit pleinement dans les objectifs de l'Association cinéma documentaire tunisien, dont le but est de promouvoir les films documentaires de création en Tunisie et de favoriser les échanges entre les créateurs et le public, particulièrement autour des premières œuvres. La sélection des films s'est donc faite dans un esprit d'engagement pour les valeurs humanistes, pour la liberté de création et de partage et d'ouverture sur l'autre. Les films (25 sélectionnés sur près de 1.000 films reçus) sont des premières créations, non primées répondant aux critères du genre. «Nous avons privilégié pour ce Festival des premiers films documentaires de création, avec pour principaux critères des sujets forts, une expression originale et une date de production récente. Le choix de la Méditerranée s‘est imposé naturellement, mais le festival reste ouvert à toutes les créations indépendantes», souligne M. Saïdi. Le fondateur de ce festival indépendant, sans palmarès ni prix (faute de financement), a mis l'accent sur la singularité et la richesse des films programmés : «Ces films offrent un moment rare pour le public, car un premier film est un concentré de spontanéité, d'audace et de prises de risque qui peuvent manquer à mesure que l'on avance en carrière, comme en âge. Et c'est également une "première fois" pour le public tunisien qui aura droit à des primo-films, brut, sans affinage…c'est une expérience enrichissante pour tous». Le parti pris du documentaire de création Le fondateur du festival assume un parti pris franc, celui de l'exigence. «Certes, le documentaire gagne en popularité et commence à fédérer un public, mais le genre souffre de plusieurs maux : la précarité et le manque de moyens poussent parfois à rechercher la facilité, à pervertir et tordre l'expression, c'est un des principaux freins à la création. Ce festival a aussi pour but de refonder les bases et d'offrir au public des œuvres, qui sans être puristes, se distinguent totalement du reportage télévisé, des micros-trottoirs, des films intimistes doc-selfie». Il regrette l'absence de ce genre filmique plus que jamais nécessaire et utile. «Le documentaire souffre de plusieurs carences en Tunisie, à tous les niveaux qui peuvent en assurer l'existence : le financement, la distribution et la formation, mais il souffre plus de l'absence de statut juridique». Militant engagé et déterminé, Fethi Saïdi appelle à la réflexion sur l'état et le devenir du documentaire et espère que ces journées initieront le public et les instances culturelles à s'intéresser au documentaire. «Ici, le public apprend à prendre de la distance, loin de l'immédiateté et de la froideur des reportages, aussi brûlant et attractif que puisse être le sujet. Le documentaire est une invitation à faire l'expérience du réel, c'est une aventure pour l'auteur, pour les personnes filmées qui deviennent personnages et pour le public aussi. Une prise de risque qui unit et rapproche, c'est un moment rare et précieux». Le programme de ce festival où le réel, la poésie et le politique ne font qu'un ne manquera pas de convertir les plus sceptiques. Cette première journée a déjà livré quelques belles découvertes comme Derwisha de Leïla Beratto et Camille Millerand (Algérie) Enjil de Mourad Khallou (Maroc), Franco et mon grand-père de Xavier Ladjointe (France), «le reste du programme est encore plus prometteur», nous assure M. Saïdi. En attendant de meilleurs jours, quatre jours intenses de cinéma du réel vous attendent à la maison de la culture Ibn-Rachiq. Entrez–y gratuitement, vous n'en sortirez pas indemne, mais plus vivant et plus curieux !