L'Institut national de la statistique (INS) a rendu récemment son "verdict" sur le taux d'inflation pour l'année 2018. Un taux qui a atteint 7,5% et qui est le reflet des difficultés économiques structurelles dont souffre notre pays depuis quelques années. Un indicateur qui s'accompagne d'un déficit commercial qui se creuse et d'une dépréciation du dinar tunisien qui s'aggrave davantage. Avec la crise que connaissent les filières du lait et des œufs actuellement, le pouvoir d'achat du consommateur subit ses plus grandes difficultés. Un pouvoir d'achat qui n'arrive plus à satisfaire les besoins élémentaires et qui reflète un statu quo très contraignant pour les citoyens tunisiens. L'état du dinar tunisien, en plus du déficit commercial et d'un endettement extérieur qui dépasse les 70%, montrent une réelle urgence pour trouver des solutions à cette situation alarmante. Le taux de 7,5% de l'inflation est d'ailleurs contesté par certains économistes, estimant qu'il serait plus élevé vu que le panier de référence pour le calculer n'a pas été actualisé depuis quelques années et ne correspond plus à la consommation actuelle des Tunisiens. A y voir de près, on observe que le taux d'inflation est porté par le groupe produits alimentaires et boissons dont l'indice des prix à la consommation a augmenté de 6,2% en 2018, suite à la hausse des prix du lait et dérivés et des œufs de 11,2%, des viandes de 10,7% et des poissons de 5,9%, selon l'Institut national de la statistique (INS). De même, le groupe logement, eau, gaz, électricité et autres combustibles a enregistré une augmentation de 6,1% en glissement annuel. Cela est dû à la hausse des loyers de 5,2%, des tarifs d'entretien des logements de 15,2% et des tarifs de l'électricité et gaz de 5,5%. Evolution remarquable La même observation est faite pour le groupe habillement et chaussures, dont l'indice des prix à la consommation a atteint 8,6% en glissement annuel, soit une augmentation de 9,5% des prix des chaussures, 8,3% des prix des vêtements, 8,5% des tissus et 8,6% des accessoires. Pour le groupe transport, la hausse est de 13,3% avec une augmentation de 16,1% des prix des véhicules, de 13,2% des dépenses d'utilisation des véhicules et de 9,7% des services de transport. Cela sans oublier l'évolution remarquable pour le groupe enseignement de 8%, suite à la hausse des tarifs de l'enseignement préscolaire et de base de 6,6%, de l'enseignement secondaire de 10,4% et des prix des fournitures scolaires de 10,0%. Pour le groupe des services de restauration et hôtels, l'augmentation est de 10%, avec une progression de 8,7% pour les cafés et restaurants et de 19,3% pour les services d'hébergement. Concernant l'inflation sous-jacente, son taux est de 8%. Cette inflation, qui se mesure hors alimentations et boissons et hors énergie, est aussi un indicateur des difficultés économiques. Ainsi, les prix de produits libres (non administrés) ont augmenté de 8,3% en glissement annuel, et les prix administrés de 4,9%. Selon l'INS, les produits alimentaires libres ont progressé de 6,9% contre 2,3% pour les produits administrés. Une dette extérieure lourde D'un autre côté, l'endettement extérieur de la Tunisie pose problème puisqu'il pèse trop lourd sur les équilibres budgétaires et constitue par conséquent une contrainte majeure pour les efforts de développement économique. Avec un taux dépassant les 70% du PIB, il traduit l'incapacité de l'économie tunisienne à se rétablir et à booster la croissance économique qui n'a pas dépassé au troisième trimestre 2018 les 2,6%. Selon le dernier rapport de la Cour des comptes, le remboursement de cette dette extérieure publique se poursuivra jusqu'à l'année 2055. Le budget de l'Etat sera amené à rembourser un milliard de dollars américains seulement pour les années 2021 et 2025. Un poids colossal qui sera supporté certainement aux dépens de l'investissement et de la croissance. Il est à noter que l'endettement extérieur public a représenté, en 2016, 65% de la dette publique globale et 69% en 2017, d'après la Cour des comptes. D'ailleurs, le même rapport souligne que la gestion de cette dette n'a pas aidé non plus à limiter ces risques. Pour l'année 2016, l'exploitation insuffisante des outils de couverture des risques de l'endettement extérieur publique ont induit une augmentation de sa valeur de 3.890 MDT. D'autres défaillances ont été recensées en relation avec l'absence de plans de développement dans la préparation des programmes et des projets financés par des crédits extérieurs durant la période 2011-2016. Ainsi, le retard dans l'application des grandes réformes et la réalisation des projets publics a causé des retards dans le déblocage des crédits auprès du Fonds monétaire international (FMI). Le rapport a également précisé que les résultats des projets financés par des crédits d'appui au budget déjà pour les années 2011-2012 étaient assez limités. Seulement 23 résultats ont été concrétisés parmi 30. De même 22 réformes ont été incluses dans le mécanisme élargi de crédit du FMI. Une situation qui a induit une fragilité des équilibres extérieurs se poursuivant jusqu'à aujourd'hui. Pour ce qui est du déficit commercial, les derniers chiffres de novembre 2018 montrent un creusement de 17,3 milliards de dinars contre 14,4 milliards de dinars à la même date en 2017. Des chiffres qui inquiètent à plusieurs niveaux, surtout avec un dinar en dévaluation, s'échangeant à 3,4366 face à l'euro et 3,0240 face au dollar, à la date du 8 janvier 2019.