A ce jour, seulement une soixantaine d'entreprises opérant dans l'agroalimentaire sont certifiées Halal ; un marché qui regorge d'opportunités et qui suscite une forte concurrence entre les produits offerts et demandés sous ce label. Prenant conscience depuis quelques années du potentiel que présente le marché halal à l'export, l'Innorpi (Institut national de la normalisation et de la propriété industrielle) a entamé, depuis 2010, un projet de création d'une nouvelle prestation de certification pour délivrer le label national Halal. Ce dernier n'a vu le jour qu'en 2013 suite à une collaboration avec l'institution de Diwan Al Ifta en annonçant l'élaboration d'un label halal tunisien pour les produits nationaux de l'agroalimentaire destinés à l'exportation. Au début, ce n'était pas facile… Ines Barhoumi, chef de service de la Certification Halal à l'Innorpi, indique qu'au début, cette annonce a créé une grande polémique et que l'application du label Halal en Tunisie était l'objet de réelles controverses étant donné que la Tunisie est un pays musulman et n'a aucun besoin d'appliquer ce genre de label. Mais la politique adoptée par l'Innorpi était claire dès le début puisque l'application du label national Halal est réservé uniquement aux produits destinés à l'exportation. Par ailleurs, le secteur agroalimentaire occupe une place stratégique dans l'économie nationale avec tous ses impacts sur l'investissement, l'emploi, le développement local… A cet égard, la Tunisie doit accélérer la cadence et tirer profit des perspectives de croissance du marché mondial du Halal qui devient un fait culturel marquant dans plusieurs pays. «Certes, l'export est déjà une réalité, mais le potentiel est énorme. Ce label vient notamment, en réponse à la demande de plusieurs entreprises tunisiennes qui visent à conquérir de nouveaux marchés internationaux, avec comme objectif principal la diversification des marchés et des exportations. Cette certification basée essentiellement sur la norme ISO 22000 relative à la sécurité des denrées alimentaires ne concerne que les produits destinés à l'export à destination de plusieurs pays, notamment les pays asiatiques, africains ou européens, tels que : la France, l'Allemagne ainsi que les Etats-Unis», précise-t-elle. Les entreprises tunisiennes labellisées halal augmentent d'une année à l'autre On constate, aujourd'hui, que le marché halal s'étend à plusieurs continents puisque, pour certains, ces produits seraient de meilleure qualité. Sur un autre plan, outre l'Europe, les Etats-Unis et le Moyen-Orient, de nombreux pays, à l'instar du Maroc, l'Indonésie, le Malaisie… exigent une certification Halal pour les denrées alimentaires importées. D'où l'importance de développement de cette activité à l'échelle nationale. Au niveau national, le label Halal tunisien se base sur les normes de l'Institut de normalisation et de la métrologie des pays islamiques (Smiic), placé sous tutelle de l'Organisation de la coopération islamique (OCI), qui regroupe 57 pays musulmans, de manière à faciliter sa reconnaissance au niveau régional et international. A cet égard, grâce à ce label, il y en a suffisamment pour que la Tunisie puisse en tirer profit d'autant plus que les conditions propices à l'encouragement des entreprises pour opérer dans ce marché ont été améliorées. «L'Innorpi a pris plusieurs mesures avec Diwan Al Ifta visant à diversifier l'offre tunisienne et améliorer la qualité des produits halal pour se placer sur ce marché mondial en plein essor», affirme Barhoumi. Elle ajoute que depuis le lancement de ce label, le nombre des entreprises tunisiennes labellisées halal ne cesse d'augmenter d'une année à une autre. Jusqu'à ce jour les produits de 60 entreprises tunisiennes exportatrices ont été certifiées contre une dizaine de demandes déposées auprès de l'Innorpi en 2013 pour l'obtention du label Halal. Ce chiffre pourrait évidemment augmenter d'une manière significative à condition d'intensifier la sensibilisation et la communication auprès des entreprises exportatrices pour que les produits halal made in Tunisia connaissent un véritable succès dans les pays musulmans et non musulmans à forte communauté musulmane. Une norme pour les produits cosmétiques De nos jours, le label halal tunisien ne concerne que les produits alimentaires, à l'instar des dattes, l'huile d'olive, des additifs alimentaires, des huiles et graisses végétales, des compléments alimentaires, des viandes de volailles, des conserves alimentaires… Mais il pourra toucher à l'avenir d'autres secteurs comme les cosmétiques. Barhoumi annonce, dans ce cadre, que la Tunisie prépare son entrée sur le marché des cosmétiques halal afin de développer ses exportations en Asie, Russie et pays islamiques, notamment ceux du Golfe. «Une norme Halal Smiic pour ces produits vient d'être adoptée par l'Innorpi en tant que norme tunisienne. Un référentiel de certification des produits cosmétiques Halal est en cours d'élaboration en partenariat avec Diwan Al Ifta. Il permettra de garantir le caractère halal du produit, depuis sa provenance jusqu'à son emballage. La certification selon ce nouveau référentiel sera lancée, au cours du deuxième semestre de 2019, ce qui permettra aux entreprises tunisiennes exportatrices d'accéder sans difficulté aux marchés qui exigent ce type de normes et de saisir les opportunités présentées par ce créneau porteur», indique-t-elle. Comment se fait la certification ? L'Innorpi fournit un processus de certification crédible et accepté dans les pays de l'Organisation de coopération islamique (OIC).Nahla Rachico, sous-directrice de la certification des systèmes de management et de services à l'Innorpi, indique que l'institut planche sur la mise en place d'un schéma de labellisation Halal des entreprises tunisiennes exportatrices de ce type de produits. D'après la responsable, cette certification renforce l'image de marque de l'entreprise auprès des clients qui sont à la recherche de produits Halal et offre un avantage concurrentiel de taille pour les fabricants qui peuvent faire valoir le label dans les actions marketing ciblant aussi bien les musulmans que les non musulmans. Les processus d'octroi du label Halal par l'Innorpi sont simples. Le candidat doit fournir à l'Innorpi des renseignements et informations nécessaires (listes des ingrédients utilisés, diagramme de fabrication…). L'audit de l'unité de production se fait par une équipe d'auditeurs Innorpi qualifiés et un expert dans les affaires islamiques reconnu par Diwan Al Ifta. Ensuite, en fonction de la nature du produit, un prélèvement se fait par l'équipe d'audit d'échantillons pour analyse dans un laboratoire agréé. Une fois ces tâches finalisées, l'Innorpi octroie le label Halal suite à l'examen du rapport d'évaluation par le comité de certification. Mais il est à noter que le droit d'usage du label est accordé pour une période de trois ans renouvelable et que le maintien de ce droit d'usage est tributaire des résultats des audits annuels de surveillance. Il est, également, à souligner que les frais de certification des produits Halal ainsi que les frais des analyses éventuels sont remboursables à hauteur de 70% par le Fonds de développement de la compétitivité (Fodec) ou de 50% par le Fonds de promotion des exportations (Foprodex). «Il n'est pas sans intérêt de rappeler que la certification Halal est un système de contrôle et de vérification réalisé par un organisme tierce partie, gage de produits et services sûrs à la consommation et bénéfiques pour la santé», affirme Rachico. M.KH.