Grand merci à Arthur Rimbaud, de m'avoir prêté le titre de l'un de ses poèmes pour la rubrique de ce jour! Les «chercheurs de poux» sont quelques-uns de nos universitaires — heureusement pas tous — qui grognent encore contre la presse écrite et, notamment, la critique artistique qu'ils mettent sur le banc des accusés, chaque fois qu'ils se réunissent en conclave. D'un revers de la main, ils effacent tout ce qui a été fait depuis une quarantaine d'années, maintenant. D'avoir encouragé les arts plastiques et graphiques au même titre, que nous l'avons fait pour le livre, la musique, le 4e art, le cinéma; d'avoir favorisé l'épanouissement des artistes eux-mêmes, dont beaucoup sont partis miséreux, sans avoir eu la chance de participer à un véritable marché de l'art, sans avoir revu leurs propres œuvres dans un quelconque musée d'art contemporain, et, ou moderne, dans un milieu sans infrastructure requise… C'est le travail de la critique que l'on dit encore «impressionniste, arbitraire, qui ne reflète pas l'objectivité, la réalité des choses», ainsi que celui des galeries qui se comptaient sur les doigts de la main, il y a une vingtaine d'années et qui ont fait un travail remarquable dans la présence des arts en Tunisie. Et, c'est pourtant avec ces «matériaux»-là, matériaux mûrement arrachés à la lèpre du temps, mûrement amassés et triés sur le tas, que nos «chercheurs de poux» au lieu de les rationaliser à travers leurs «analyses plastiques de qualité» pour les rendre plus accessibles au grand public, renient en bloc, ce qu'ils appellent «les pratiques de l'art en Tunisie et leur réception». Ils mettent sur le banc des accusés la critique qui doit être argumentée et tenue de situer l'œuvre dans son contexte historique et esthétique comme si nous avions une histoire lointaine en ce domaine et une esthétique plusieurs fois remise en question à cause, ou grâce à des mouvements et des tendances qui auraient fait leurs riches heures!… Ce que l'on demande à nos universitaires, et beaucoup le font bien à travers les suppléments hebdomadaires de notre propre journal, c'est d'apporter leurs connaissances et leur savoir-faire sur le terrain. Trouver des solutions à toutes ces défaillances auxquelles nous-mêmes, depuis des décades, n'avons pu pallier. Avec le projet de la Cité de la culture et certaines orientations courageuses prises par le ministère de tutelle, orientations de partenariat dans le domaine privé, les choses iront mieux, je le pense. Nos jeunes journalistes, qui font dans la critique d'art actuellement (certains sont des diplômés des arts, d'autres viennent de l'Ipsi), ont acquis certaines connaissances de base sur l'art occidental, possèdent un jugement d'appréciation du point de vue esthétique, critique selon Diderot, Baudelaire, critique de la raison pure, celle de Kant, etc. Il faut seulement les aider à y voir plus clair dans ce maelstrom, où tout ou presque ira à sa déperdition, si on n'y prenait garde. Il faut leur apprendre surtout qui ont été nos artistes, ce qu'ils ont fait : des pionniers aux novateurs, sans parler de ce qu'il se passe actuellement. Et ça, c'est le travail de nos universitaires. Quant à la critique objective, dans le domaine de l'art, on peut cogiter là-dessus. Pour moi, elle n'existe pas, hormis bien sûr, en les connaissances élémentaires de base, à partir desquelles elle peut s'exprimer. Ce qui fait tout son charme encore, c'est le règne de la subjectivité dans laquelle elle se meut. Anatole France ne disait-il pas que «le bon critique d'art est celui qui raconte les aventures de son âme au milieu des chefs-d'œuvre» ! On peut toujours en discuter…