Encore une fois, Facebook crée l'événement. C'est grâce à ce réseau social que des milliers de manifestants ont débarqué, hier, devant le palais du gouvernement, à la Kasbah, pour entreprendre un sit-in ouvert jusqu'à la satisfaction de leurs revendications politiques. «Sit-in, sit-in jusqu'à la chute du gouvernement», «RCD dégage», «le RCD ne peut pas nous séparer» «Le peuple opte pour un régime parlementaire», «Le peuple exige une Assemblée constituante», «Revoir les structures de la Chambre des députés et de la Chambre des conseillers» et «Pour un paysage médiatique libre et ouvert», tels étaient les principaux slogans scandés par les protestataires. Comme l'observe Marouane Romdhani, étudiant et un des vingt membres du comité d'organisation de ce sit-in, les préparatifs ont démarré il y a quelques semaines durant lesquelles les administrateurs des différentes pages sur Facebook s'étaient chargés de diffuser l'information pour tenir au courant bon nombre d'internautes. «Cette fois-ci, il s'agit d'un sit-in organisé suite à une parfaite coordination entre les jeunes à travers le réseau social Facebook. La première caravane a débarqué, aujourd'hui, vers 11 heures devant le Théâtre municipal de Tunis, lieu de rencontre prévu pour toutes les caravanes. Sidi Bouzid, Gafsa, Nabeul, Le Kef et Kébili sont déjà représentés et l'on s'attend à davantage de caravanes du reste des gouvernorats. Là on est en train de préparer des tentes pour les abriter durant la période du sit-in, sachant que l'on a, également, constitué plusieurs comités d'hygiène, de santé, de restauration et défense. Ce dernier est chargé de sensibiliser le public présent sur les vrais objectifs de la révolution populaire du 14 janvier, pour l'éclairer, par la suite, quant aux revendications susceptibles d'assurer à la nation et au pays une saine transition politique et un lendemain meilleur», affirme notre interlocuteur. Des cris dans le style «dégage, dégage», «fidèles, fidèles au sang des martyrs», rythment les incessants va-et-vient des manifestants en majorité jeunes. «C'est une initiative spontanée et sans leader. Comme tout bon Tunisien attaché à sa patrie, je suis régulièrement l'actualité politique du pays. Je suis là aujourd'hui pour soutenir mes collègues et compatriotes assoiffés de liberté, de modernité, de justice et de démocratie. L'ancien régime nous a tant manipulés au nom de tous les mensonges qu'il inventait. Ce que l'on veut, actuellement, n'est autre que la souveraineté du peuple et la satisfaction de ses revendications raisonnables et légitimes», observe Marouane, membre du comité d'organisation du sit-in. Réforme radicale ou partielle, telle était la dialectique conduite par quelques groupuscules éparpillés parmi la foule. Mais au-delà de tout, l'objectif est le même «une Tunisie libre et démocratique capable de tourner une page noire de son histoire», selon les termes d'un médecin. Une ville dans la ville, c'est du moins ce dont on peut qualifier la Place du gouvernement hier. Pourtant c'était jusqu'ici un sit-in pacifique et sans violence aucune, sauf un léger affrontement survenu à l'arrivée des caravanes sur les lieux entre certains manifestants et les forces de l'ordre. Un affrontement qui a été rapidement résolu par les forces armées, comme cela nous a été rapporté par Marouane. Il faut reconnaître, du reste, que ce sit-in est l'œuvre des jeunes. Un avis partagé par les avocats rencontrés sur les lieux. «Seuls les jeunes sont maîtres de la situation, on ne fait que les suivre, on est là pour les accompagner, étant solidaires avec eux», a révélé un avocat ayant tenu à garder l'anonymat.