«Quand il s'agit du destin d'un peuple, aller au fond des choses, y aller sans arrière-pensée, c'est en réalité non seulement la meilleure politique, mais c'est la seule politique qui vaille en fin de compte». Charles de Gaulle Après le «Je vous ai compris» tout aussi gaullien, emprunté, la veille de sa fuite, par le président déchu dans sa tentative désespérée, parce que trop tardive, inopportune voire impertinente, d'apaisement des ardeurs révolutionnaires, voici une autre citation, du même homme, laquelle, cette fois-ci, incite à réfléchir donc à… comprendre, en temps utile. Cecla étant, le peuple tunisien, jeunesse en tête, s'est révolté. Il a chassé un président que l'on croyait «indécarthaginable» et neutralisé l'une des pires mafias que la Méditerranée ait jamais eu à connaître. Le tout au prix fort de plusieurs dizaines de martyrs et, au passage, de milliers d'actes de vandalisme commis à la faveur de la situation aussi confuse qu'incontrôlable que le pays a connue. Ce fut là, à mon sens, le côté purement symbolique de la Révolution de la liberté et de la dignité comme le fut la prise de la Bastille le 14 juillet 1789 à laquelle la monarchie a survécu jusqu'à l'avènement de la 1ère République française en 1792 et les sept ans de troubles et de guerres civiles qui l'avaient marquée, jusqu'en 1799. Aussi, l'histoire des révolutions nous enseigne-t-elle que les lendemains des symboliques déchues sont très difficiles à négocier, qu'à chaud, en ce qui nous concerne, le bon sens doit primer les passions, les revendications gagneraient, pour le moment, à être reportées et le compromis devra pouvoir relayer les positions arrêtées. Salut public oblige. En effet, s'agissant du destin du peuple tunisien, des générations futures, aller au fond des choses signifie, en premier lieu, tenir la Révolution à laquelle nous tenons tous et lui éviter tout effet boomerang si, par malheur, on lui faisait manquer ses objectifs. Les âmes martyres en seraient bien peinées. Mais, en définitive, aller au fond des choses cela impose d'aller, à l'unisson de l'évènement, jusqu'au bout de la logique révolutionnaire, afin de réussir pleinement mais progressivement l'assainissement tous azimuts de la situation du pays dévolutive de l'ancien régime, par l'éradication de toutes les causes de tous genres ayant fait que cette révolution eut lieu. Cependant, une telle tâche ne peut aboutir que dans un climat exempt d'arrière-pensées synonymes d'animosité, de cacophonie et de tentatives démagogiques de récupération, sachant que réforme et chienlit ne sauraient qu'être mutuellement exclusives. Elle exige, de la part du gouvernement provisoire, de faire rétablir, de toute urgence et de façon indéfectible, l'ordre et la sécurité publiques et, de la part des citoyens, de se remettre à l'ouvrage, chacun de son état, avec l'enthousiasme né des perspectives en un meilleur avenir. Ce ne sera qu'ainsi, qu'un commencement d'évolution positive de la situation puisse se dessiner et que le peuple soit en mesure d'assumer avec conviction et responsabilité sa Révolution, par l'expression libre de ses choix politiques, économiques, sociaux et autres. Manifestement, soit dit en passant, cela n'aura rien d'une promenade de santé en présence, notamment, de près de deux douzaines de partis politiques qui feraient craindre le trop-plein après que d'aucuns eurent, récemment, à redouter le vide politique. La paix civile rétablie et la reconstruction du pays amorcée, toute la priorité doit être accordée à l'action de doter la nation d'institutions politiques et juridiques dont la solidité, la clarté et l'adéquation aux aspirations populaires à la démocratie, aux libertés publiques et individuelles offriront le cadre de suprématie de la loi, l'utilité de tous et le refus à quiconque de se croire indispensable. Assez de la quasi-déification du genre humain. Disons-nous : jamais, plus jamais de combattant suprême ni d'artisan du changement et place au vrai combat pour le vrai changement, avec la contribution de tous et l'aide de Dieu. Pour le salut de la Révolution. H.B. * Universitaire, retraité du secteur privé