Avec le déclenchement de l'insurrection du peuple libyen contre son propre régime, quelques organisations humanitaires mondiales et des bénévoles tunisiens ont accouru à Ras Jedir pour la bonne gestion des flux migratoires vers la Tunisie, afin d'accueillir les dizaines de milliers de réfugiés égyptiens, bengalais, et asiatiques surtout, dans de bonnes conditions. Mais depuis que les combats entre les forces pro-Gueddafi et les insurgés se sont intensifiés au cours des derniers jours, ce fut au tour de familles libyennes de fuir les massacres et d'affluer en masse vers le point frontalier de Ras Jedir. Hier, 2.300 personnes ont franchi la frontière et plusieurs d'entre elles sont arrivées à pied, nous dit-on, accompagnées par des Egyptiens. Malgré cela, des fidèles au colonel étaient aux trousses de ces familles qui étaient prises pour des rebelles : l'insurgé ligoté a été sequestré dans la malle d'une voiture avant d'être libéré par des douaniers tunisiens, deux groupes de Libyens en sont venus aux mains pour avoir évoqué Gueddafi, le comportement provocateur du conducteur qui a franchi la frontière brandissant un drapeau vert et une photo du colonel, comme pour lancer un défi à ses concitoyens opposés au régime… Par ailleurs, nous avons appris de source digne de foi qu'un groupe de partisans du colonel s'est rendu à Ben Guerdane, vendredi soir, et a engagé un bon nombre d'habitants de cette ville pour qu'ils manifestent, samedi, à Ras Jedir, devant les caméras des médias étrangers en scandant des slogans en faveur de Gueddafi et en brandissant sa photo. En contre-partie, ils recevront 150 D chacun. Mais à la dernière minute, cette manifestation n'a pas eu lieu et a été reportée à plus tard… Tous ces agissements et bien d'autres n'ont pas laissé l'armée tunisienne indifférente. Pour calmer les esprits, elle a jugé bon d'accueillir les familles libyennes dans le camp d'Echoucha, probablement pour couper court à toute confrontation qui pourrait avoir lieu sur le territoire tunisien entre ceux qui sont pour et ceux qui sont contre Gueddafi. Seuls les blessés peuvent bénéficier d'une dérogation pour aller se faire soigner dans les hôpitaux tunisiens.