Par Khaled TEBOURBI On retrousse les manches à «la culture» en vue d'un second semestre 2010 exceptionnellement chargé. Enumérons : les centenaires de Jamoussi et de Bachir Khraïef, les festivals d'été, les rendez-vous de Ramadan et, gros morceau, les premières «journées musicales de Carthage». A coup sûr, une fin d'année prolifique, prometteuse et pour le public et pour la critique. Mais sans doute encore des paris de qualité à tenir. L'establishment est concerné, les artistes a fortiori. A propos de centenaires, il est bon de rappeler quelques enseignements utiles. Dont un surtout : que ce genre de célébration nécessite beaucoup plus que de la volonté et du cœur. Pas que de l'enthousiasme comme on l'a constaté pour Jouini, mais du boulot, un sérieux boulot de recherche et, au bout du travail, une vraie compilation, la meilleure sélection possible dans une œuvre qui a eu, certes, ses points forts, ses pics et ses pointes. Mais aussi bien (c'est vrai de tous les artistes) ses zones d'ombre, sinon ses flous et ses ratés . Que de fois en étreignant ce que l'on aime, omet-on d'en prendre soin. Avec Hédi Jouini, ce fut hélas le cas. Jouini fut un crooner sans pareil, et un mélodiste inspiré et prodigue. Malheureusement, quand est venu le moment du témoignage, personne, même ses proches, ne s'est véritablement soucié de la démonstration. Tout ce que l'on a réussi, au final, cela a été de ressasser ses succès les plus connus. Jusqu'à saturation. Pas d'inédits, d'«œuvres occultes», point d'archives qui eussent mérité l'attention. Même pas une rétrospective de presse, alors que Hédi Jouini a fait l'objet de centaines et centaines d'articles, ici et ailleurs. Le plus grave est qu'en lieu et place, sur un site web, on a eu droit à un tas d'informations douteuses. Pourquoi y revenir ? L'essentiel est que l'on aura compris qu'un centenaire est un acte de mémoire, d'histoire, non un «ardent exercice» d'apologie. On a parlé «d'étreinte qui fait mal», les précipitations, les exagérations sommaires, le trop-plein d'éloges posthumes conduisent souvent à fausser l'image de ceux que l'on entend commémorer. Au résultat contraire pour tout dire. Hédi Jouini en a pâti, Tâchons d'en tirer les leçons à l'occasion du centenaire de Mohamed Jamoussi. L'homme nous a légué des musiques et des écrits. Plus : des documents ciné et télé. Beaucoup d'entretiens de presse et de radio aussi. Tout un labeur auquel il faudra faire face avec honnêteté et discernement, de manière à communiquer le meilleur du poète, du chanteur-compositeur, de l'acteur et du présentateur. Bref : rien que ce qui l'élève et le pérennise à nos yeux. Pas plus, attention ! JMC : contenu et vocation Réussir l'entame des «Journées musicales de Carthage», voilà qui donne également à se faire du souci. Les JMC remplacent définitivement les festivals de la chanson et de la musique. C'est déjà un défi. On passe d'un événement «linéaire», «populaire» à une manifestation pluridisciplinaire, peut-être élitaire. Se posera un problème de contenu. S'il y a avantage à quitter un certain «folklore» de la chanson, la difficulté, désormais, sera de parvenir à mettre en exergue tout le potentiel et toute la diversité de notre musique. Mieux : les Journées musicales autant que les JCC et les JTC devront, d'emblée, montrer leur vocation régionale et internationale. Elles devront refléter toutes nos racines culturelles: arabes, africaines, méditerranéenes, pourquoi pas mondiales. Ce sera sans doute un peu tôt pour la première session, mais dès la prochaine, il n'y aura pas d'autre alternative que d'aller de l'avant. Un mot, pour finir, à l'adresse des artistes musiciens : qu'ils se mettent d'ores et déjà à la tâche. Une cité de la culture est sur le point de leur ouvrir ses portes. Des journées musicales leur proposent un grand choix de création. Tout n'est pas résolu, soit, mais qui sait, la dynamique ainsi lancée peut favoriser bien des solutions. Courage messieurs!