Par Abdelhamid Gmati Selon l'Indice du bonheur mondial (IBM) établi par Globeco, les Tunisiens seraient les plus heureux en Afrique du Nord, se classant à la 34e position. Les plus heureux seraient la Suède, la Norvège et le Danemark. Cela fait du bien à notre amour-propre national. Mais si l'on observe ce qui se passe depuis quelque temps, une fois l'euphorie de la révolution apaisée, on est quelque peu perplexes. Où est donc ce bonheur ? Dans les sabotages, les grèves, les sit-in, l'économie en difficulté, le tourisme aux abois, la fermeture d'entreprises, l'aggravation du chômage, les incendies volontaires…? En fait, nous en vivons des «vertes et des pas mûres», étant entendu que le terme «vertes» varie signifiant, parfois, des plaisanteries, des choses agréables et, d'autres fois, des actes ou des propos désagréables, choquants ou excessifs. On relève alors des «premières». - Celle d'un citoyen qui a déposé une plainte exigeant que le président de la République, Fouad Mebazaâ, le Premier ministre Béji Caïd Essebsi et Lazhar Karoui Chebbi, ministre de la Justice, soient soumis à un examen médical pour vérifier si leurs aptitudes physiques et mentales leur permettent de diriger convenablement les affaires de la Tunisie. Du jamais vu. Le Tribunal de première instance de Tunis a rejeté cette semaine la plainte et débouté le plaignant. - Celle du chargé du contentieux de l'Etat qui a déposé officiellement une plainte contre Mohamed Ghannouchi, l'ancien Premier ministre tunisien, en sa qualité de président de la Commission d'assainissement et de restructuration des entreprises à participation publique (Carepp). Cette commission est officiellement chargée, entre autres, de la privatisation des entreprises publiques et de toutes les participations de l'Etat. La plainte vise à jeter la lumière sur les opérations de privatisation d'entreprises publiques, opérées sous le régime Ben Ali, et validées par la Carepp. A suivre. - Celle du Premier ministre du gouvernement de transition, qui avait quelque peu malmené le micro de la journaliste de la télévision nationale et qui a déclaré à une radio tunisienne : «Peut-être que ma réaction a été un peu dure et que je n'aurais pas dû me comporter de la sorte». Une façon de s'excuser ; du jamais vu. Et il a annoncé «que les journalistes sont appelés à porter des tenues spéciales avec un insigne de journaliste, afin de ne pas les confondre avec les protestataires, dans les manifestations et les sit-in, et pour qu'ils ne soient pas agressés, en cas d'affrontements». Espérons que cela sera suffisant pour éviter les agressions contre nos confrères. - Celle du même Premier ministre qui a lancé un appel «au secours, la patrie est en danger». Là il ne s'agissait plus de dénoncer des abus de la foule mais de partis et de forces «occultes» qui planifient le sabotage des élections du 23 octobre. On n'a jamais vu cela chez nous : un haut responsable appelant «au secours» toute la population. - Celle de dix partis appelant à une marche ce jeudi 21 juillet pour la démocratie et le succès de la transition démocratique. Cette marche aura lieu à partir de 13 heures depuis la Place de la République (Le Passage) et ira jusqu'à la Place Pasteur via l'avenue de la Liberté à Tunis. Les partis organisateurs de cette marche sont le Fdtl (Ettakatol), le Parti démocratique progressiste, Ettajdid, Afek Tounès, Al Wifak Al Joumhouri, le Parti socialiste de gauche, La voie du centre, le Mouvement de la citoyenneté et de la justice, le Pôle démocratique moderniste, le Parti du travail tunisien…Un engagement à saluer. Il reste à souhaiter que tout se passe bien. - Celle de l'opération Madrassati visant à reconstruire et à réparer les dégâts subis par plusieurs écoles à travers le pays. Des dons d'une valeur de 726.000 dinars ont été collectés, alors que les dégâts subis par les écoles sont évalués à 17 millions de dinars. Peut-être faudra-t-il reprendre la collecte ? - Celles des nouvelles chaînes de télévision ; après les 12 radios qui ont obtenu des autorisations de diffusion, ce sont 5 nouvelles chaînes télévisées qui diffuseront prochainement. Ce seront des chaînes à thèmes (éducation, régionale, religieuse, sportive). - Celle de la candidature de M. Larbi Nasra, patron de la chaîne «Hannibal», proposée par des citoyens du gouvernorat de Jendouba. Lui, n'y est pour rien si les gens pensent qu'il peut être «le sauveur» (slogan scandé par la foule). - Celle de la libération des 5 salafistes arrêtés pour avoir agressé des avocats devant le Palais de Justice mardi après-midi 19 juillet 2011 et des personnes arrêtées lors de Kasbah 3 qui ont été toutes libérées. Sans commentaire. Au fond, l'Indice du bonheur mondial n'a peut-être pas tort : les Tunisiens ont des raisons de s'amuser et d'être heureux.