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Sfax : la nécessaire rupture avec un passé désavantageux
Opinions


Par Abderrazak BEN AMAR(*)
Dans les années 80 du siècle dernier, on a programmé aux élèves de 4e ou de 5e année secondaire (ancien régime) l'étude d'un texte de français qui s'intitulait «Fès blessé au cœur», mais qui a été vite retiré du manuel. L'état actuel de la ville de Sfax me rappelle ce texte qui présentait la médina de Fès comme une ville trahie par ses citoyens car son architecture et son artisanat ont subi de mauvaises atteintes, ce qui a causé la dépréciation de cette ville symbole de la civilisation musulmane au Maghreb.
Ce n'est pas de la démesure, si on dit aujourd'hui qu'aussi bien la médina de Sfax que sa ville moderne «Bab El Bhar» ont toutes les deux été sacrifiées suite à des facteurs économiques et politiques. En effet, la volonté politique nationale, mais aussi le laxisme des responsables locaux sont à l'origine de la négligence de la ville et surtout de la détérioration de la qualité de la vie. Sfax a donc un passé désavantageux, sinon elle aurait été plus propre, plus saine d'atmosphère, plus gaie, plus attrayante et plus en harmonie avec ses deux composantes‑: la médina et Bab El Bahr qui se sont tous les deux défavorablement métamorphosés.
I - La médina de Sfax
1) Une malheureuse destinée‑:
Si les rares médinas du Maghreb ou du monde arabe ont évité la dénaturation, c'est grâce à la détermination des décideurs de maintenir le rôle qu'elles jouent dans l'économie en veillant sur leurs activités initiales. Donc, il s'agit de les intégrer dans le circuit économique en encourageant l'écoulement de leurs produits artisanaux par la consommation locale et par l'ouverture de marchés extérieurs. Pour ce qui est de Sfax, la médina aurait elle aussi gardé ses activités initiales‑: la tannerie et le cuir, l'orfèvrerie, l'argenterie, la ferronnerie, le tissage… On y ajoute d'autres activités de services ou de gestion administrative propre aux métiers et aux affaires qui y sont gérés‑: les notaires et les vérificateurs des poids et mesures de carats dans le commerce de la joaillerie.
Tout ce monde est généralement régi par le bon sens et par une éthique rituelle. Donc Sfax aurait gardé ces activités si elles n'étaient pas supplantées par ces boutiques de prêt-à-porter ou d'électronique et de nouvelles technologies (plutôt du faux). La médina s'est métamorphosée et est entrée dans un nouveau mode de vie et dans de nouveaux choix qui ne respectent ni les structures professionnelles ni l'architecture arabo-musulmane. Tout a été bousculé à cause de ces deux principaux facteurs.
1) La cupidité et l'évolution de l'activité commerciale‑:
Il y a d'abord le changement du mode de vie vestimentaire dont la production locale et étrangère accélérée et à des prix compétitifs a envahi tous les marchés. Grâce à ce commerce on gagne beaucoup et vite. La petite boutique qui vendait jebbas et chéchias se transforme en espace de prêt-à-porter. La porte cloutée en bois est remplacée par une autre vitrée en aluminium et pour «égayer» l'ambiance, on laisse libre cours au bruit assourdissant des chants occidentaux dignes des music-halls européens. C'est l'autre aspect de la mondialisation‑! Mais on mettait n'importe quoi sans goût et sans valeur pourvu que ce soit de la musique‑! Ou plutôt de la pollution sonore qui dérange le flâneur distrait.
2) L'inconscience de la nécessité de la protection de la médina en tant que patrimoine‑:
Du moment qu'elle ne rapporte plus, la médina n'a plus de valeur. Rares sont ceux qui aujourd'hui peuvent admirer son artisanat et son architecture. Pire, le travail manuel est déprécié et l'Etat n'a pas su prendre les mesures adéquates pour le réhabiliter et pour prendre en charge les artisans qui endurent des déboires, étant privés de gains respectables. Ces facteurs et tant d'autres expliquent l'état actuel désastreux de la médina. Plus de charme‑! Plus de cachet architectural typique‑! De la laideur partout‑! Les façades originales sont masquées. Des tas de détritus traînent partout. Les égouts sont obstrués par l'accumulation des ordures qui ont donné au sol un nouveau revêtement. Des vendeurs itinérants pullulent partout en exposant leurs camelotes aux pauvres acheteurs non avertis. Et les autres ceux des boutiques qui s'alignent dehors à la recherche de clients en utilisant des manières incommodes et insistantes en mettant ainsi les passants dans des situations embarrassantes.
Tout est bousculé, la place Bab Diwan est devenue un grand parking et un abri aux nombreuses tentes de vendeurs dont les mouvements créent une anarchie et un charivari difficile à supporter.
Ce phénomène d'irresponsabilité et de désordre existait bien avant la révolution mais malheureusement il s'accentue ces derniers temps. N'a-t-on pas gratuitement incendié des palmiers du jardin longeant la façade sud du rempart de la Médina ?
II - La ville moderne ou Bab El Bhar
Le même sort maléfique n'a pas épargné Bab El Bhar qui endure depuis des années la négligence révoltante et l'indifférence des responsables quant à la dégradation de son patrimoine architectural digne des grandes villes du Maghreb. L'étude des trois volets suivants vont apporter plus d'éclaircissements sur cette situation : l'évolution défectueuse de la ville — le problème de la propreté — l'environnement et la qualité de la vie.
1) L'évolution défectueuse de la ville :
Au milieu des années 80 du siècle dernier, on a assisté à l'émergence d'une nouvelle agglomération urbaine connue sous le nom de Sfax El Jadida. C'était un grand projet administratif, commercial et résidentiel et c'était également une très bonne affaire de spéculation foncière. D'ailleurs, le béton sévit jusqu'à nos jours parce qu'il a tout envahi. Les plans d'aménagement initiaux sont rectifiés pour laisser libre cours à la cupidité des prédateurs de terre qui raflent tout y compris les espaces prévus zones vertes. Par conséquent, nous assistons à l'apparition d'un paysage inhumainement urbanisé.
D'autre part, l'observateur perspicace qui se promène à Sfax El Jadida constate l'existence du chiffre 7 sur les façades de nombreux immeubles et se rend compte que la dictature déchue et ses représentants locaux ont exigé aux promoteurs de graver le chiffre 7 sur les façades de leurs constructions : un esprit mesquin mais aussi un caractère propre à tous les régimes dictatoriaux de croire qu'ils resteront éternellement au pouvoir ! Mais voilà que la révolution de la jeunesse tunisienne a su comment la déloger et clore ce sombre épisode et cette fois-ci la date du 14 janvier 2011 est gravée spontanément dans les cœurs et les mémoires de tous les Tunisiens. En outre , notons que cette extension avait entraîné le transfert des plus importantes administrations de Bab El Bhar à Sfax El Jadida. Les anciens locaux (l'immeuble abritant le gouvernorat de Sfax près de la gare, une recette des finances près de Monoprix, le local des services de télécommunications rue Habib Bourguiba…) sont vides depuis à peu près 1994.
Ces constructions et bien d'autres appartenant à des particuliers (surtout dans l'avenue Hédi Chaker) habitées ou non sont actuellement dans un état de vétusté et de négligence révoltantes. Or presque toutes se caractérisent par une belle architecture authentique ressemblant au cachet architectural de Tunis. L'actuel conseil municipal de Sfax faisant fonction du mandat spécial et nommé en vertu du décret n°654 du 9 juin 2011 devrait les répertorier et fixer des délais de retapage, de rénovation ou encore de démolition, s'il le faut, et ériger d'autres à leur place en respectant l'architecture initiale.
La ville moderne de Sfax est très belle. Elle mérite d'être réhabilitée. Si les deux gouvernements précédents lui ont vraiment porté préjudice, la révolution devra remettre les choses en ordre. C'est une opportunité pour cette ville qui a beaucoup donné pour l'indépendance du pays et pour la révolution. Nul ne peut ignorer les manifestations populaires et les sit-in qui ont magnifiquement contribué à la chute de la dictature et des deux gouvernements de Mohamed Ghannouchi.
Il faudrait encore que les habitants soient investis dans ce projet avec une attitude plus agissante et un esprit, je dirais, partisan ! Oui pourquoi pas ? quand il s'agit de l'amour de sa ville. Oui c'est à partir de l'amour de sa localité, de sa ville ou de sa région qu'est généré l'amour de la patrie. Agir avec désintéressement pour le Bien de tous et rompre avec un passé qui a jeté les uns dans l'apathie et le laxisme et les autres dans la corruption et les intérêts personnels.
2) La propreté de la ville:
Malheureusement, la propreté fait défaut dans la ville de Sfax, et ce, depuis des années. On en parle, mais on ne fait rien. C'est comme si c'était une fatalité ! Un sortilège ! Les causes ? Il y a d'abord la responsabilité politique nationale et locale, les équipe du conseil municipal qui se sont succédé dans le passé et n'ont fait de travail municipal qu'occasionnellement, préférant plutôt louer la politique de l'ancien régime. Mais il y a également nos mauvais réflexes, notre culture ne respecte pas les espaces communs. On nous a appris à ne s'occuper que de chez soi. Nous sommes tous appelés à remettre en question ce mauvais héritage, à exercer notre citoyenneté avec responsabilité en redonnant de la valeur au noble travail municipal. Participer tous à la naissance d'une nouvelle génération. Toutes les parties concernées s'y investiront avec abnégation : la municipalité, les composantes de la société civile et les partis politiques devraient intervenir auprès des citoyens et feraient de la qualité de la vie un point permanent dans leur ordre du jour. Le droit à un environnement sain est aujourd'hui une exigence non moins importante que les autres. Il est indissociable de la dignité : valeur que les Tunisiens ont revendiquée pendant la révolution.
Il est malheureux d'accepter aujourd'hui l'état de l'ancien port de pêche aménagé en un lieu attractif de loisir, mais qui est plutôt un désastre qui interpelle le promeneur en quête de détente car on y voit une redoutable atteinte au milieu marin puisqu'on y jette des bouteilles en plastique, des sachets, des ordures ménagères, des canettes….
On ne veut plus aussi voir dans certains coins des rues de la ville ces conteneurs d'ordures cassés, enduits de crasse, nauséabonds et polluant l'air et la terre. Les éboueurs ne disposant que de moyens rudimentaires, ne peuvent pas tout ramasser. Aussitôt après qu'ils passent, on constate des déchets répandus sur le sol. Des tas de gravats peuvent rester des mois avant d'être maladroitement évacués. Des herbes spontanées poussent dans les interstices des trottoirs et offrent un aspect désertique aux rues. Le même sort est jeté sur le seul jardin du centre de la ville, juste derrière la municipalité ! Ces exemples et tant d'autres donnent un aspect morose à la ville. Le nouveau conseil municipal devrait revoir la gestion des affaires de la ville relevant de ses attributions, ils fixerait ainsi une stratégie relative à la propreté en innovant aussi bien les nouvelles techniques que la conception du travail. Que nos vœux soient exaucés !
3) Environnement et qualité de la vie :
Sfax est une grande ville économique. Des centaines de sociétés industrielles sont installées sur une trentaine de kilomètres du littoral. Outre la Siape située au Sud du littoral, nous avons une concentration d'autres usines non moins polluantes sur le littoral nord, précisément au niveau de la zone «La Poudrière». Ces usines, il faut le dire, n'ont aucune politique de gestion de leurs déchets en les jetant n'importe où sans se soucier de l'atteinte qu'on fait subir au milieu marin, aérien et terrestre. Donc, il s'agit d'une exploitation anarchique de la nature sans consacrer un budget pour se débarrasser selon les normes de ces détritus et surtout des restes toxiques. On retrouve ce comportement irresponsable aussi bien chez le citoyen ordinaire que chez l'industriel et le responsable politique. Donc aucune sensibilisation sur le développement durable et sur la stratégie de préserver un environnement sain aux générations futures. C'est ainsi que Sfax est devenue une ville notoirement polluée et c'est pour ces raisons que les plages «Hachad» et «La Natation» avaient été perdues à jamais à cause de la NPK (vieille raffinerie de phosphate).
C'était une véritable catastrophe écologique car on se rappelle encore la couleur jaune de l'eau de mer écumeuse et les montagnes de phosphogypse.
Avec le projet Taparura, on cherchait une solution pour oublier ce passé douloureux. On répétait sans cesse qu'on voulait une réconciliation de Sfax avec son environnement. Mais il y a d'autres motivations, car il s'agit de la création d'un mégacentre urbain comportant un complexe résidentiel, des activités de services, des moyens de loisirs, des hôtels mais aussi des espaces verts pour une éventuelle animation touristique. A l'instar de l'ouverture de la ville dans le passé avec le projet Sfax El Jadida cette fois-ci, le choix est porté sur le littoral nord pour en faire aussi une bonne occasion de spéculation foncière puisqu'on a prévu l'aménagement de 400 hectares. Le projet est inachevé. C'est une solution boiteuse parce que sa réussite n'est possible que par le transfert de la Siape en tant que cause de pollution dont les effets sont ressentis jusqu'au littoral nord par le dégagement par ses usines de la fumée et des déchets chimiques liquides et solides qui affectent le milieu écologique.
Il est inconcevable qu'on ait cherché des extensions par deux projets grandioses sans réhabiliter Bab El Bhar, point névralgique de la ville. Les grandes mégapoles du monde se sont formées à partir du noyau urbain qui est protégé et continuellement sauvegardé parce qu'il symbolise l'Histoire et la Mémoire des habitants de la ville.


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