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La Constituante : pour une gouvernance efficace
Publié dans La Presse de Tunisie le 22 - 10 - 2011


Par Hédi BELGHITH
La Révolution a permis à tous les Tunisiens de relever la tête et de recouvrer leur dignité. Elle a permis à plusieurs d'entre nous de renaître, de reprendre espoir et de croire en l'avenir. C'était l'œuvre de tout le peuple tunisien, et il y a désigné ses priorités d'une manière on ne peut plus claire. Il s'agit de la dignité, de l'emploi et de la lutte contre la corruption.
Depuis le 14 janvier, notre pays a fonctionné tant bien que mal. Mais il a fonctionné. La Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique est globalement une réussite et un indicateur positif pour le bon déroulement des étapes à venir, dont l'élection de la Constituante.
Le 24 janvier, avec l'aide de Dieu, nous aurons notre Constituante, n'en déplaise à ses détracteurs. Ce sera la consécration de cette traversée miraculeuse du désert et le départ de l'étape suivante.
Depuis la Révolution, une pléthore de partis et d'associations a vu le jour. C'est tout à fait naturel et tout le monde est d'accord là-dessus. Cela va se décanter avec le temps et déjà, un premier criblage se fera à l'occasion de la Constituante, qui, compte tenu du système électoral adopté, sera probablement une mosaïque de sensibilités. Des regroupements ont déjà eu lieu, d'autres se préparent et une majorité se dégagera pour diriger directement ou indirectement le pays, pendant la durée de la Constituante, que nous espérons tous être la plus réduite possible.
Pour aborder les élections de la Constituante, la plupart des partis se sont préparés, plus ou moins bien, certes, mais il y a eu réflexion et débat, en un temps réduit. Ils ont fait des choix de société, des choix politiques, économiques, etc. Ils ont promis des réalisations, des réformes ... Tout ne pourra être réalisé qu'à moyen ou long terme. Comment se feront alors les choix ?
Si deux ou trois modèles de sociétés émergent, la comparaison des propositions économiques et sociales des divers partis, regroupements de partis ou listes indépendantes, à sensibilité démocratique, montre une assez forte similitude entre elles. Ces propositions sont souvent présentées par secteur d'activité ou par région et ne se réfèrent aux revendications de la Révolution qu'indirectement.
La probabilité est donc grande pour que chaque groupe de constitutionnalistes défende ses propres choix et en définitive, la décision risque d'être celle d'une majorité, sans doute simple, et qui peut ne pas être la meilleure pour le pays, car résultant de compromis politiques.
Mon propos consiste ici à proposer une approche méthodologique pour la prise de décision afin d'éviter à la fois les précipitations et les débats qui s'éternisent.
Pour un système d'auto-arbitrage des choix économiques
La Constituante aura pour objectif d'organiser les élections de la première assemblée du peuple de la deuxième République, de légiférer, d'écrire et d'adopter la nouvelle Constitution, de choisir un président et un gouvernement intérimaire mais aussi de voter la Loi de finances de 2012, qui sera sa toute première activité.
Il est évident que les activités permettant de doter notre pays de la légitimité constitutionnelle, revêtent une importance fondamentale et doivent être privilégiées. Pourtant, la Loi de finances 2012 qui, selon cette échelle des priorités, peut paraître secondaire, est très importante sur le plan économique, car, l'économie du pays doit démarrer normalement début janvier 2012.
Or, comme je viens de l'exposer plus haut, des coalitions peuvent s'organiser sur des bases politiques en rapport avec des dispositions de la Constitution ou avec la composition du futur gouvernement, mais pas au vu des choix économiques. La Loi de finances risque donc de faire l'objet de débats interminables, chacun voulant faire passer ses priorités.
Pour éviter cela ou du moins le limiter, je voudrais faire deux propositions. La première, consiste à voter la Loi de finances telle que préparée par l'administration et de procéder par loi de finances, complémentaire.
La deuxième, consiste à mettre en place un système objectif de critères qui permet de classer les projets selon leurs priorités, en vue de la Loi de finances complémentaire ou de toute autre législation.
Ce système, une fois adopté, constituera un précieux système de gouvernance de la Constituante.
La légitimité révolutionnaireplacée en tête des critères
du système à mettre en place
Certes, les constitutionnalistes seront élus par le peuple et leur légitimité ne saurait souffrir d'aucun vice. Mais, il me semble que la Révolution, fondement de toutes les légitimités, doit primer car elle a fait l'unanimité du peuple.
Si cela est admis, le reste est relativement facile à envisager, puisque, faire arbitrer la légitimité révolutionnaire équivaut à mettre en tête des priorités et des choix, ses principales revendications, à savoir, la dignité, l'emploi et la lutte contre la corruption.
Si en plus, la Constituante décide de rompre avec le système classique de planification pour adopter celui de la planification par objectifs, on aura gagné à mettre en place un système rationnel d'arbitrage.
La planification par objectifs consiste à partir des problèmes à résoudre, pour en déduire des objectifs et des résultats attendus, permettant d'identifier les activités (c'est-à-dire les projets) à même d'atteindre les objectifs et de concrétiser les résultats. Commencer par poser et adopter le problème à résoudre est un processus très important. Le débat relatif à la solution permettant de le résoudre peut ne pas faire l'unanimité. Mais avec un problème bien posé et des résultats attendus concrets, le système d'évaluation est tout trouvé. N'est-ce pas cela la démocratie ?
Pour la Tunisie, les problèmes à résoudre sont ceux définis par la révolution : dignité, emploi, lutte contre la corruption.
Aussi, les objectifs fondamentaux pour la Constituante seraient :
Mise en place d'un programme permettant de rendre la dignité du citoyen un fait concret et réel.
Mise en place d'un processus permettant de résorber le chômage, dans un délai raisonnable.
Mise en œuvre des moyens nécessaires pour lutter concrètement contre la corruption
Mise en œuvre des moyens nécessaires pour que l'Etat honore ses engagements.
Je donnerai quelques exemples pour montrer comment, à partir de ces objectifs, il est possible de concevoir un programme de gouvernement.
Rendre sa dignité au citoyen
Pour réaliser cet objectif, il faut commencer par identifier tous les aspects en rapport avec la dignité. Je me contenterai de trois aspects. Pour les autres, il suffit de puiser dans les propositions des divers partis :
Il faut que disparaisse du lexique administratif le vocable «Revenez demain»!
Tout citoyen doit pouvoir se soigner avec un déplacement minimum.
Tout citoyen doit pouvoir accéder au réseau routier et se déplacer facilement
Chacun de ces trois sous-objectifs est un programme économique. Le premier engage une réforme administrative de fond ; le second engage la réforme de la carte sanitaire et le troisième engage la question du transport et de l'infrastructure. Le système de sous-objectif pourra être détaillé d'une manière arborescente pour intégrer les régions, les services sanitaires concernés, les pistes agricoles etc.
Les projets seront classés selon l'importance de leur impact sur la population : le projet qui touche plus de personnes aura la priorité.
Amorcer le processus de résolution du problème du chômage
Le problème de l'emploi a, me semble-t-il, été éludé par les partis. A ma connaissance, la comparaison a porté plutôt sur le nombre de créations d'emploi par an, c'est-à-dire, surtout des emplois salariés. Or, il faut admettre qu'une entreprise économique ne peut pas recruter des personnes sans qualification ou dont la qualification est à parfaire (sauf si cette action est prise en charge par l'Etat). Nous devons préserver l'équilibre de nos entreprises publiques ou privées et éviter le leur faire jouer un rôle social.
Si on suppose que les emplois salariés sont grosso modo satisfaits directement par des nouveaux sortants du système national de qualification, le problème de la résorption du stock de chômeurs et de la portion des nouveaux diplômés qui vient augmenter ce stock reste posé en entier.
Ainsi, résoudre le problème du chômage passe par la réalisation de deux objectifs essentiels :
– Résorber le stock des chômeurs
– Maîtriser le flux des nouveaux diplômés.
Certes, ce stock est le résultat d'une accumulation de plusieurs années et ne saurait être résorbé qu'à moyen voire à long terme. Proposer le contraire, c'est mentir.
Ce stock est constitué par divers diplômés (en lettres, droit, gestion...), de jeunes et moins jeunes etc., et il faut admettre qu'ils sont impossibles à placer en l'état.
D'un autre côté, la structure de l'économie absorbe difficilement plus de 80000 salariés. Ce qui correspond arithmétiquement au nombre des nouveaux diplômés. Sauf si l'Etat incite des investisseurs étrangers à créer de très grands projets de 50 000 travailleurs et plus et prend en charge les frais de requalification des personnes à recruter.
Mais les choses étant ce qu'elles sont, il faut aujourd'hui convaincre les demandeurs d'emplois et les amener à envisager de se mettre à leur compte propre, soit pour créer une source de revenu, soit pour monter une micro-entreprise. Tous les projets pouvant aider à réaliser cet objectif, doivent bénéficier d'une priorité absolue et en particulier :
- La prise en charge par l'Etat des frais d'adaptation, requalification, formation complémentaire des promoteurs.
- La prise en charge par l'Etat des frais de suivi et d'accompagnement pendant cinq ans.
- La mise en place avec le soutien de l'Etat d'une intendance spécifique, selon les régions : sociétés ou/et coopératives de commercialisation ou/et d'approvisionnement en intrants ...
- Le bénéfice du promoteur de certaines régions, d'une discrimination positive lui permettant de vendre sa production de gré à gré et en dérogation des dispositions de la réglementation en vigueur, aux donneurs d'ordres publics (caserne, restaurants universitaire, cantines etc.) et cela pendant les cinq premières années de vie de son affaire.
– Le «rapprochement» des régions de l'intérieur des grands marchés des villes côtières, de la Lybie, de l'Algérie. D'où un vaste programme de construction ou de réhabilitation de routes, d'autoroutes, de voies ferrées, etc.
– La promotion par l'Etat d'au moins un grand projet structurant par région (exemples : faire passer la ligne de chemin de fer à grande vitesse Ras jdir – Tabarka – Algérie, entre Kasserine et Sidi Bouzid, de manière à la rapprocher de la frontière algérienne; créer une station dédiée au tourisme de montagne autour du Chambi... .
– Donner la priorité, en règle générale, à tout autre investissement pouvant contribuer le plus au développement de l'entrepreneuriat :
– Repenser les mécanismes d'incitation à la création d'emplois indépendants.
– Développer les activités de loisirs, pour retenir les jeunes dans leurs régions.
– Initier des programmes culturels et d'information pour agir sur les mentalités, valoriser l'entrepreneur, les petits métiers et lutter contre les archétypes sociaux louant les grands métiers (médecin, ingénieur, ...) et les identifiants à la réussite sociale.
– Stimuler la création de petits projets d'essaimage ou de sous-traitance par les entreprises publiques et privées.
– etc.
Pour la maîtrise des flux
– Réformer le système national d'éducation et de qualification (Education Nationale – Formation Professionnelle – Enseignement Supérieur), pour arrêter la « fabrication » de chômeurs et mieux répondre aux besoins de l'économie en qualifications.
– Assurer un bon taux de croissance de l'économie,
– Inciter les investissements privés et les IDE et notamment les gros projets.
Il est de la plus haute importance que la réforme du système national d'Education et de qualification soit orientée emploi et globale et non chaque composante à part.
Lutter contre la corruption
La corruption est un système qui fonctionne d'une manière relativement rationnelle. Quel que soit le bien ou service recherché à travers une opération de malversation, elle s'opère dans un environnement préparé et bien rodé. On commence par éliminer les compétences (quitte à leur assurer une promotion ou un limogeage par le haut), puis à mettre en place les ‘Hommes' capables de faire fonctionner le système et à les habituer à exécuter les instructions verbales. Le patron voleur et corrompu reçoit une proposition écrite de son valet reprenant le contenu de ses instructions verbales, devenues préoccupation de service. Il se montrera au début réticent, demandera des justifications et fini par donner son accord. Le service exécute la requête et selon le cas, le patron corrompu récolte le bénéfice : s'il s'agit d'un bien, il est livré à titre privé, et le service l'affecte formellement «à l'un des siens» qui signe le bon de réception et le tour est joué. S'il s'agit d'un achat chez un parent ou un proche du patron corrompu, on lui fait une demande de prix et on le charge, pour être conforme à la règlementation d'en procurer deux autres chez des concurrents « amis » etc. Le contrôleur de l'Etat, à partir du moment où il approuve le dossier, devient dans ce cas, une couverture.
Ni la réglementation, ni la loi, ni le système de contrôle ne permettent d'éviter ce phénomène. Il est même connu que pour « voler » tranquillement, il faut respecter scrupuleusement la réglementation, les procédures et faire exactement ce que demandent les contrôleurs.
La solution ne consiste pas à créer une nouvelle structure de contrôle ou de lutte contre la fraude. Elle repose en partie sue le facteur humain et en partie sur l'organisation et le contrôle interne :
– Valoriser la fonction achat, favoriser les compétences, les responsabiliser, les former, leur permettre de prendre des initiatives et encourager la rationalisation de l'utilisation des moyens publics.
– Envisager la création d'une centrale d'achats publics (à l'instar de ce qui existe dans certains pays européens), ce qui est de nature à réduire le nombre d'intervenants (donc de voleurs ou de complices de voleurs) et surtout de favoriser l'émergence de professionnel de l'achat de haut niveau. Elle fournirait les différents établissements publics (écoles, lycées, universités, hôpitaux ...) et leur permet de se consacrer au cœur de leur métier).
– Pour ce qui est des aspects institutionnels, organisationnels et réglementaires, il faut revoir les règles de contrôle interne et veiller au principe de la contradiction qui consiste à recevoir l'information de sources différentes (cela revient aussi à éviter que la fonction achat soit sous l'autorité de l'utilisateur ou sous celle du financier ...)
En définitive, la lutte contre la corruption devrait représenter une préoccupation permanente de la Constituante : veiller à séparer et à responsabiliser, devant la loi, les responsables des achats, de la réception et de l'utilisation (ou exploitation) de tout bien ou service acheté, pour chaque projet.


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