Faut-il se soucier des dernières fluctuations des marchés, notamment ceux des produits de base ? Bien que les risques inflationnistes soient importants, les avis restent partagés. En effet, certains déplorent une inflation galopante et d'autres, plus optimistes, insistent sur le fait que ce n'est qu'un passage conjoncturel, sans conséquence sur le niveau des prix à long terme. D'ailleurs, dans son acception théorique, on ne peut parler d'inflation que dans le cas d'une hausse continue dans le temps. Il n'empêche que tout le monde souffre du renchérissement des prix et tous les opérateurs du marché (producteurs, distributeurs, importateurs, exportateurs, clients...) sont pointés du doigt comme étant la source du mal. Ces derniers temps, les prix des produits de consommation courante ont été soumis à des fluctuations bien fortes. En effet, plusieurs bulles se sont formées sur les marchés du lait, des œufs, du sucre, des huiles, de l'eau minérale, du riz... Et la liste risque de s'allonger au fil des jours. Désormais, les produits de base sont devenus de véritables produits boursiers. Il est à rappeler que certains de ces produits se négocient sur des Bourses de denrées primaires, mais leurs prix restent contrôlés et plafonnés dans la majorité des pays. A cela s'ajoutent les pénuries consécutives, qui, quoique justifiées dans certains pays, gagnent de l'ampleur et atteignent des niveaux démesurés et préoccupants. Dans tout ça, c'est le budget des ménages qui subit des chocs récurrents et souffre de douloureuses secousses. Résultat : une dégradation du pouvoir d'achat et le déficit budgétaire quasi garanti, à court terme. Peu confiant dans les mécanismes de régulation, soucieux de combler ses besoins et à court de prévision des tendances des marchés, le consommateur a modifié son comportement d'achat et ses préférences. Ce qui a donné lieu à une frénésie qui a aggravé le déséquilibre des marchés. Dans les grandes surfaces, les clients optent pour des achats massifs en vue de constituer des provisions significatives, parfois injustifiées. Face à cette demande additionnelle, exceptionnelle, la capacité de production des industriels et le niveau des stocks de régulation ont montré leurs limites. Ce qui ouvre la voie aux spéculateurs ainsi qu'à de nombreuses pratiques immorales. Motivés par des gains à court terme, ils commencent par créer la pénurie, puis alimenter le marché par des quantités bien étudiées pour maintenir les prix et des marges trop élevées. Du lait à 2 dinars le paquet, de l'eau minérale à 5 dinars la demi-douzaine, des œufs à 1 dinar, on a tout vu et tout acheté. La vague de renchérissement a été soutenue par des infos et surtout des intox de tout genre. Les exportations vers la Libye, la contrebande ou aussi les grèves dans certaines usines sont les plus courantes et... les plus convaincantes. Cependant, la première cause ne peut pas, à elle seule, justifier les pénuries puisque le volume des échanges avec le pays voisin, deuxième marché de la Tunisie, n'est pas encore à son niveau habituel et les autorités ont, à maintes reprises, suspendu les exportations. Même si l'affaire est juteuse pour certains producteurs : ventes à l'usine, paiement cash et sans trop de contraintes d'emballages, ni de conformité. Pour la deuxième raison évoquée, bien que la contrebande des produits de base batte son plein dans le sud-est du pays, le niveau de ce commerce parallèle n'a affecté que l'équilibre des marchés dans cette zone. Les grèves de leur côté, perturbent la production de quelques jours. Si bien que force est de souligner que ces causes ne peuvent expliquer qu'une partie limitée des turbulences des marchés. Le constat est flagrant : au moment où la fameuse pénurie du lait était à son apogée dans les grandes agglomérations, on a constaté des stocks suffisants en lait, toutes marques confondues, dans certains villages du centre et du sud du pays. Sans doute, est-ce le comportement des consommateurs qui amplifie ces pénuries. En conclusion, toutes ces bulles formées sur la base des intox, des manœuvres frauduleuses et immorales de certains opérateurs sur le marché peuvent éclater à la faveur d'un comportement rationnel du consommateur. Avec des achats réfléchis, en petite quantité, le citoyen préserve son pouvoir d'achat, assainit son budget et consolide l'équilibre sur le marché. C'est ainsi qu'on peut chasser les craintes de tendances inflationnistes.