• «Cela ne pourrait avoir lieu sans l'arrêt de la colonisation, le retrait israélien des terres palestiniennes et l'application de toutes les résolutions du Conseil de sécurité, y compris la résolution n°194 relative au retour des réfugiés...» Les citoyens de la Méditerranée pourraient-ils réussir là où ont échoué les politiciens pour construire une zone prospère vivant en paix autour de la mer Méditerranée? La question, pourtant toujours d'actualité, est devenue encore plus pressante dans le contexte actuel de la région, soit juste après le départ de dictateurs arabes et l'arrivée des islamistes au pouvoir. «Nous sommes devant une opportunité historique pour réaliser une meilleure croissance, une meilleure compréhension et une meilleure coopération», pensent plusieurs décideurs et politologues, à l'image de Vincent Garcès, membre du Conseil consultatif ACM et ancien député européen, qui s'exprimait hier à l'ouverture de la deuxième assemblée des citoyens et citoyennes de la Méditerranée. Il pense également qu'il y a eu beaucoup d'attentes et beaucoup de frustrations dues au non-aboutissement du Processus de Barcelone et des difficultés qu'a connues le lancement de l'Union pour la Méditerranée. Et au fait, certains opérateurs n'y croient plus, et ce, pour des raisons solides, entre autres, le dossier du Moyen-Orient et le décalage de développement et du niveau de vie entre les pays du nord de la Méditerranée, de culte chrétien et de tendance colonialiste durant les deux derniers siècles, et ceux de la rive sud, de culte musulman et d'histoire peu glorieuse depuis la chute de l'Empire ottoman. Il va sans dire que, compte tenu de cela, les «priorités ne sont pas les mêmes», comme l'a analysé George Abi Salah, président de la plate-forme Euromed du Liban, et ce, aussi bien en matière de développement économique qu'humain en général. Les pays du Nord ont des revenus élevés, les peuples sont éduqués et l'économie est relativement prospère, malgré les crises. Ils cherchent donc à gagner la durabilité des acquis économiques et sociaux. Et les pays du Sud souffrent encore d'un décalage de développement, un taux élevé d'analphabétisme qui atteint les 50% dans certains pays. Leur espoir en matière de partenariat était de réaliser des progrès et faire sortir des régions entières de la pauvreté. Le codéveloppement défendu par plusieurs spécialistes doit tenir compte de ce décalage et doit permettre aux deux rives de mieux avancer. Or, pour y parvenir, la région entière a besoin de plus de stabilité. Et la question de la paix devient au premier rang des priorités, à commencer par le conflit israélo-palestinien, «…et cela ne pourrait avoir lieu sans l'arrêt de la colonisation, le retrait israélien des terres palestiniennes et l'application de toutes les résolutions du Conseil de sécurité, y compris la n° 194 relative au retour des réfugiés». Telle est la conclusion de M. Abi Salah. Et les islamistes qui arrivent au pouvoir ne sont pas supposés être plus souples sur ce dossier que les anciens dictateurs. C'est une nouvelle donne politique donc, avec laquelle tous les pays de la région doivent composer. « L'Union européenne a déjà entamé une révision de sa politique de voisinage et exprimé sa volonté d'aider les pays en transition démocratique ». Or la grande problématique reste toujours la même : «Est-ce que tous les pays de la région seraient égaux dans la prise de décision commune ?» Il semble que les pays du sud méditerranéen ne sont pas encore prêts pour un tel challenge. Ce sont des démocraties encore naissantes et encore plus fragiles. D'où l'importance de la carte de citoyenneté, basée sur l'acceptation de la différence, le respect mutuel et l'engagement pour un avenir meilleur à tous les riverains de la Méditerranée. L'assemblée annuelle des citoyens et citoyennes de la Méditerranée puise ses réflexions dans les «cercles» de ses adhérents et exerce un lobbying auprès des décideurs politiques, selon des principes formulés dans une charte à laquelle peut adhérer tout citoyen méditerranéen.