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La refonte du système de protection sociale : une urgence pour plus de justice sociale
Opinions
Publié dans La Presse de Tunisie le 31 - 12 - 2011


Par Kamel ESSOUSSI
Au-delà des promesses électorales où chaque parti politique y faisait son bonhomme de chemin pour appâter ses électeurs à travers un crachouillis de propositions sociales saucissonnées sans fil conducteur et parfois incongrues, la Tunisie a besoin, aujourd'hui que le décor de la Constituante est planté et qu'un gouvernement est constitué, d'un vrai projet social fédérateur pour sortir du marasme de l'exclusion dont ont été victimes des pans entiers de notre société, des régions entières et qui risquent d'hypothéquer l'avenir des générations futures si on ne saisit pas cette opportunité de la révolution du 14 janvier pour révolutionner justement tout notre système de transferts sociaux.
Des politiques de sécurité sociale éclatées, imprévoyantes et des dysfonctionnements générateurs d'exclusion
Dans toute la littérature sur la pauvreté, l'exclusion, c'est la sécurité sociale qui, au fond, peut seule instaurer avec plus ou moins de bonheur un brin de justice sociale. Or nos choix en la matière se sont focalisés, pour des raisons historiques, sur une conception uniquement professionnelle de la sécurité sociale qui ne couvre que les travailleurs et encore les seuls travailleurs qui ont eu l'heureuse chance d'intégrer la Fonction publique et les entreprises publiques et privées structurées. En réalité, que de pans entiers de la société n'a-t-on pas sacrifiés, marginalisés et exclus de cette protection sociale sous le sceau d'un système « bismarckien » injuste par nature parce qu'il ne pouvait pas les faire entrer sous son moule basé sur la seule mutualité du risque entre professionnels en fonction des apports en cotisations. Chômeurs, travailleurs dans l'informel, travailleurs précaires étaient donc systématiquement éjectés du système et tous devaient se débrouiller pour faire face aux risques pourtant inhérents à toute vie humaine tels que les risques maladie, vieillesse, invalidité, décès et absence ou perte de revenus qui en résulte...
Pour toutes les familles nécessiteuses et les personnes en précarité avancée, on a inventé une kyrielle de mécanismes, une mosaïque d'adjuvants financés sur le budget de l'Etat qui n'ont pas eu l'efficience requise du fait de leur évolution anachronique et qui venaient s'entasser les unes sur les autres sans coordination parce que gérées de façon cloisonnées entre différents départements ministériels. La «dégourbification» et le «développement rural intégré» du temps de Bourguiba, le programme d'aide aux familles nécessiteuses, le Fonds 21-21 pour l'emploi, le fameux Fonds 26-26 de triste mémoire... étaient les ingrédients additionnels à la sauce protection sociale censée résoudre le problème de la pauvreté. C'est toute la marmite qui explosa un certain 14 janvier, révélant le goût infect et l'odeur nauséabonde d'un mets fait de misère et de pauvreté qui éclaboussa la Tunisie et les Tunisiens.
Je n'ose encore me référer aux prestations reines classiques contributives du système de sécurité sociale pour ne pas trop noircir le tableau: les retraites publiques de la Cnrps et privées de la Cnss d'une part, dans leur agonie financière et qui souffrent de l'absence d'une réforme imminente impérative et l'assurance maladie d'autre part, qui souffre des mêmes maux de déficit chronique 5 ans seulement après sa mise en vigueur parce que l'ancien pouvoir et le syndicat des médecins de libre pratique la voulaient tout de suite et à leurs conditions à eux, à la française, basée sur le principe du «paiement à l'acte», véritable fossoyeur budgétivore et incontrôlable que même la France nous avait déconseillé.
Tout mais absolument tout doit être revu et corrigé. De l'aide aux familles nécessiteuses de 70 D par mois servis aux récipiendaires en fonction de quotas par gouvernorat selon les disponibilités budgétaires, aux programmes inefficients d'insertion des chômeurs et de crédits BTS, aux retraites généreuses au profit de salariés nantis et des plus difficiles à obtenir pour les populations vulnérables aux apports contributifs insuffisants , à l'assurance maladie qui participe très largement à la clochardisation du secteur public de la santé sans pour autant satisfaire ni les assurés noyés dans des choix compliqués de la filière de soins, ni les professionnels de libre pratique qui demandent toujours la révision à la hausse des tarifs conventionnels et encore moins la Cnam, incapable de maîtriser ses dépenses du fait de mécanismes de contrôle médicaux et comptables incohérents et inefficaces.
Refondre le système de protection sociale pour plus d'efficience et de justice sociale
Ce n'est pas une mince tâche car le nouveau gouvernement devra s'attaquer de front à toutes ces problématiques hautement explosives. L'heure n'est plus à colmater les brèches et les fissures en continuant à ronronner sur les mêmes composantes de la protection sociale. Il va falloir en somme recenser toutes les ressources en impôt et cotisations — et elles sont faramineuses — consacrées au financement de ces mécanismes, définir les besoins de chaque catégorie sociale : chômeurs, familles en dessous du seuil de pauvreté, retraités, handicapés, malades et redistribuer de façon plus équitable en fonction des besoins spécifiques dans un système intégré et cohérent.
Une architecture nouvelle à long terme basée sur la théorie des 3 paliers....
C'est pour éviter que des franges entières de notre société restent sans ressources que l'idée d'un socle de la sécurité sociale a été récemment introduite par les instances internationales. La sécurité sociale pour pouvoir jouer son rôle de lutte contre la pauvreté et l'exclusion doit savoir impliquer toute la collectivité nationale, par le biais de l'impôt et une partie des cotisations. Elle se doit d'assurer dans un premier palier à tous les citoyens résidents la satisfaction de leurs besoins élémentaires concrétisés par un revenu minimum de subsistance accompagné d'une couverture maladie que l'on soit chômeur ou actif, nanti ou pauvre. A ce socle de base universel se superposerait un second palier de la sécurité sociale professionnelle actuelle financée par la profession et les cotisations des travailleurs mais débarrassée de ses dérives financières et de toutes les largesses injustifiées qui la caractérisent. L'étage suprême ou le troisième palier est destiné aux plus nantis d'entre nous. Il donne la possibilité par le biais d'assurances privées facultatives ou obligatoires d'arrondir ses rentes au moment où on cesse la vie active selon des contrats retraites ou maladies complémentaires que les commerciaux des assurances savent inventer à satiété.
C'est une première piste fondamentale pour résoudre en profondeur les maux de notre protection sociale mais c'est une tâche immense en études de toutes sortes si on veut la creuser davantage. Elle nécessiterait un coup de pied dans cette ruche biscornue pour rebâtir sur du neuf. Révolution oblige, c'est le moment où jamais de s'y atteler et d'établir dans ce domaine une feuille de route sur plusieurs années avec la collaboration de tous sans exclusive : gouvernement actuel, partenaires sociaux, partis politiques, et société civile. Un pacte social, une constituante sociale, une feuille de route sociale, peu importe la dénomination, s'avère absolument vitale pour éviter les colmatages et les petites mesures isolées en fonction des urgences, des secteurs, des régimes et des mécanismes cloisonnés et disparates.
Des mesures urgentes à prendre qui doivent s'inscrire dans la stratégie du long terme
Cela n'empêche pas de parer au plus pressé. Toute mesure urgente sur le plan social — et Dieu sait s'il en faut en ce moment — devra s'inscrire dans le moule et cette ossature globale. Il en va de l'avenir de la protection sociale. C'est ainsi qu'il va falloir consolider l'édifice des retraites d'abord car l'usure démographique, la déstructuration des rapports de travail et le manque conséquent en cotisations, les largesses consenties au temps des vaches grasses surtout pour les retraites publiques ont fini par faire vaciller dangereusement l'édifice. Le tout nouveau ministre des Affaires sociales ne peut pour le moment que rechercher dans le budget de l'Etat les ressources nécessaires pour combler le trou de plus en plus profond du déficit. Mais il devra en parallèle et immédiatement, dans le cadre du schéma global, mettre sur pied des équipes actuarielles performantes pour refondre ces régimes dans le sens d'une plus grande rationalisation de ces dépenses et inciter à l'accession au 3e palier assurantiel privé sans toutefois compromettre les droits acquis de nos retraités actuels.
L'autre urgence est de recentrer l'assurance maladie autour du secteur public de la santé. Le droit à la santé étant en effet un droit inaliénable de tout citoyen, la priorité est de doter dans l'immédiat toutes les familles nécessiteuses, dont le fichier doit être du reste revisité, de la gratuité des soins tout en veillant à déconnecter la dispensation des soins de la Cnam au profit de la médecine de libre pratique de cette hérésie du paiement à l'acte insoutenable financièrement.
Assurer un revenu minimum de subsistance aux plus démunis, c'est aussi une urgence qui doit être couplée avec une nouvelle étude sur la détermination du seuil de pauvreté sur des bases plus scientifiques.
Il serait fastidieux d'énumérer les urgences et encore plus de refondre dans le détail tout le dispositif de la protection sociale sur le long terme. Une chose est sûre : le nouveau ministre a bien du pain sur la planche. Pourvu qu'il ne regrette pas son portefeuille tout neuf tout beau.


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