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Attention, les mêmes causes produisent les mêmes effets
Opinions - Emploi
Publié dans La Presse de Tunisie le 12 - 03 - 2012


Par Hédi BELGHITH*
La Tunisie souffre de la gangrène du chômage. Jamais la paix sociale ne sera, et même si elle est, elle ne peut être pérenne, tant que des milliers de citoyens sont sans emploi et risquent de le rester dans la durée, si rien n'est fait.
Cette situation est exceptionnelle. Si la Tunisie arrive à l'assainir, elle sera apaisée pour bien longtemps, car nous le savons tous, le nombre d'enfants en âge d'être scolarisés a entamé sa baisse, depuis déjà un certain temps. Autrement dit, le nombre de nouveaux demandeurs d'emploi, y compris les diplômés, va commencer à baisser. La démographie joue donc en faveur de la Tunisie ou du moins pour le moment.
A situation exceptionnelle, il faut un traitement exceptionnel : il s'agit de mettre tous les moyens possibles au service de cette cause. Cela représenterait, à mon avis, l'investissement le plus rentable pour chacun d'entre nous. L'avenir et la sécurité de nos enfants en dépendent.
D'abord, quelles sont les causes de cette accumulation de chômeurs ?
Le stock des chômeurs s'est constitué sur une longue période. Certains chômeurs n'ont-ils pas aujourd'hui plus de quarante ans ?
La cause principale, qui semble faire l'unanimité des observateurs, est l'incapacité de l'économie tunisienne à faire face aux flux des demandeurs d'emploi. Notre économie s'est accrochée aux «créneaux faciles», ne nécessitant ni beaucoup de qualifications, ni beaucoup de compétences. Elle s'est caractérisée par l'absence de l'innovation et le règne de la médiocrité. Ce qui, avec ce qu'on peut appeler, le coût élevé de la transaction (corruption, ...), explique la baisse voire l'absence d'un investissement privé significatif.
La deuxième cause me semble être l'aliénation culturelle de notre jeunesse, produit d'une société malade de son ambition et de ses choix. En effet, un jeune, conformément aux vœux de ses parents, souhaite devenir médecin, avocat ou ingénieur, travailler de préférence dans l'administration ou dans un établissement étatique et à défaut dans une entreprise privée. Toujours en tant que salarié. Esclave de cet archétype, la quasi-majorité des demandeurs d'emploi attend son tour pour se faire embaucher comme salarié, plutôt que d'envisager de créer sa propre entreprise ou d'essayer d'apprendre un métier.
La troisième cause est la qualité de notre système national d'éducation et de qualification qui, après avoir fourni à l'Etat ses cadres dirigeants, s'est essoufflé et n'a pas su s'adapter aux nouvelles exigences et aux rapides évolutions technologiques. Il continue à fonctionner «par habitude», presqu'indépendamment des besoins de l'économie : n'y a-t-il pas des demandeurs d'emploi diplômés de l'enseignement supérieur qu'aucun employeur ne peut recruter car ils ne leur sont d'aucune utilité? Ainsi, chaque année, un nombre important de diplômés vient renflouer le fameux stock !
Comme je l'ai développé dans mon article «Parce que stratégique, l'emploi doit être la cible principale d'une réforme globale du système national d'éducation et de qualification» publié dans ces pages début avril 2011, les causes de cette non-qualité sont multiples, mais la question de la gouvernance du système me paraît essentielle.
La dernière cause que je citerais, est l'absence de politique adéquate d'emploi, en ce sens où il n'y a eu à aucun moment une réelle volonté de résoudre le problème du chômage de longue durée.
Les limites des politiques d'emploi
La politique actuelle de l'emploi, ou ce qui en fait office, a été initiée depuis bien longtemps. Elle consiste à observer le marché de l'emploi et à concevoir des programmes d'insertion ou de soutien destinés aux différentes populations (diplômés de la formation professionnelle, diplômés de l'enseignement supérieur, sans diplôme, etc...). Les instruments de cette politique étaient simples : formation complémentaire, adaptation professionnelle, stage d'initiation à la vie professionnelle...
L'efficacité de cette politique dépend, naturellement, de la qualité et de la rigueur de l'observation du marché de l'emploi.
Dans les années 90, de sérieuses tentatives de rationalisation de l'observation du marché de l'emploi et de ses interactions avec les secteurs productifs, éducatifs etc., ont eu lieu, notamment, avec la création de l'Observatoire national de l'emploi et des qualifications, la mise en place d'instruments élaborés pour la gestion du marché lui-même et le rapprochement de l'offre et de la demande, etc.
Parmi les prérogatives de l'Observatoire national de l'emploi et des qualifications figurait l'évaluation des politiques et services de l'emploi, de la formation continue et de la formation professionnelle (Une enquête annuelle était consacrée à chaque politique). En outre, grâce au modèle macroéconomique d'analyse du comportement du marché de l'emploi, l'Observatoire devait permettre de faire des prévisions et des simulations de politiques.
Mais les premières enquêtes d'évaluation d'impact de la formation professionnelle, de la formation continue et des services et politiques d'emploi ont montré les limites de ces politiques. Leurs résultats n'ont pas plu aux politiques et l'Observatoire ne leur a pas survécu.
Durant cette période, il était déjà admis que l'économie ne pouvait pas résorber le flux des sortants du système national de formation et de qualification (formation professionnelle, enseignement supérieur, ...) dont un grand nombre ne pouvait être embauché bien que des offres d'emplois fussent disponibles. En outre, le programme de mise à niveau des entreprises a entraîné dans plusieurs cas des licenciements entraînant l'accroissement du nombre de demandeurs d'emplois.
Durant cette période, il était déjà urgent de promouvoir le travail indépendant et la micro-entreprise. Il était aussi urgent de s'attaquer à la machine qui fabriquait des chômeurs. Le processus de la professionnalisation des diplômes de maîtrise était finalement amorcé et la notion d'employabilité a commencé à faire son chemin, mais sans réelle conviction de la part des universitaires, à telle enseigne qu'aujourd'hui, cette notion est devenue une simple marque du politiquement correcte.
Les responsables politiques savaient que la situation se détériorait lentement mais sûrement. Pour y faire face, les pouvoirs publics, au lieu d'adopter la solution certes difficile, mais efficace de traitement économique du phénomène, ont préféré une solution de facilité. Ils ont créé le fonds 21-21 qui leur a permis surtout de gagner du temps (cinq ou six ans), et de donner les moyens aux responsables politiques locaux pour contenir le phénomène du chômage : ils distribuaient des illusions et de l'argent pour faire patienter les demandeurs d'emploi.
Le chiffre critique de 350.000 demandeurs d'emploi a déjà été atteint dès 2005, bien que tous ceux qui bénéficiaient de l'un des instruments du fonds 21-21 ne soient pas comptabilisés comme chômeurs et c'était là, l'un des objectifs du fonds.
La révolution
Depuis 2008, les masques ont commencé à tomber. En 2010-2011, le verre a débordé et ce fut la révolution. Les révoltés, surtout des chômeurs, ont compris l'inefficacité de la politique d'emploi et l'hypocrisie du système. Ils ont fait de l'emploi une revendication explicite et soutenue, avec la dignité et la lutte contre la corruption.
Aujourd'hui, bien que la situation sociale ne soit pas sereine, elle est relativement calme : les gens gardent encore de l'espoir. Or, l'année 2011 n'a rien produit : ni nouvelle politique, ni même réflexion nouvelle. La campagne pour les élections du 23 octobre n'a pas permis, non plus, l'émergence de nouvelles idées. Aucun parti, du moins à ma connaissance, n'a conçu une politique digne de ce nom, en vue de résorber le stock des chômeurs. Au mieux, les chiffres présentés par certains partis permettront-ils à peine de résorber les nouveaux arrivés sur le marché de l'emploi.
Conclusion
Avec ces approches, nous allons continuer à négliger le stock de demandeurs d'emplois et à accepter de le voir augmenter d'année en année, exactement comme avant.
En effet, la création d'emplois, en admettant qu'on arrive aux chiffres promis, provenant de nouveaux investissements, de nouveaux projets ou de la croissance de l'activité économique, ne concerneront que des demandeurs qualifiés ou capables de l'être. Ils ne concerneront pas les demandeurs d'emploi de longue durée qui, en plus, n'ont pas de qualification pouvant servir à un investisseur dont l'objectif n'est pas de faire du social, mais de réussir son projet grâce à des compétences (bien sûr, l'exception confirme la règle).
D'ailleurs, le plus souvent, les investisseurs débauchent des cadres confirmés du secteur public, pour gagner le temps de la formation.
Puisque les mêmes causes produisent les mêmes effets, dans quelques années, dans très bientôt, lorsque la majorité des gens concernés perd l'espoir, cette situation nous amènera inéluctablement à une nouvelle révolution !
Il est donc important de ne plus parler de création d'emplois tout court, mais de créations destinées aux jeunes qualifiés et d'autres aux jeunes et aux moins jeunes non qualifiés ou dont la qualification ne répond pas aux besoins de l'économie, même titulaires de certains diplômes de l'enseignement supérieur.
Soyons lucides. Les investissements, les gros projets, la croissance etc. ne profitent qu'à ceux qui sont qualifiés ou aptes à le devenir.
Pour les autres, il faut un autre traitement. Je présenterai quelques idées dans un prochain article.
Il me semble vital que, pour que la Tunisie fasse l'économie d'une autre révolution, elle se doit de préserver son potentiel compétence et essayer de rattraper le temps perdu, et d'adopter la démarche suivante dans le processus de résolution des problèmes de l'emploi :
– Considérer la question à son niveau global : résoudre la question du chômage, c'est aussi réformer l'enseignement supérieur qui nécessite la réforme de l'enseignement secondaire lequel nécessite celle de l'école de base.
– Distinguer entre les aspects pédagogiques (qui sont du ressort des enseignants, des pédagogues et des spécialistes) et les objectifs du système national d'éducation et de qualification (qui concernent la société, l'économie et le marché de l'emploi).
– Eviter les réformes sans étude et réflexion et adopter un système objectif d'évaluation.
– Adopter un système de gouvernance unique du système national d'éducation et de qualification, qui associe les responsables de l'emploi.
* (Expert emploi-formation)


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