Tunisiens, préparez-vous : le transport public entre dans l'ère du temps réel    La Tunisie accueille les nouveaux ambassadeurs du Soudan, du Danemark et du Canada    Honda inaugure une agence de 3 000 m2 à Sfax    Tir à la gare Montparnasse : Evacuation d'urgence à Paris !    Tir à la gare Montparnasse : Evacuation d'urgence à Paris !    La tunisienne Amani Ben Khalifa présente le programme Al Abtal al khamsoun (Les 50 Héros) sur Alaraby 2    Malek Labidi invite à la Table du Sud: émerveillement et saveurs (Album photos)    Match Tunisie vs Jordanie : où regarder le match amical préparatif à la CAN 2025 du 14 novembre?    Les Aigles de Carthage en action : suivez Tunisie vs Jordanie en direct    Les maladies les plus répandues dans le monde arabe    Les IPDAYS X GITS 2025 : Ouvrir les portes de l'écosystème tunisien vers l'extérieur    Météo en Tunisie : temps nuageux, mer agitée à très agitée dans les Golf de Tunis et le Golf de Hammamet    Dr Saayda Ben Becher: Une femme d'exception... Une carrière au firmament    Célébration du roman tunisien du 14 au 16 novembre 2025 à la Bibliothèque régionale du Kef    Hafedh Chekir: Accroissement naturel de la population en Tunisie    WIFAK BANK anime une journée commerciale à la Faculté de Médecine de Tunis pour promouvoir son offre "Futurs Médecins & Pharmaciens"    Journées Théâtrales de Carthage : une 26e édition des JTC engagée pour un théâtre de conscience et de liberté    Agil Energy illumine le Salon Auto Expo 2025 à Sousse    Carrefour Tunisie lance un catalogue 100% créé par l'intelligence artificielle en Tunisie    Tunis : quatre filles arrêtées pour agression devant un lycée    2026 : dizaines de milliers d'emplois publics pour les Tunisiens    La Tunisie brille à Johannesburg : SOPAL récompensée pour son excellence Kaizen    Jamila Boulakbèche et Isra Ben Taïeb remportent 2 médailles d'or aux Jeux de la Solidarité islamique 2025    Météo en Tunisie : temps peu nuageux, températures stationnaires    Foued Kacem devient le nouveau président de l'Etoile du Sahel    Match Tunisie vs Mauritanie : où regarder le match amical préparatif à la CAN Maroc 2025 du 12 novembre?    Où et quand suivre Tunisie–Mauritanie, le match amical de ce mercredi ?    Drones en Tunisie : des mesures pour encadrer leur usage    La BTE franchit une étape stratégique: migration réussie vers le standard international SWIFT ISO 20022    Hafida Ben Rejeb Latta ce vendredi à Al Kitab Mutuelleville pour présenter son livre « Une fille de Kairouan »    Quand Mohamed Salah Mzali encourageait Aly Ben Ayed    Amina Srarfi : Fadl Shaker absent des festivals tunisiens    Tunisie: Financement de projets d'excellence scientifique    Décès du Pr Abdellatif Khemakhem    La Fête de l'arbre: Un investissement stratégique dans la durabilité de la vie sur terre    Justice tunisienne : 1 600 millions pour lancer les bracelets électroniques    Tunisie : Le budget de la Culture progresse de 8 % en 2026    Qui est le nouvel ambassadeur de Palestine en Tunisie, Rami Farouk Qaddoumi    Secousse tellurique en Tunisie enregistrée à Goubellat, gouvernorat de Béja    Suspension du Bureau tunisien de l'OMCT pour un mois : les activités à l'arrêt    Elyes Ghariani: Comment la résolution sur le Sahara occidental peut débloquer l'avenir de la région    Mondher Khaled: Le paradigme de la post-vérité sous la présidence de Donald Trump    Congrès mondial de la JCI : la Poste Tunisienne émet un timbre poste à l'occasion    Attirant plus de 250 000 visiteurs par an, la bibliothèque régionale d'Ariana fait peau neuve    Le CSS ramène un point du Bardo : Un énorme sentiment de gâchis    Ligue 1 – 11e Journée – EST-CAB (2-0) : L'Espérance domine et gagne    New York en alerte : décès de deux personnes suite à de fortes précipitations    Lettre manuscrite de l'Emir du Koweït au président Kaïs Saïed    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Le retour de Camus
Vendanges
Publié dans La Presse de Tunisie le 12 - 04 - 2012


Par Hamma HANACHI
En dépit des tourments politiques, le printemps est propice pour la culture, nombreuses expos et débats, au point que l'on ne sait plus où donner de la tête. L'avenue Habib-Bourguiba, l'artère de toutes les convoitises, récemment interdite aux manifestants, même aux pacifiques d'entre eux, a pris des couleurs luisantes, les ficus, les lampadaires ont été emballés de fils aux tons vifs, jaune, orangé, mauve. L'œuvre est de Yarn Bombing Guerrilla Crochet, un collectif d'art contemporain en street art ou art urbain. Est-ce un tricotage de couverture en prévision des mauvais jours, l'œuvre entretient le mystère ? Une sorte d'emballage inspiré d'une démarche de Christo, célèbre emballeur d'histoire et de géographie, des colonnes de Buren ? Est-ce une réaction à l'interdit qui laisse s'exprimer l'écorce et la sève des arbres centenaires ?Viendront les étourneaux, qui ont une parole libre dans le ciel de l'emblématique avenue. L'une des vertus de la révolution est qu'elle favorise la naissance des expressions nouvelles et modernes. Al Kalimat, Lectures à voix haute est un autre événement majeur et qui convoque les faiseurs de mots à interroger la réalité. Organisé par le marathon des mots de Toulouse et Ness El Fen à Tunis, la course lente des mots est partie du Théâtre municipal à Ennejma Ezzahra pour revenir au point de départ en passant par l'Acropolium. Vendredi, un hommage à Hédi Guella, chanteur engagé, récemment disparu, l'acteur Fethi Haddaoui lit Mahmoud Darwich, Nizar Kabbani, Hatem Karoui présente un slam, (genre d'intervention littéraire pour populariser la poésie), l'actrice Fanny Ardant, marraine de cette première édition, déclame Louis Aragon, Albert Camus et Aboul Kacem Chebbi. L'Acropolium, enrichi par une exposition du peintre Hamadi Ben Saâd, abrite une conversation sympathique entre gens de lettres et de verbe, Olivier Poivre D'Arvor, écrivain, directeur de France Culture et président du marathon des mots de Toulouse, pose la question : Avez-vous le sentiment que les mots ont servi à quelque chose ? Jamel Guitani, écrivain et journaliste égyptien, décrit une situation économique désastreuse, grâce aux pétrodollars saoudiens. Les Frères musulmans aidés par les salafistes sont majoritaires et gagnent encore du terrain, aujourd'hui. Ghitany craint un exil massif de ses compatriotes coptes. Et les nouvelles d'Algérie ? Bouallem Sansal, écrivain, adulé en France répond : «La météo est bonne, mon pays est riche, il a les moyens d'acheter la paix sociale». Colette Fellous, franco-tunisienne, une vingtaine d'ouvrages, productrice d'une émission littéraire à France Culture, respire l'enthousiasme et l'espoir : «Je ne peux pas concevoir mon pays d'enfance autrement que multiculturel, il est trop beau et on veut l'étouffer». Héla Béji, écrivaine et militante dans le champ politique, estime qu'il y a déclin de l'humanisme, que le verbe religieux revient avec force et ceux qui le manient ont acquis l'autorité politique par l'éloquence. Son conseil : «Aux intellectuels et à l'élite de persuader la plèbe et les tenants du discours religieux sans user de la force». Ce qui appelle l'interrogation : comment persuader des fanatiques qui usent de la force pour étouffer les idées de l'autre, qui combattent avec l'arme du dogme ? Lotfi Achour, artiste, réagit, il recommande de «produire une analyse, ou à défaut, créer des fragments de projets».
Devoir de fraternité
La jeune Anissa Daoud, actrice Hobb story, activiste, va dans le même sens «au mot engagé, je préfère engageant. La révolution a créé des liens (Internet, la rue, les réseaux sociaux...)...même si les cyberdissidents manquent d'espace, leur identité est en train de s'inventer». C'est aussi beau qu'un discours antique.
Jean-Noël Pancrazi, écrivain et critique littéraire au journal Le Monde, lucide et rêveur en même temps, remarque que «le désenchantement est voulu par le système », partout, les pouvoirs poussent les artistes à abandonner leurs théâtres, leurs ateliers, leurs cinémas... «Mais nous avons un devoir de beauté, c'est notre manière de résister».Un écrivain, note-t-il, n'est pas forcément engagé, mais «il a un devoir de fraternité». Il cite Camus : «Créer, c'est aussi donner une forme à son destin.». Place aux poètes. Les mots de Hyam Yared, romancière et poète, vont comme un couteau dans la chair, corps disloqués, entrailles, morceaux de chair, éructations, vomissements, yeux crevés...une poésie crue, sans gras ni effets de manches, écrite au scalpel. Tahar Bekri, poète, essayiste, évoque la Palestine, crie contre l'oppression, chante le destin des peuples et la mémoire des poètes. Sghaïer Oulad Ahmed, poète engagé, tire à boulets de canon sur les potentats, énumère leurs travers, et appelle à un monde nouveau. Applaudissements !
Dimanche, retour au théâtre. Débat entre Gilles Kepel, islamologue, spécialiste du monde arabe, et Ghazi Gheraïri, spécialiste en droit public et en sciences politiques. Historique des révolutions, analyse des mots d'ordre phares scandés à Tunis et au Caire, des opinions sur les pays en post-révolution : crainte sérieuse pour l'Egypte, probable somalisation de la Libye, problèmes insoluble au Yémen, Ennahda qui devrait mettre en place un système démocratique, ... Débat captivant.
En tête à tête avec J.N.Pancrazi. Vous citez Camus, Fanny Ardant le lit, Michel Onfray écrit : «L'ordre libertaire. La vie philosophique d'Albert Camus», on dirait que l'auteur de La Peste revient sur le devant de la scène.
«Je suis né en Algérie, Camus m'accompagne tout au long de ma vie, dans la philosophie, il a introduit une morale que j'adopte, où on nous propose des images fausses, la présence de Camus s'impose d'elle-même, les gens ont besoin de repères, besoin d'une morale pour savoir où on est par rapport à la marche de la vie. Les gens sont perdus, un écrivain s'il peut être un repère, ça serait bien, Camus répond à toutes ces questions, il replace l'homme dans l'univers, loin des religions et des illusions.»


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.