Par Soufiane Ben Farhat Les débats sur la loi de finances complémentaire à l'Assemblée constituante ont mis à jour certaines caractéristiques du paysage politique actuel. En premier lieu, le courant ne passe toujours pas entre la majorité et l'opposition. Cela se cristallise autour de certaines pommes de discorde. Et cela cale parfois. Ainsi en est-il des déclarations, il y a peu, du ministre de la Jeunesse et des Sports, M. Tarak Dhiab. Ses charges contre l'opposition ne sont pas passées inaperçues. Et il a dû essuyer les tirs croisés d'un très grand nombre d'intervenants n'appartenant pas à la majorité gouvernementale. Il en fut visiblement très affecté. Les différends sont également de mise concernant les choix et priorités du développement économique et social. Certes, dira-t-on, c'est de bonne guerre. On n'est pas majorité et opposition pour piquer tête en avant dans l'unanimisme, qui plus est en démocratie. Tout le monde en convient. Seulement, certains dirigeants de l'opposition ont signifié de prime abord qu'ils ne voteront pas la loi de finances complémentaire. Dans tous les cas de figure. Pourquoi donc ? Est-ce une attitude qui ne souffre guère la remise en cause ? Interrogé à ce propos, un des dirigeants du Parti républicain a été on ne peut plus clair. A l'entendre, dans les régimes démocratiques, l'opposition ne vote jamais deux questions fondamentales : la motion de confiance à l'endroit du gouvernement et les lois budgétaires. Ainsi donc, nous voilà en plein registre d'une attitude de principe formelle. La démocratie, cela semble être aussi cela. Pourtant, dans son discours introductif, le chef du gouvernement a bien évoqué le recours à quelque conseil des sages. Pour l'instant, l'idée n'est pas encore claire. Mais les sages en question peuvent bien englober quelques figures de l'opposition. Cela n'est guère à écarter. L'évidence s'impose. La charge des affaires gouvernementales s'avère particulièrement âpre. Les partis de la Troïka en sont à leur premier exercice gouvernemental. Ils ont tout fait au début pour accaparer le pouvoir. A leurs risques et périls en somme. Ils ne s'attendaient certainement pas à une telle étendue de responsabilités, de revendications, d'attentes, à une telle marge de manœuvre réduite. Ils ont dû, entre-temps, déchanter. Ou mettre de l'eau dans leur vin. Mais les urgences n'en sont pas pour autant amoindries. Le pouvoir c'est le pouvoir. On lui fait toujours porter la casquette de l'état des choses, bien que, parfois, leurs causes soient exogènes. Quatre défis essentiels grèvent l'actuelle équipe gouvernementale : les défis du chômage croissant et de l'employabilité qui tarde à venir ; les affres du déséquilibre régional qui, à force de faire du surplace, se creuse davantage en fait au fil des jours ; les seuils effrayants du renchérissement des prix des denrées de base et alimentaires particulièrement ; la dérégulation du marché de la violence et l'explosion inouïe de l'insécurité. Pour le citoyen lambda, abstraction faite de l'équipe au pouvoir, le gouvernement est responsable de ces quatre donnes fondamentales. Et elles n'en finissent guère d'envenimer son vécu et de l'exaspérer au plus haut point. Si conseil des sages il y a, il gagnerait à se pencher sur ces quatre urgences. On peut très bien imaginer une espèce d'union sacrée à ce propos. Par-delà les chapelles, les partis pris, les orientations politiques, les clivages. Cela pourrait se concevoir. Pourquoi pas ? La politique c'est l'art du consensus possible face aux périls communs.