La douleur n'est plus considérée comme une fatalité. Durant des milliers d'années, nos ancêtres et nous-mêmes, il n'y a pas très longtemps, avons accepté de souffrir non pas par stoïcisme ou même par courage, mais tout simplement parce qu'il n'y avait rien d'autre à faire que souffrir. Si le remède était insuffisant, il fallait accepter la douleur comme une issue normale de la maladie. La «révolte» est venue, en premier, des Américains vers les années trente puis des Anglais qui, entre 1950 et 1960, ont, pour la première fois dans le monde développé, cette idée que la mort est une certitude mais qu'on peut y parvenir sans nécessairement souffrir. Très vite, l'idée a fait du chemin et, à son tour, la France, relayée par d'autres pays européens organise officiellement les soins palliatifs et l'accompagnement du malade en phase terminale. Les soins palliatifs prennent encore plus d'importance quand l'Organisation mondiale de la santé en donne une définition précise en mettant en garde «qu'il ne s'agit ni de retarder ni d'avancer le décès», mais plutôt «de préserver la meilleure qualité de vie possible du malade jusqu'à la mort». Cela veut dire que ce qui compte le plus quand le traitement curatif ne sert plus à rien et quand le patient est aux derniers moments de sa vie, que la médecine prend en charge désormais le confort du patient. Il s'agit essentiellement des soins physiques destinés à éviter la déshydratation, la survenue d'ulcérations de la peau, de prévenir et de traiter les diverses affections survenant très fréquemment chez les sujets âgés. Les soins palliatifs ont depuis pris tellement d'importance que l'accompagnement du malade se fait même à domicile et concerne aussi bien les personnes âgées que les jeunes atteints de maladies incurables telles que sida ou cancers. Il s'agit dans le cas d'espèce d'accompagnement psychologique permettant de lutter contre l'anxiété, la dépression, le regret, etc. liés à l'approche de la mort. Le traitement de la douleur exige ainsi un corps médical multidisciplinaire. D'ores et déjà, l'Association tunisienne de soins palliatifs réfléchit sur la mise en place d'un système de soins palliatifs à domicile. D'autre part, et contrairement à beaucoup d'autres pays où la priorité est encore au curatif, en Tunisie, les soins palliatifs n'ont pas tardé à être une préoccupation de poids et, en 1996, le Centre de traitement de la douleur prend naissance à La Rabta avec une équipe pluridisciplinaire. Les patients ne tarderont pas à s'inscrire nombreux au centre. Ce n'est d'ailleurs pas étonnant si l'on sait qu'en Tunisie, et sur le total des consultations, environ 30% se font dans le but d'obtenir un traitement contre la douleur. Au chapitre des maladies cancéreuses, 10 000 cas sont détectés chaque année et sur l'ensemble, 25% sont au stade de la métastase, ce qui nécessite, bien évidemment, des soins palliatifs certains. Ceci sans évoquer toutes sortes d'autres maladies incurables.