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Que faisons - nous contre la souffrance physique et surtout morale ?
Maladies incurables
Publié dans Le Temps le 16 - 05 - 2007

Nous le savons tous, notre quotidien n'est pas toujours porteur de joie, de gaieté. Notre vie n'est pas que du bonheur encensé à l'eau de rose. Des épisodes contrariant viennent des fois obscurcir nos horizons mais fort heureusement de façon ponctuelle pour se dissiper aussi rapidement qu'ils ont apparu.
Seulement voilà, il est des cas où, malgré tout l'optimisme dont nous nous munissons, toute la foi inébranlable qui nous habite, toute la confiance que notre désarroi nous pousse à accorder aux assurances « trompeuses et non moins pompeuses » de certains médecins, donc il existe des cas où nous nous devons de nous rendre à l'évidence, d'accepter les règles du jeu, en un mot de reconnaître les limites de la médecine et ce en confrontation avec de nombreuses pathologies qualifiées incurables ou selon le jargon médical de pronostic très réservé, péjoratif, sombre ; expressions qu'ils utilisent entre eux et en présence des membres de la famille histoire de ne point les alarmer, les choquer.
Il est indéniable que la portée de cette approche, son profond impact ne peuvent être saisis à pleine mesure, à leur juste valeur que par ceux (celles) ayant vécu ce dilemme, cette terrible épreuve d'extrême détresse, cette situation cauchemardesque, entendre avoir un parent proche atteint d'une maladie à l'évolution irréversible, au destin tout tracé, et ne pouvoir rien faire, rien espérer, ayant les mains liées.
Deux alternatives se présentent inéluctablement à la famille proche : affranchir le malade de la gravité de sa maladie, de sa fin approchant à pas de géant, ou ne rien lui révéler et continuer à le bercer des sornettes habituelles, de faire semblant de rigoler et de plaisanter en sa présence, ayant pris le plus grand soin auparavant de ravaler ses larmes, d'occulter sa peine, de déguiser sa souffrance.

La médecine a ses limites
Ceux optant pour la première option, acceptant de mettre le malade au fait de sa maladie sont minoritaires. Ils expliquent leur acte par la forte personnalité du sujet, de ses capacités moult fois vérifiées par le passé à supporter les chocs, par ses recommandations antérieures de ne rien lui cacher pour qu'il puisse prendre les dispositions idoines en étant encore lucide, apte à le faire.
Et généralement, ils ne sont pas en tort car le patient assume avec courage et stoïcisme son nouveau statut jusqu'au bout du voyage, sans récriminations ni plaintes aucunes.
La seconde tranche de loin la plus nombreuse impose tout d'abord au médecin traitant la conduite à tenir : minimiser, dédramatiser, bercer de fausses certitudes, d'espérances...refuser de se rendre à l'évidence, d'admettre la sentence.
Peut-être par une obscure croyance en un miracle providentiel, à une manne du ciel, peut être pour se rassurer ou plutôt se leurrer eux mêmes étant très fragiles psychologiquement en cette période critique ; ou cela leur permettrait- il de continuer à jouer à l'autruche, à afficher une mine confiante, rassurante, sereine.
Qu'on se détrompe, le chemin suivi par cette frange est de loin le plus coûteux, le plus exténuant moralement. Mener une vie à deux vitesses la journée durant et sur quelques mois parfois n'est nullement une sinécure. Composer un sourire de circonstances du matin au soir en présence du malade, assister impuissant à sa déchéance que l'on mesure, que l'on quantifie à vue d'œil et de jour en jour tout en lui affirmant le contraire est un exercice de haute voltige, requérant force de caractère, maîtrise de soi, des dons de parfait comédien à la limite.

Que de subterfuges !
Lui assurer à tout bout de champ que sa mine est meilleure ; que son visage est plus coloré que la semaine dernière ; qu'il a l'air de grossir et ce en dépit d'un corps où les os, le squelette sont de plus en plus saillants, proéminents ; lui expliquer son impossibilité d'avaler même une gorgée d'eau par une méchante angine que le médecin mandaté d'urgence traiterait, imputer son vomi brunâtre (du sang de toute évidence) à la mloukhia qu'il a à peine goûté et sans en avaler la moindre bouchée il y a deux semaines ; son ventre grossit démesurément et de manière répétitive par l'épanchement de quelques 10 litres de flotte ( de l'ascite que les toubibs appellent), on en fait la ponction pour le soulager tout en lui débitant que c'est le gros intestin paresseux qui en est la cause et non le foie au bout du rouleau ; des métastases osseuses (localisations secondaires d'un cancer primitif du colon, du sein, hépatique ou pulmonaire) se développent au niveau de l'avant-bras, de la cuisse générant des douleurs insupportables, c'est son rhumatisme juvénile qui se réveille après la douche prise la semaine dernière ; ces métastases bloquent l'ouverture normale de la bouche n'autorisant à la longue qu'une sustentation liquide à l'aide d'une paille et encore, le rhumatisme est encore mis sur le tapis ou un torticolis dû à un oreiller un tantinet durement rembourré ; une masse maligne turgescente, saillante de la pommette au point de condamner l'ouverture même partielle de l'œil et que le professeur spécialiste en maxillo-facial avoue son impuissance à juguler est due à une piqûre d'un quelconque moustique envahissant la demeure de provenance de la mare du bout de la ville que la municipalité n'a pas traitée en temps opportun ; il lui est désormais impossible de se mouvoir, de se déplacer, de tenir debout, c'est le manque de nourriture qui en est la cause ; d'où le recours au miraculeux sérum glucosé( 25 grammes de sucre dilués dans un demi litre d'eau sans plus !) à domicile pour pallier à cet état de dénutrition. Mais les veines étant généralement tellement fines, collabées, qu'il faut s'y prendre à maintes reprises, sans que le malade ne bronche, ne manifeste le moindre signe de refus, de colère d'être piqué plusieurs fois pour finalement renoncer la mort dans l'âme à cette ultime tentative, une vaine lutte pour retarder la macabre échéance.
Le problème se corse davantage quand dans l'entourage proche du patient, gravitent des médecins ; fille, nièce, frère divisés quant à l'attitude à adopter : acharnement thérapeutique en dépit des conseils des imminents spécialistes ou abstentionnisme rimant avec la notion de le laisser partir tranquillement, d'abréger ses souffrances. Dans ces cas de figure, c'est généralement la poursuite de la lutte qui prend le dessus car il est quasi impossible à un proche, même médecin, de baisser les bras ; pourvu que le malade « reste encore » avec et parmi nous ; chaque instant grignoté à la mort est une éternité de gagné !

Noblesse du malade
Le plus ahurissant, déconcertant dans ce combat inégal avec la mort, c'est sans conteste aucun, l'attitude du malade. Jamais une allusion à la gravité de sa maladie, au sérieux de la situation. Toujours à gober nos bobards et mensonges souvent contradictoires d'un proche parent à l'autre avec un mutisme parfait, un regard droit, triste, pensif où on décèle souvent de la compassion pour les efforts maladroits que nous nous efforçons de fournir à son endroit. Comme s'il voulait nous réconforter, nous soulager des fardeaux et tourmentes qui nous accablent. Car il est donné pour quasi certain que notre cher malade est au fait de toutes les péripéties et étapes de son mal, sait exactement ce qu'il en est et de quoi il retourne, mais qu'il le cache pour ne point nous peiner, approfondir le gouffre où nous nous sommes précipités depuis la déclaration de sa maladie. Mieux encore, avec son attitude « abstentionniste, renonciatrice » il tente dans un suprème sursaut rageur de sa désormais frêle personne de nous insuffler, à nous les bien portants, ce qu'il possède encore comme ultimes ressources de courage, de bravoure, de résignation à la volonté divine...de dignité face à la fatalité. Comme s'il avait voulu nous dire de ne point nous en faire, d'accepter la sentence céleste, de ne pas nous sentir accablés, désemparés et qu'il nous saurait toujours gré de l'amour, de la sollicitude dont nous l'avons entouré et qui lui ont été d'un grand secours avant de tirer définitivement sa révérence.

Si nous avons abordé ce chapitre, ce n'est nullement de gaieté de cœur ni pour raviver des souffrances déjà ou encore endurées, mais uniquement dans le dessein de saluer, de glorifier l'acharné, le titanesque combat en solo mené par ces malades pourtant intimement persuadés de l'imminence de leur fin, et qui tout en luttant en silence contre l'implacable douleur physique leur lacérant et tenaillant les entrailles, mènent une bataille en parallèle pour nous venir en aide, font mine de bien se porter, vont jusqu'à partager nos joies factices, simulées. Et ce n'est qu'une fois définitivement partis(es), et souvent avec beaucoup de recul que nous parvenons enfin à mesurer la grandeur de leur âme, l'immensité de leurs sacrifices. Que Dieu ait leur âme !


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