Lors de la soirée du jeudi 12 juillet, près de 400 personnes sont rentrées chez elles, de grands sourires accrochés à leurs visages ; car non seulement il faisait frais au théâtre de plein air de Hammamet mais surtout parce qu' ils assistaient à la dernière création d'El Teatro : L'Isoloir, dans le cadre du Festival international de Hammamet. Cette pièce a été créée en 2011, avant les élections du 23 octobre, pour «rendre hommage à la révolution et lancer un appel aux Tunisiens pour qu'ils participent à l'avenir politique du pays», disait Taoufik Jebali. Après les résultats des élections, une «réécriture» s'est imposée suite à une «relecture» de la réalité et la pièce est devenue «une fresque, pas une analyse sociologique, des élections... et ça n'a rien à voir avec la didactique», précisait Taoufik Jebali. Le spectateur était présent par amour au théâtre, par fidélité au festival, par nostalgie à l'ironie et au jeu de mots de Taoufik Jebali, mais surtout par curiosité : «J'ai compris à travers le titre que ça parle des élections et j'étais très curieux de savoir comment Si Jebali allait nous faire rire à partir d'une douleur qui est les élections», déclarait un spectateur. Quand la représentation commence, on découvre peu à peu que l'isoloir n'est qu'un objet symbolique: parfois c'est le «miroir» qui nous montre qui nous sommes, parfois c'est cet arrêt contemplatif, parfois c'est le purgatoire et parfois c'est ces instants d'hésitation et de remise en cause, voire en doute. Nul ne fut épargné de l'ironie de Taoufik Jebali et co : les partis de gauche et de droite, les contrôleurs, les élections, le mystérieux «Si Kamel», l'homme au cache-col rouge... et même nous : spectateurs/peuple tunisien. Le jeu de mots était bien présent comme nous a si bien habitués Taoufik Jebali depuis Klem Ellil. Et il a bien jonglé avec le mot kheloua (isoloir) pendant tout un acte via son personnage aveugle qui a marqué les spectateurs par ses propos pleins d'ironie et de satire. A travers cette pièce, Taoufik Jebali nous a montré qu'il est resté fidèle à son théâtre et son style, mais surtout à ses principes et son engagement. Il reste toujours cet artiste qui nous fait rire de nous-mêmes en pointant du doigt nos blessures.