Le projet de construction de 30 mille logements sociaux, entre 2012 et 2013, annoncé par le chef du gouvernement, en mai dernier, et présenté avec moult détails dans l'édition de La Presse du 16 juillet, a suscité l'intérêt des professionnels du bâtiment et des architectes et surtout leur étonnement, « celui de ne pas avoir été associés aux différentes étapes précédant la réalisation du projet». Tout en reconnaissant l'importance économique et sociale du projet, qui représente un investissement de 1.400 MD, « un des plus importants dans l'histoire de la Tunisie », des architectes ont exprimé le mécontentement de la profession «d'être écartée du projet » et souligné leur volonté de contribuer à sa réalisation et à la construction de la Tunisie post-révolution. « Ce projet doit bénéficier aux Tunisiens, car il est en mesure de résoudre un bon nombre de problèmes liés à la conjoncture actuelle difficile comme le chômage, la précarité et la crise économique, et, le cas échéant, celle du secteur du bâtiment », indique M. Moncef Souissi, architecte de carrière (65 ans) qui a consacré sa longue vie professionnelle à la conception de nouveaux procédés de construction. « Faux plancher léger », une technologie tunisienne simple, efficace et compétitive L'inventeur du « Faux plancher léger » (2006), une nouvelle technologie de construction en préfabriqué, brevetée à l'échelle internationale, intéressant des acquéreurs dans nombre de pays arabes, moyen-orientaux et européens, sait de quoi il parle. La nouvelle technologie que le ministère de l'Equipement compte importer pour construire les logements sociaux, du préfabriqué, M. Moncef Souissi en détient le secret et la primeur. Il a inventé un système de plancher léger et de cloison révolutionnaire aux caractéristiques uniques: isolation thermique et acoustique, antisismique, non polluant et facile à installer. Le procédé joint savamment la simplicité et la qualité. « Le produit posé est un produit fini qui n'a pas besoin de retouche », précise l'architecte-inventeur. Une technologie tunisienne compétitive pouvant entraîner une réduction de 40% du coût du logement (par rapport à la construction classique), d'installation très rapide et utilisant des matériaux locaux. Le matériau de base est le plâtre, un matériau naturel existant en très grande quantité dans les régions de Gafsa, Gabès et Kasserine. Sollicité par divers pays arabes et moyen-orientaux (Iran, Yémen, Algérie et Afrique de l'Ouest), l'inventeur envisage d'entrer en production avec des industriels espagnols, français et turcs. Mais le projet des 30 mille logements sociaux en Tunisie l'interpelle : « Je n'ai qu'une motivation, celle d'aider mon pays à réaliser un tel projet au moindre coût et en un temps très court», affirme-t-il. Et pour cela, l'architecte ne manque pas d'idées. Pour produire localement la technologie, cinq à six usines peuvent être montées rapidement, en préfabriqué, à Gafsa, Gabès et Kasserine. Les matériaux sont locaux : le plâtre (amortisseur de bruit, régulateur de température et coupe-feu) est présent en grande quantité dans le bassin minier ; le ciment (en petite quantité) et le polystyrène expansé non polluant. L'architecte estime qu'en utilisant la technologie tunisienne, le projet sera de type intégré : création d'emplois, formation de la main-d'œuvre sur place et impact économique et social au niveau des régions. Revendications des professionnels Rappelons que le projet des 30 mille logements, destiné aux catégories à faibles revenus, repose sur deux composantes, l'une consacrée à l'élimination des logements rudimentaires (environ 10 mille) et leur remplacement par des logements décents et l'autre visant la construction de nouveaux logements sociaux dont le prix est estimé à 35 mille dinars l'unité. Des modalités de paiement avantageuses sont prévues pour les familles bénéficiaires de ces logements. Le délai est fixé à septembre prochain pour le dépôt des dossiers de candidature auprès des communes. Les listes des ménages sélectionnés sont, elles, affichées au siège des délégations. Considérant les difficultés de la conjoncture économique et sociale actuelle, les architectes appellent le ministère de l'Equipement et de l'Habitat à accorder la priorité à la technologie tunisienne et aux architectes et ingénieurs tunisiens pour la réalisation de projet. Ils souhaitent que l'appel d'offres international, prévu comme l'exige la procédure pour des projets de cette dimension, tienne compte des capacités nationales en technologies nouvelles, des compétences tunisiennes et de la force de travail locale. Ils appellent également le ministère de l'Equipement à associer le conseil de l'ordre des ingénieurs et celui des architectes dans la sélection des choix et les prises de décision.