Pour le bureau fédéral qui vient à peine de mettre les pieds à l'étrier, l'examen d'aujourd'hui est de choc et le défi de taille après un début de mandat en dents de scie, mi-figue mi-raisin, voire morose, pour ne pas due très en-déça des promesses tenues. Le rendez-vous avec les clubs pros, ceux-là même qui ont porté les membres de ce bureau sur le podium des élections, a pour but à peine voilé de retrouver, et plus exactement de reconquérir leur confiance, d'apaiser et de redonner calme et sérénité à un paysage sportif délétère, dynamité par une série de faux pas administratifs, de décisions aussi controversées que surprenantes qui ont suscité à leur tour des réactions incongrues, choquantes, faites sur un ton pas simplement inquisiteur mais accusatoire et accusateur. La grogne — pourquoi ne pas le dire — est en train de monter de plusieurs degrés et le feu risque même d'être à la maison. Changement de casting sans changement de cap La coupure et le report d'une fin de championnat haletante de la Ligue 1, le gain de plus d'un match par pénalité, les dernières décisions de la Commission nationale d'appel et du Cnas de faire rejouer des rencontres après des mois de leur déroulement, le scandale du dernier examen des arbitres entraînant le limogeage de Nacer Kraïem et de Mohamed Salah Ben Miled, autant de faits saillants qui ont mis de l'huile sur le feu et jeté un climat de suspicion et de doute qui a touché de plein fouet la crédibilité même de la compétition. L'élection du bureau fédéral a, certes, amené quelques hommes nouveaux et un sang quelque peu neuf, mais la méthode et les outils de travail, la gestion des problèmes du jour ou de fond, les objectifs que ce soit pour le court ou le long terme, n'augurent pas d'un réel changement de cap, pas même d'un changement dans la continuité. La FTF et ses organes administratifs (ligues) et juridictionnels (commissions) jouent en solo avec les faux pas et les camouflets que l'on sait. Les organes juridictionnels confiés essentiellement à des juristes, purs technocrates et monstres froids du droit, ont montré leurs limites. Les organes sont apparus jusqu'à maintenant déphasés, déconnectés de la dure réalité de notre foot, de notre professionnalisme et des difficultés et problèmes qu'il vit. Terrain miné qu'il est, ce foot a aussi besoin d'hommes de terrain, de caractères bien trempés, habités pendant des années par le rôle et la fonction au sein des clubs car chaque pas compte et chaque décision doit être prise avec le plus grand soin et la plus grande des précautions. Et une décision lourde de conséquences, ça se prend à temps ou ça ne se prend pas. Ainsi on ne fait pas rejouer un match d'importance après plusieurs semaines, voire des mois d'hésitation, de tergiversations, alors que les dés sont sur le point d'être jetés, ouvrant ainsi la voie à des interrogations qui sont en train de dégénérer en contestations véhémentes, voire en accusations directes. Egalité des chances et équité La crédibilité de notre championnat n'est plus un sujet tabou et la peur qu'il soit faussé est réelle. Les 16 équipes de la Ligue 1 ne sont pas et ne peuvent être à armes égales. Ce n'est plus logique dans un football qui n'est plus amateur de remettre en question, de recoudre et de refaire un résultat acquis sur le terrain par le jeu pour une faute administrative commise par... la FTF ou la LNFP. Ça ne se fait pratiquement dans aucun championnat de ce monde, hormis les cas flagrants de fraude, ce qui n'est pas monnaie courante. L'abrogation de l'article 213 des règlements généraux de la FTF qui indique QUE «toute faute ou erreur commise par un responsable ou un organe de la FTF dans l'exercice officiel de sa fonction doit entraîner à faire rejouer le match comme seul moyen de réparer ladite faute...» est plus que jamais une nécessité car faire rejouer un match, ça s'applique et ça ne peut se faire qu'en football amateur où les enjeux sont dérisoires, pas chez les pros. Ce n'est pas logique également que le non-paiement des amendes de dirigeants, d'entraîneurs ou de joueurs ayant purgé leurs matches de suspension peut entraîner la perte d'un match gagné sur le terrain. C'est du pur et simple racket sportif. Les amendes impayées, on les majore à cinquante, voire à cent pour cent pour pousser les clubs à les payer dans les délais, mais on ne les transforme pas en moyens illicites et lugubres de changer le résultat de 90 mn de jeu, de modifier le haut, le ventre mou et le bas du classement, ce qui ne peut que ternir la compétition, la décrédibiliser et donc la dévaloriser. L'alinéa B de l'article 108 de la réglementation du football professionnel doit donc être supprimé car il est en pleine contradiction avec l'article 46 du Code disciplinaire qui se limite à «la majoration de 50% des amendes non payées dans les délais...». Le classement d'un championnat qui se respecte doit donc se faire selon un seul barème: les scores finaux inscrits au tableau d'affichage et sur la feuille de match. Ce n'est qu'ainsi qu'on peut assurer l'égalité des chances et l'équité que ce soit pour la consécration ou pour le maintien et qu'on fait de beaux vainqueurs et de beaux perdants. Le play-off et le play-out : un saut dans l'inconnu A l'ordre du jour de cette AGO, un long débat s'ouvrira également sur la répartition du championnat de la Ligue 1 de la saison 2012-2013 en deux poules de 8 avec play-off et play-out. Cette proposition ne fait pas l'unanimité. D'abord, elle n'est pas d'une grande utilité sur le plan sportif et technique avec 8 équipes sur 16 (les 3e, 4e, 5e, 6e de chaque poule) à avoir à la fin de la saison 14 matches réels de championnat et 1.260 minutes de jeu dans les jambes, soit l'équivalent de trois mois et demi de compétition pleine sur dix. Les huit équipes seront condamnées à des mois de chômage quasiment forcé et qu'on ne compte pas surtout sur une coupe de la Ligue sans réel enjeu pour meubler ce vide. Comment maintenir la forme physique et la mobilisation mentale des joueurs de ces équipes pendant cette longue période d'inactivité et où trouver, en l'absence de matches officiels, de public, de couverture médiatique et de sponsors, les rentrées d'argent nécessaires pour honorer tous les engagements financiers envers des joueurs sous contrat au moins jusqu'au 30 juin. Pour les quatre équipes qui joueront le play-off et les quatre équipes qui joueront le play-out, le danger est que les matches qui les opposeront ressembleront plus à des matches de barrage, avec des duels à couteaux tirés où il n'est pas exclu que la violence vienne jouer les trouble-fête et fasse des ravages. Et quand on sait que même le huis clos décrété cette saison ou plutôt la saison qui ne s'est pas encore écoulée, n'a pu empêcher ce phénomène dévastateur, on ne peut que craindre des lendemains qui déchantent. Non à la mort de la Ligue 2 ! Répartir la Ligue 2 de façon définitive en deux poules nord et sud de 10 équipes, c'est signer un arrêt de mort du professionnalisme dans cette ligue. Une mort lente et à petit feu. La couverture médiatique de ces 20 clubs est impossible, et quand on dit absence médiatique, ça signifie automatiquement une fuite des sponsors, donc un manque à gagner fort important et significatif et des matches qui se joueront dans l'ombre, à l'abri des caméras et où tout sera permis. Bref un champ fertile en risques et en dangers. Cette ligue sera petit à petit banalisée et le football qu'on y pratiquera ne sera pas loin du football de quartiers. Les clubs de la Ligue 2 semblent déterminés à défendre bec et ongles une ligue unique avec un allègement du cahier des charges et une révision à la baisse des rémunérations de leurs joueurs. Le bras de fer entre la ligue et la FTF sera intéressant à suivre.