• La commission de la législation générale saisie de nouveau Une plénière s'est tenue hier à l'ANC, avec à l'ordre du jour, débats et votes du projet de loi fondamentale portant sur la création de l'instance provisoire de la justice. La séance, très mouvementée, a débouché sur un blocage total sans la moindre adoption d'une quelconque disposition. Des votes relatifs à l'article premier se sont soldés tous par des rejets. Le projet de loi revient donc en commission. Une séance animée et tendue La commission de législation générale et les présidents des groupes parlementaires, sous la férule de Mustapha Ben Jaâfar, s'étaient réunis en vue de «rapprocher les points de vue» des différentes parties. Le but de cette réunion convoquée in extremis avant la plénière étant de trouver une formulation consensuelle des articles litigieux qui ont préalablement requis de longues et vaines discussions dans l'hémicycle. L'article premier ou le duel L'article premier du projet de loi fondamentale stipule la création d'une instance provisoire de la justice qui remplace le Conseil supérieur de la magistrature. La première mouture de cet article prend soin de supprimer le vocable « indépendante ». Or une deuxième proposition mentionne clairement le caractère indépendant de cette instance et stipule son autonomie morale, administrative et financière, et en conséquence, garantit sa totale indépendance par rapport au pouvoir exécutif, en l'occurrence le ministère de la Justice. Ces articles n'ont pas été adoptés et ont débouché sur une polémique technique et juridique sans fin quant à l'interprétation des articles 92/95 de la petite constitution réglementant les procédures de vote. Selon qu'il faille adopter le projet de loi à la majorité absolue ou à la majorité des présents. Maya Jribi : des standards internationaux découlent du qualificatif «indépendante» Cette divergence de points de vue portant sur l'indépendance ou non de l'instance a été annoncée avant le démarrage même de la plénière par Maya Jribi, constituante du parti El Joumhouri. Le bloc démocratique insiste sur le caractère indépendant de l'instance qu'il faut mentionner clairement, estime-t-elle, et cela ne tient pas uniquement à la forme. Mais il faut savoir, enchaîne-t-elle, qu'à partir de la dénomination, il y a des standards internationaux qui en découlent et que tout le monde se doit de respecter. C'est pour cela qu'on y tient, insiste-t-elle. Nous sommes là pour faire preuve de patience et de souplesse et faire des concessions de part et d'autre. Mais l'essentiel est que l'instance soit indépendante, il y va de son nom et de sa composition et de la manière de désigner ses membres et d'assurer son autonomie financière et morale. Ce sont les points autour desquels s'articule le blocage, conclut-elle fermement. Les lois du nombre Le bloc démocratique a essuyé des revers lors du vote quant à l'octroi à l'instance de la justice d'une quelconque indépendance la soustrayant du pouvoir exécutif. Puis la majorité conduite par le parti Ennahdha a, à son tour, subi une défaite puisqu'elle n'a pu faire passer ce fameux article premier dans la mouture voulue. C'est-à-dire la création d'une instance qui soit «provisoire» et qui se charge de gérer l'ordre judiciaire, et donc la carrière des magistrats, en supprimant dans son appellation le qualificatif «indépendante ». Le nombre des votants n'a pu atteindre les 109 requis. Or il s'agit d'un article qui, pour être adopté, requiert la majorité absolue de la Constituante, composée de 217 membres. Des accusations ont alors fusé de part et d'autre. Quand les uns avaient déclaré que ceux qui ont voté contre la création de l'instance sont contre l'indépendance de la justice, le bloc de l'opposition, par la voix de Mohamed El Hamdi, leur a rétorqué qu'on ne peut vider l'indépendance de sa substance en votant contre l'autonomie financière, administrative et morale et même contre la dénomination «indépendante» et donner par la suite des leçons. Au final, c'est la création même de l'instance qui est donc remise en cause, en l'absence de tout vote favorable. Le ministre de la Jsustice Nourreddine Bhiri présent dès le début, avait pressé l'Assemblée de surmonter les divergences pour trouver une issue de sortie. Mustapha Ben Jaâfar qui a eu du mal à maîtriser la salle, et structurer les interventions d'ordre organisationnel qui ponctuent inlassablement tous les débats, a levé la séance en donnant rendez-vous aujourd'hui à 13h. Et ce, dans l'espoir de trouver un consensus pour que le projet de loi soit voté article par article, ensuite globalement, pour être enfin adopté.