Hassiba Rochdy, dont la Tunisie fêtera bientôt le 40e jour du décès, aura été l'artiste qui a le plus brillé à l'étranger comme dans son pays, dans la chanson comme dans le cinéma. Suite et fin d'un parcours d'exception. Le premier rôle de Hassiba Rochdy sur les planches, elle le joua dans la pièce Abderrahmane Ennaceur. En même temps, un cithariste, appelé Nabli, lui apprit les «mouachahat» et les «adwar». Entre-temps, la grande vedette de la chanson, Fethia Khairi, va donner un récital à Sfax, et fait connaissance avec Hassiba. Elle lui conseille de s'installer à Tunis où elle aura beaucoup plus de chances de se faire connaître. Ce que Hassiba accepta de faire. Très vite, elle deviendra une artiste confirmée, à l'égal de Fethia Khaïri. Sur invitation de Béchir Ressaïssi, elle ira à Paris enregistrer des disques. Ce sera l'occasion pour elle de nouer des relations profondes avec Mohamed Triki, le chef d'orchestre de la troupe ayant effectué le voyage en France, aux côtés de Brahim Salah à la cithare, Mohamed Jamoussi au luth... cette relation finira par un mariage, le second de Mohamed Triki qui va constituer une troupe rien que pour sa dulcinée, composée de Ali Sriti (luth), Kaddour Srarfi (violon), Brahim Salah (cithare)... Taht el yasmina fellil, Lamouni elli gharou menni, Yetfi nari seront autant de succès partagés par Hassiba avec Hédi Jouini. Brooklyn, Paris et le Caire Mais ce mariage ne durera pas longtemps, Hassiba se remarie par la suite avec Henri Black, l'adjoint du consul américain en Tunisie. Cela l'amena à aller s'installer à Brooklyn, à New York, puis à Paris où Hamadi Ben Jemaâ,un restaurateur tunisien installé là-bas, lui confia une mission secrète pour le compte du mouvement national. Elle devait remettre au Caire des documents à Habib Thameur, réfugié dans la capitale égyptienne. Tenant au Caire des soirées très courues par le gratin du monde des arts égyptiens, elle connut ainsi Sayed Chatta qui l'a convaincue de faire un test devant Oum Kalthoum et Ryadh Sombati à Radio le Caire, test qui s'avéra concluant. La Radio lui réserve à partir de là un concert hebdomadaire sur ses ondes. Elle animera des galas publics à Hadiket El Andalouss (le jardin de l'Andalousie), où elle reprend des titres tunisiens et égyptiens. Au même programme, figuraient des artistes confirmés tels que Mohamed Abdelmotalleb ou encore Raja Abdou. Le grand poète Ahmed Jawdet lui écrit Dhahit bel ômr (j'ai sacrifié ma vie), composée par Ahmed Abdelkader, un musicien égyptien en vogue en ces temps-là. Place au cinéma Après la chanson à Radio le Caire et aux concerts publics, notre vedette trouva sa place également dans le septième art. Elle joua dans quatre films, aux côtés de grands comédiens égyptiens : - Hob (amour) réalisé par Abdelaziz Hassine en 1948, avec Férid Chawky et Mohsen Sarhane. Dans ce film Hassiba a chanté deux tubes tunisiens Yelli dhalemni de Ali Riahi et Lamouni elli gharou méni de Hédi Jouini. Tarik échouk (Le chemin des épines) produit en 1950, réalisé et interprété par Husseïn Sedky, aux côtés de Lola Sedky, Férid Chawky Astiphane Rousty et Mahmoud Choukoukou. Dimâ fi essahra (Du sang au sahara) réalisé par l'Italien Frantescho en 1950 et interprété par Imad Hamdi, Husseïn Ryadh, Siraj Mounir et Brahim Omara. Intikam el habib (la vengeance de l'amant) réalisé par le même Frantescho en 1952, produit par la société Ali El Jabri et joué par Yahia Chahine, Samia Jamel, Férid Chawky et Siraj Mounir. Outre les films égyptiens, Hassiba joua dans des films tunisiens. Nous en citons Jha de Jacques Baratier avec Omar Sharif, Zohra Faïza et Zina. La première de ce film eut lieu au festival de Cannes 1958, où Jha obtint le Prix du jury pour son originalité poétique et la qualité exceptionnelle des dialogues. Il y eut également Khlifa Lagraâ (Khlifa le teigneux) de Hamouda Ben Halima, avec Rached Khémis, Mouna Noureddine, Wafa Salem et Raja Lajimi. Ce film a été produit par la RTT et la Satpec en 1968-69. Hassiba joua aussi dans Al Moutamared (le rebelle) de Omar Khlifi, avec Habib Chaâri, Tahar Haouas, Zohra Faïza et Mohamed Lassoued (1968) ; ainsi que dans Tahta matar el Kharif (sous la pluie de l'automne) de Ahmed Khéchine, avec Chedly Belhaj, Khadija Jhinaoui, Habib Chaâri et Fethia Hammami (1969). Elle fut, enfin, à l'affiche dans Sourakh (hurlements) de Omar Khlifi, avec Mohamed Darragi, Anissa Lotfi, Salwa Mohamed, Zohra Faïza et Jamila Ourabi (1972). Hassiba a écrit la dernière page de sa vie fin septembre 2012, quand elle tira sa révérence dans la discrétion la plus totale à l'âge de 94 ans.