Plus que par la défaite et la perte du titre, les supporters de l'Espérance ont été «choqués» par le jeu de leur équipe Il faut d'abord rendre à César ce qui lui appartient et à Al Ahly ce qu'il mérite : quelle belle équipe! Quels heureux joueurs! Quelle rage de gagner et quel jeu! Al Ahly a, en tout cas, prouvé deux choses à la fois: qu'on peut jouer une finale et qu'on peut la gagner. Ceci pour rétablir une vérité fondamentale en football : tout vient par le jeu. On peut évidemment faire une variation sur un thème, tenir compte de l'adversaire, faire appel à la tactique et à la stratégie, mais on ne peut défigurer le jeu de son équipe et utiliser les joueurs comme des pions au nom d'on ne sait quelle tactique, d'on ne sait quelle stratégie... C'est que de mémoire d'Espérantiste, l'équipe de Bab Souika n'a jamais joué de la sorte, jamais évolué d'une manière aussi négative et aussi passive. Même au pire de ses moments. Et l'on s'étonne que cela arrive aujourd'hui que l'Espérance est au top sportif et financier. Nous connaissons en effet peu d'entraîneurs qui travaillent avec un président qui ne leur refuse rien. Pourquoi s'en être privé? Le jeu de l'Espérance, on en a parlé avec plein de techniciens et surtout avec plusieurs ex-joueurs de l'Espérance qui ont tous la même réponse «Non, nous n'aimons pas du tout; on ne reconnaît pas le jeu de notre équipe, mais les résultats sont là et personne ne peut les contester. Mais il est aussi vrai que l'équipe est toujours sur le fil et parfois même au bout de la rupture». Revirement à 180 degrés Le constat est d'autant plus désolant que l'Espérance a gagné autrement par des temps très lointains. Tenez, lors de l'édition écoulée, l'Espérance a exprimé un excellent volume de jeu qui a enthousiasmé supporters et observateurs. Et qui lui a valu son second titre continental. A l'orée de la nouvelle saison, l'équipe de Bab Souika s'est renforcée et tout le monde était en droit de s'attendre à une meilleure Espérance. Non seulement cela n'a pas été le cas, mais le jeu de l'équipe s'est ultérieurement détérioré et le champion d'Afrique en titre a évolué, tant en demi-finale qu'en finale, en challenger. Sans aucun mobile apparent. Et dans tout cela, personne n'a cherché à savoir auprès de l'entraîneur de l'Espérance les raisons d'un revirement à 180 degrés au niveau de sa philosophie de jeu. Lui non plus n'a jamais donné de réponse. Tout le monde a été floué par les résultats alors que l'issue finale (ce qui est arrivé à l'Espérance samedi devait arriver un jour ou l'autre, à cause justement de ce nouveau football défensif et négatif) se profilait dans les chiffres, surtout ceux de la demi-finale et de la finale aller. Zéro but à Lubumbashi, un seul à Radès par Ben Mansour, de surcroît litigieux. Un but, encore sur coup franc, encore d'un défenseur à Alexandrie. Samedi à Radès, première occasion à la 31e quand Al Ahly s'en était déjà créé une demi-douzaine. Comment peut-on en arriver là quand tous les clignotants étaient au vert dans un club où tout baignait? A part les résultats parfois trompeurs et qui n'annonçaient rien de bon, nous n'avons franchement aucune explication plausible à cette démarche qui a abouti à l'énorme désillusion de samedi soir. Ou si : l'Espérance a complètement raté la campagne de recrutements avec une défense à revoir, un milieu à réinventer et une attaque qui subira un coup de massue avec le double départ de Msakni et N'djeng. Le Camerouanis qui a terminé son parcours à l'Espérance, une fois à Lubumbashi, une fois à Alexandrie et deux fois à Radès, dans une immense solitude. Jeu et équipe à reconstruire, disions-nous, à cause de toutes les imperfections constatées tout au long du parcours de l'Espérance, avant même cette finale. Cela a un prix qu'on peut calculer, même si on ne donne jamais les chiffres dans le football tunisien. Mais le calcul n'est pas si compliqué que cela. Commençons par le manque à gagner entre finale de Champions League perdue et le train du Japon raté, il y a une perte sèche de près de 4 millions de dinars. Ajoutez-y recrutements (Ragued, Libré, Zouaghi, Blaïli, Clottey, Iheb Msakni, Seïfallah Hosni...), primes, salaires, etc. et vous aurez une idée approximative de la perte matérielle sèche. Ceci sans parler du préjudice moral pour un club et des supporters qui tombent de bien haut. Maintenant, projettons-nous un peu dans le futur proche et à moyen terme de l'Espérance. Passé maître dans l'art d'utiliser les médias et parfois même de les manipuler, quelle prochaine manœuvre de Nabil Maâloul? Restera? Partira? Et, dans tout les cas d'espèce, quelle réaction et quelle décision du président Hamdi Meddeb, qu'on sait très affecté par cet échec. Quel changement de cap pour quelle nouvelle stratégie, enfin, à l'Espérance? Les lendemains de défaite sont certes durs mais peuvent être porteurs de grands projets!