Un missile tiré depuis le Yémen s'écrase près du principal aéroport d'Israël    Où et quand voir ESS – El Gawafel de Gafsa en direct ?    Tunisie : Coupures d'électricité prévues ce dimanche dans trois gouvernorats    La Chine pose ses conditions avant tout accord commercial avec les Etats-Unis    Chine – Russie : Le président Xi Jinping attendu en Russie du 7 au 10 mai pour renforcer l'axe Pékin-Moscou    L'Allemagne, première destination des compétences tunisiennes en 2025    Ligue 1 : Où regarder le match CAB – Club Africain ce dimanche ?    L'Allemagne se prépare à durcir sa politique migratoire avec des expulsions accélérées et un contrôle renforcé des frontières    Démantèlement d'un réseau de trafic de drogue à Béja et Jendouba    Tunisie : Une mère et son fils arrêtés pour trafic de médicaments subventionnés à Ben Arous    France – Déserts médicaux et double discours : quand la politique réclame zéro immigration mais manque de bras    Fin d'une ère : À 94 ans, Warren Buffett annonce son départ    Les exportations turques atteignent un niveau record de 265 milliards de dollars    Tunisie : Décès du journaliste Boukhari Ben Saleh    Décès du journaliste Boukhari Ben Salah: Hommage émouvant du SNJT    Météo : Pluies orageuses attendues sur plusieurs régions en Tunisie    «Mon Pays, la braise et la brûlure», de Tahar Bekri    À partir du 6 mai : coupure d'eau potable dans ces zones de la capitale    Journée mondiale de la presse : l'ARP adresse ses vœux !    Tunisie – Les jeunes médecins décident une série de mesures d'escalade dont une grève de 5 jours    Trump se montre en pape sur son compte numérique    Des changements à la direction générale de BH Assurance    Les imams appellent à la censure du film « Dabouss El Ghoul » !    L'Espérance de Tunis s'impose 1-0 face au CS Sfaxien    France : un Prince qatari se baladait à Cannes avec une montre à 600 000 €, ça a failli mal tourner    Le chanteur libanais Rayan annonce sa guérison et rend hommage à la Tunisie    Le ministre des Affaires étrangères souligne que la diplomatie constitue aujourd'hui l'un des piliers de l'Etat moderne [Vidéo et photos]    Près de 144 mille élèves passeront le bac blanc à partir du 5 mai    Moins de plis, moins de fers : pourquoi les Français délaissent le repassage ?    GAT VIE : une belle année 2024 marquée par de bonnes performances    Des investisseurs qataris intéressés par Tabarka : la Tunisie séduit à nouveau...    Décès du producteur Walid Mostafa, époux de la chanteuse Carole Samaha    Affaire du gouverneur de Tunis : Enquête sur un cadre sécuritaire de haut niveau    La Télévision algérienne s'en prend aux Emirats Arabes Unis suite à un passage télévisé !    Alerte scientifique : le "monstre sous-marin" du Pacifique prêt à entrer en éruption à tout moment    Le Canal de Panama: Champ de bataille de la rivalité sino-américaine    Tunisie : Découverte archéologique majeure à Sbiba (Photos)    Entreprises délaissées – Saïed : « Fini les comités, place à l'action »    La STB Bank plombée par son lourd historique, les petits porteurs à bout !    Gymnastique rythmique : la Tunisie en lice au Championnat d'Afrique au Caire    Drame en Inde : une influenceuse de 24 ans se suicide après une perte de followers    Nouveau communiqué du comité de l'ESS    La Liga: Le Rwanda désormais un sponsor de l'Atlético de Madrid    Foire internationale du livre de Tunis 2025 : hommages, oeuvres et auteurs primés au Kram    L'Open de Monastir disparait du calendrier WTA 2025 : fin de l'aventure tunisienne ?    Ce 1er mai, accès gratuit aux monuments historiques    Par Jawhar Chatty : Salon du livre, le livre à l'honneur    Décès de la doyenne de l'humanité, la Brésilienne Inah Canabarro Lucas à 116 ans    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



«Beni Ouatani»
Opinions
Publié dans La Presse de Tunisie le 08 - 02 - 2013


Par Azza Filali
Aujourd'hui, on met en terre Chokri Belaïd, un homme de la Tunisie, militant des heures sombres, grand démocrate. Son courage, sa franchise, sa loyauté envers ce pays qu'il a tant aimé laissent en chacun de nous un mélange de chagrin et de colère. Cet assassinat vient s'ajouter à la liste des hommes lâchement tués pour leurs convictions politiques.
Six février 2013, huit heures du matin, ciel couvert. Chokri Belaïd sort de chez lui, monte dans sa voiture. Quatre coups de feu dont une dans la tête. Sur le siège, une flaque de sang rouge vif. Du nord au sud, le pays s'embrase, des foules envahissent les rues. L'homme avait quarante-huit ans.
Cinq décembre 1952, huit heures du matin, ciel couvert. Farhat Hached sort de chez des amis, monte dans sa voiture. Deux coups de feu dans la tête. Un assassinat en deux temps. La voiture est abandonnée, le cadavre découvert dans un fossé, du côté de Fouchana. Le pays entier se sent orphelin. L'homme avait quarante-deux ans.
Etrange similitude dans les faits. Les tragédies se répètent parfois dans leurs plus infimes scénarios. Dans les deux cas, ces hommes avaient reçu des menaces qu'ils avaient occultées, ils avaient tous deux refusé les gardes du corps. Pour les deux, un assassinat commandité, organisé, programmé. Autre point commun : les deux victimes avaient franchi une ligne rouge qui rendait leur suppression impérative. Quelques jours avant sa mort, Farhat Hached devait se rendre au congrès de la CISL, pour mettre la France coloniale au banc des accusés. Chokri (dont le franc-parler dérangeait déjà) avait clamé sur les ondes le nom des « casseurs » de la réunion de son parti au Kef.
La similitude ne s'arrête pas là. Hached avait contre lui un ennemi qui venait du dehors, et foulait aux pieds la tunisianité dans ce qu'elle avait de plus précieux : sa liberté, ses valeurs, sa dignité. Belaïd a, lui aussi, été la cible d'un « ennemi extérieur » : un wahhabisme djihadiste dont le but avoué (et sanctifié par les autorités) est de détruire l'essentiel de l'identité tunisienne. Ce wahhabisme prône une idéologie la plus éloignée possible de nos valeurs. Le drame réside dans le fait que ces valeurs non tunisiennes s'incarnent dans des Tunisiens endoctrinés, et clamant (sur la sphère publique et dans les réseaux sociaux) la légitimité de la violence... Depuis plusieurs mois, notre Tunisie modérée vit au quotidien une violence qui va crescendo: agressions verbales puis physiques sur des journalistes, des personnalités politiques ou intellectuelles, perturbation des réunions de partis, destruction des mausolées à travers le pays... Tout cela a été rendu possible grâce à un « système » structuré d'embrigadement, via les prêches de certains imams de mosquée qui n'hésitaient pas à inciter au meurtre, au vu et au su du ministère de tutelle, lequel se contentait d'émettre quelques dénonciations aussi molles qu'inopérantes.
Le principal responsable de ce qui nous arrive est, sans conteste, le laxisme affiché du gouvernement face à une violence distillée et progressivement croissante. Aujourd'hui, cette violence a atteint son paroxysme, à savoir le crime organisé et des Tunisiens embrigadés sont prêts à tuer ceux qui osent défendre d'autres valeurs que les leurs. Pour eux, il n'y a pas de partenaires, uniquement des adversaires qu'ils diabolisent jusqu'à en faire des mécréants. Jusqu'à quel point ces valeurs importées qu'ils défendent ont-elles infiltré la société tunisienne ? La foule, immense, descendue spontanément dans les rues, à l'annonce de l'assassinat de Chokri Belaïd, prouve que le changement social visé par certains demeure utopique. Le véritable danger réside dans les groupuscules armés, exécutants d'ordres pouvant atteindre le crime.
La fin tragique de Chokri Belaïd a détruit l'équilibre bancal sur lequel les institutions du pays vacillaient. Désormais, rien ne sera pareil. En une journée, nous avons vu la première réunion commune de tous les partis d'opposition, la dissolution de la Troïka, l'annonce d'un gouvernement de technocrates. Cela va-t-il suffire ? En vérité, une priorité nous attend: le rétablissement de la sécurité dans le pays. Dissoudre les ligues de protection de la révolution (ce ramassis d'êtres de tout acabit que certains ont osé qualifier de conscience de la révolution...), repenser certaines nominations au sein des ministères de l'Intérieur et de la Justice, éclaircir ces rumeurs de liste noire de personnalités à « éliminer » et, le cas échéant, y mettre fin. Faire en sorte que tout citoyen, quels que soient son engagement et ses convictions, se sente en sécurité dans son pays. Tout le reste ne pourra venir qu'une fois ces impératifs garantis.
Fallait-il passer par le sang de Chokri Belaïd et la perte irremplaçable de ce grand patriote pour revenir à une cohésion nationale que la révolution aurait dû instaurer ? Pourquoi le prix à payer pour une Tunisie unifiée et pacifiste est-il si lourd ? Et que de remords et de chagrin nous assaillent à l'idée que Chokri, dont le dernier vœu était d'organiser un congrès national contre la violence, en a sauvagement péri ! La Tunisie n'oubliera pas, les Tunisiens n'oublieront pas, merci « Si Chokri» et paix à votre âme.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.