«La multiplication des textes et des conditions est de nature à préserver les intérêts du franchisé tunisien, la partie faible du contrat », argumente un responsable. Pour apprécier le niveau de développement du mode de commercialisation sous franchise, on se fie, généralement, au niveau de présence des grandes enseignes internationales, notamment de la restauration rapide. En effet, l'annonce de l'autorisation à un grand de la restauration rapide, « Pizza Hut», à s'implanter sous nos cieux confirme la levée du veto sur les marques étrangères. Mais ce n'est qu'un premier pas. Car, toujours selon cette analyse simpliste, basée sur l'énumération des marques, on apprend qu'aucun dossier n'a été présenté au ministère du Commerce pour représenter le premier restaurateur « Mc Donalds ». Loin des communications commerciales, cette situation nous renseigne que certaines activités sont soumises à des autorisations. En effet, c'est une situation intermédiaire entre le verrouillage et la libéralisation. «Cette phase transitoire permet d'affiner les évaluations et de voir s'il y a des mesures de sauvegarde à prendre pour une ultérieure libéralisation», explique M. Mohamed Ben Fraj, chargé de mission auprès du ministre du Commerce. Il est à noter, également, que la libéralisation des services avec l'Union européenne est d'actualité. Ainsi, le législateur a opté pour l'ouverture progressive du marché national. A la suite de cette étape transitoire, ou pilote, les bilans et les évaluations permettraient de mieux légiférer le domaine de la franchise. Et, plus généralement, la libéralisation des services. «Mais, durant des décennies de verrouillage, force est de constater que la représentation des marques était captée et assurée, quoique partiellement, par les opérateurs du Moyen-Orient», rappelle-t-il. Ce n'est que le 12 août 2009 que la réglementation tunisienne, notamment la loi n° 2009-69, s'est prononcée sur la franchise et a stipulé que «le contrat de franchise est un contrat par lequel le propriétaire d'une marque ou d'une enseigne commerciale accorde le droit de son exploitation à une personne physique ou morale dénommée franchisée, et ce, dans le but de procéder à la distribution de produits ou à la prestation de services, moyennant une redevance». Pourtant, l'exploitation des marques étrangères est une pratique de longue date sur le marché tunisien. Avant 2009, en l'absence de tout texte de loi, l'activité était considérée comme une dérogation à l'article 5 de la loi relative à la concurrence et aux prix. Ainsi, toute exploitation de marque, notamment étrangère, est sujette à une autorisation du ministre du Commerce, après avis du conseil de la concurrence. Dans une telle situation, le régime gère à sa guise l'accord des autorisations, les formes d'exploitation et les parts de marché. Ce qui a entravé l'implantation de plusieurs marques internationales, surtout dans le secteur de la restauration rapide, notamment l'américain «Mc Donalds». Pour ce qui est des marques nationales, «la franchise s'est développée sans de réelles entraves», relève le responsable. A cet égard, il convient de rappeler que quelques conditions contractuelles sont considérées comme des pratiques anticoncurrentielles, à savoir l'imposition des prix et la délimitation géographique de l'activité. Dans l'objectif de moderniser le commerce et les circuits de distribution, le ministère s'est engagé, depuis 2009, dans une série de lois, décrets et arrêtés, dans lesquels la franchise a vu le jour. A commencer par la loi n° 2009-69 du 12 août 2009 qui a défini le contrat de franchise et les obligations des deux parties, franchiseur et franchisé. Puis, un décret du ministère du Commerce du 21 juin 2010 a fixé les conditions minimales obligatoires des contrats de franchise et les documents d'information nécessaires. Enfin, un arrêté du ministère porte sur l'octroi systématique, à certains contrats de franchise, de l'autorisation. Une liste, ajoute le responsable, énumère les activités libéralisées. «La multiplication des textes et des conditions est de nature à préserver les intérêts du franchisé tunisien, la partie faible dans le contrat», argumente-t-il. D'ailleurs, entre autres conditions, le franchisé est appelé à fournir la liste des propriétaires, ou les représentants légaux de l'entreprise, ainsi que l'historique de son activité. Ceci est justifié par des pratiques courantes d'arnaques. En effet, certains opérateurs internationaux développent des marques fictives et une notoriété mensongère pour attirer des demandeurs de franchise, encaisser des redevances et se retirer du marché pour renouveler la pratique sous une autre dénomination. Par ailleurs, certains secteurs, précise-t-il, compte tenu de leurs spécificités ou de leur impact, n'ont pas été libéralisés, notamment le secteur agroalimentaire. «Mais ce n'est pas une situation de fermeture totale, la porte est ouverte aux demandes d'autorisations qui s'évaluent en fonction de l'ampleur du projet, notamment le lieu d'implantation, la valorisation des produits nationaux... ». S'attardant sur le commerce parallèle, il précise : «Les répercussions du commerce informel sont ressenties par tous les modes de distribution. Actuellement, il y a une stratégie pour contenir ce phénomène qui n'a cessé de prendre de l'ampleur depuis la révolution». Et de relativiser : «Mais, si on parle de la restauration, on ne peut pas considérer les restaurateurs populaires comme étant des opérateurs du commerce informel. C'est plutôt deux segments de marchés différents». Quel apport pour l'économie tunisienne? La franchise, même si elle est de création récente en Tunisie, connaît une évolution notable au cours des dernières années, notamment suite à la révision de la loi. Le gouvernement est conscient de l'importance de développer la franchise dans son schéma économique. En effet, le mécanisme de la franchise pourrait apporter plusieurs avantages au paysage économique et financer tunisien : -La compétitivité des entreprises tunisiennes -L'amélioration de la qualité globale -La diversification de l'offre -L'amélioration des équipements et de l'agencement -L'amélioration de l'infrastructure -L'amélioration du professionnalisme des petits commerces -Une meilleure négociation qui tendrait vers une baisse des prix -Des risques d'investissement moins élevés -La création d'emplois directs et indirects Depuis 2005-2006, la Tunisie intègre la franchise dans sa nouvelle vision de la stratégie de politique afin de pouvoir bénéficier de la modernisation de ses différents secteurs. Plusieurs amendements ont donc été menés dans ce sens : la révision de la loi 2009, la levée des contraintes, l'établissement d'une liste de secteurs libéralisés, la mise en place d'un régime spécial pour la franchise... Quoique les résultats ne soient pas à la hauteur des prévisions, la Tunisie s'est engagée dans une démarche progressive avec un système d'autorisations respectant certaines normes qui devraient permettre à la franchise de se développer dans un cadre bien spécifique. D'où la nécessité de faciliter l'octroi des autorisations sachant que le secteur bancaire contribuera prochainement à l'investissement dans la franchise. Les franchisés estiment également que la libéralisation touchera tous les secteurs car les 26 secteurs actuellement autorisés pour l'importation d'une franchise étrangère sont trop limitatifs. N.H.