Le paysage politique national n' en finit pas, décidément, de se composer et de se recomposer, au gré des dissidences des uns et des démissions des autres qui quittent leurs partis pour aller chercher ailleurs. A la lumière des tractations qui ont accompagné la formation du gouvernement Laârayedh, on a assisté à une fronde au sein d'Ettakatol conduite par ceux qui ont refusé les miettes que leur parti a récoltées au sein du nouveau gouvernement. Du côté du CPR, Mohamed Abbou a fini par claquer la porte définitivement pour annoncer la création imminente de son propre parti. Le mouvement Wafa a connu lui aussi sa crise de dissidence puisque trois de ses membres, parmi lesquels deux constituants, ont quitté le parti et cherchent aujourd'hui à se repositionner au sein «d'une grande mouvance laïque et démocratique qui pourrait émerger dans les semaines à venir», pour reprendre les propos d'un constituant. Quant à la coalition attendue entre Ettakatol et l'Alliance démocratique, elle fait désormais partie du passé dans la mesure où «le parti du Dr Mustapha Ben Jaâfar nous a fait la mauvaise surprise, en dernière minute, de rester au gouvernement, ce qui a eu pour conséquence de faire avorter le projet de coalition qui a réalisé une grande avancée», comme le souligne l'un des responsables de l'Alliance démocratique. Où en sont les concertations, aujourd'hui, entre les divers dissidents qui sont sur le point, d'après certaines indiscrétions journalistiques, de se rassembler dans une coalition aussi large que possible qu'ils qualifient de «troisième voie ayant pour ambition de former un pôle qui aura pour mission de lutter contre la bipolarisation imposée par Ennahdha, d'une part, et l'Union pour la Tunisie, d'autre part ?» Des concertations préliminaires Mahmoud Baroudi, membre du bureau constitutif de l'Alliance démocratique, reconnaît que «les concertations ont déjà démarré, mais d'une façon préliminaire, avec les dissidents du mouvement Wafa et d'Ettakatol. Au sein de l'Alliance démocratique, nous sommes ouverts à tous ceux qui partagent nos thèses. Pour le moment, rien de concret ne peut être annoncé. Seulement, la grande mouvance démocratique et laïque que nous projetons de mettre sur pied et qui constituera une troisième voie proposée aux Tunisiens pourrait voir le jour dans les semaines à venir au cas où nos pourparlers aboutiraient à une plateforme commune». Y a-t-il des négociations avec Mohamed Abbou ? «Pour le moment, rétorque notre interlocuteur, il est prématuré d'engager un dialogue avec l'ex-secrétaire général du CPR, dans la mesure où sa vision n'est pas encore claire et qu'on ne sait pas encore s'il va se ranger du côté de l'opposition ou s'il va choisir d'accorder son soutien au gouvernement. Au cas où il trancherait ses positions et se positionnerait du côté de l'opposition, nous ferons tout pour que son parti rejoigne notre mouvance». Mahmoud Baroudi tient à faire remarquer que «les discussions qui se déroulent à l'heure actuelle sont des discussions préliminaires qui attendent pour mûrir». La mouvance engloberait même le Front populaire De son côté, Naceur Brahmi, constituant dissident du mouvement Wafa, confirme: «Oui, il existe des discussions avec ceux qui ont quitté Ettakatol, avec l'Alliance démocratique et même avec le Front populaire». «Notre objectif, ajoute-t-il, est de favoriser l'émergence d'une mouvance laïque et démocratique qui englobera, en plus des dissidents d'Ettakatol et de Wafa, des personnalités politiques indépendantes au sein de l'Assemblée nationale constituante, outre l'Alliance démocratique. Nous irons jusqu'à impliquer le Front populaire avec lequel nous sommes en concertation. La participation à cette mouvance, parmi les démissionnaires du mouvement Wafa, ne se limitera pas à ma personne ou à celles de Mme Hasna Marsit et Larbi Ben Hamadi. Elle intéresse également plusieurs parmi les cadres des instances régionales du mouvement Wafa qui ont quitté le mouvement et sont intéressés par les concertations en cours». «La mouvance à naître dans les prochaines semaines se positionnera entre les deux pôles qui dominent pour l'instant le paysage politique national, à savoir Ennahdha avec ses différentes ramifications et l'Union pour la Tunisie pilotée par Nida Tounès», précise encore Naceur Brahmi. A propos de l'éventuelle participation du futur parti de Mohamed Abbou, il relève: «Personnellement, je n'ai eu aucun contact avec lui. Une fois son parti constitué officiellement et ses options définies, nous pourrons voir s'il est disposé à nous rejoindre». Approché par La Presse, Mohamed Abbou précise qu'il n'a été contacté «par personne parmi celles qui conduisent les concertations en cours. Et au cas où nous serions invités à ces pourparlers, nous prendrons la décision qu'il faut». A propos de la date d'annonce officielle de la création de son parti, il confie : «Les concertations se poursuivent encore avec les personnalités qui feront partie du comité constitutif dont certains proviennent du CPR alors que d'autres appartiennent à diverses sensibilités. Nous prenons tout notre temps pour éviter toute précipitation. Nous tiendrons, samedi prochain, notre première réunion préparatoire».