Le président de la République provisoire, Mohamed Moncef Marzouki, a estimé que «le meilleur traitement contre la dictature consiste à consolider les mécanismes à même de conforter l'Etat de droit et de réduire la marge du pouvoir discrétionnaire et de l'arbitraire dans l'administration des affaires publiques, dans n'importe quel pays». Il a, également, mis en garde contre «l'absence de garde-fous censés empêcher le retour de la dictature et de l'arbitraire dans quelque société que ce soit». Marzouki s'exprimait à l'ouverture, hier au Palais de Carthage, d'un symposium international sur le thème «La création d'une Cour constitutionnelle internationale: un moyen d'empêcher la mainmise sur les institutions démocratiques». Il a souligné, à cette occasion, la nécessité d'instituer des structures internationales pour conjurer le retour de la dictature dans n'importe quelle société. Une Cour constitutionnelle internationale pourrait être une de ces structures là, d'autant que rien ne s'oppose à la concrétisation d'une telle éventualité», a-t-il dit. Après avoir rappelé la portée et les objectifs de la proposition tunisienne en faveur de la création d'une Cour constitutionnelle internationale, Marzouki a déclaré en substance: «Nombreux sont les peuples qui vivent encore sous le joug de régimes autocratiques qui ne respectent ni les droits de l'Homme, ni les garanties démocratiques. Même certains régimes supposés démocratiques sont coupables d'abus, en violation de leurs engagements en la matière, ce qui provoque de graves troubles politiques et sociaux pouvant dégénérer en violences». Le président de la République a appelé les représentants des instances internationales et les experts en droit constitutionnel international à contribuer à faire mûrir la proposition de créer une Cour constitutionnelle internationale, de manière à réunir les conditions de son adoption par l'organisation onusienne. «Nous demandons à tous les penseurs de présenter leurs suggestions au sujet de ce projet et leur disons que, pour faire mille pas, il faut bien commencer par faire le premier», a-t-il ajouté. De son côté, le secrétaire général de l'Institut international pour la démocratie et l'assistance électorale (Idea), Vidar Helgesen, a fait remarquer que la promotion des droits de l'Homme passe par le soutien à la proposition tunisienne en faveur de la création d'une Cour constitutionnelle internationale, «mais commande aussi, a-t-il argué, de remédier à certaines complications en rapport avec l'engagement des Etats à respecter les standards démocratiques en termes de transparence des élections, d'alternance pacifique au pouvoir et d'instauration de l'Etat de droit». Il a, également, relevé «un décalage entre les aspirations des peuples ayant fait la révolution contre la dictature et l'attitude de leurs gouvernements». Citant les exemples tunisien et égyptien, il a considéré que la proposition de création d'une Cour constitutionnelle internationale pourrait concourir à réduire une telle fracture. S'exprimant lui aussi lors du symposium, le représentant de la Fondation Konrad-Adenauer à Tunis a qualifié de «pionnière» l'initiative de la Tunisie en faveur de la création d'une Cour constitutionnelle internationale, raison pour laquelle, a-t-il indiqué, la Fondation l'a soutenue et parrainée. Il a en outre qualifié les révolutions du Printemps arabe de «sixième vague de la démocratie dans le monde». Le symposium a été marqué par une conférence de l'universitaire et constitutionnaliste Iyadh Ben Achour, qui a développé les objectifs et la portée de la proposition tunisienne relative à la création d'une Cour constitutionnelle internationale. Il a dressé, à ce propos, un parallèle entre l'initiative suisse pour la mise en place d'une Cour internationale des droits de l'Homme et la proposition tunisienne destinée à concrétiser les principes constitutionnels en matière de soutien à la démocratie dans le monde avec, en corollaire, la garantie d'élections transparentes et loyales et d'une alternance pacifique au pouvoir. Ben Achour trouve que la proposition tunisienne est «révolutionnaire et conforme à l'esprit de la révolution tunisienne, parce qu'elle a pour dessein de servir le projet démocratique de manière à ce que la réalité juridique concorde avec les vraies règles de la démocratie aux plan national et international». Le symposium, qui devait se poursuivre toute la journée d'hier, comportait trois workshops animés par des experts en droit constitutionnel international en provenance de pays d'Afrique, d'Europe, d'Asie et d'Amérique du Nord.