Banquiers, autorités et experts s'accordent à dire que la réussite de la réforme des banques publiques est tributaire de leur assainissement. La restructuration des banques publiques est bel et bien entreprise par les autorités publiques. Les rapports préliminaires des missions du full-audit et l'assistance technique des institutions internationales permettraient au gouvernement d'y voir plus clair. Un full-audit a été engagé depuis quelques mois pour éclairer les décideurs, des autorités financières, sur la juste valeur des portefeuilles des crédits, des garanties, ainsi que les forces et les faiblesses de ces banques. D'ores et déjà, plusieurs alternatives sont possibles et plausibles. Et à la lumière des rapports préliminaires des auditeurs, les autorités pourraient entreprendre un vaste chantier de transformation du paysage bancaire. Toutefois, toutes les parties prenantes, banquiers, autorités et experts, s'accordent à dire que la réussite des options est tributaire de l'assainissement préalable des trois institutions (STB - BNA - BH) et de leur dotation des ressources financières nécessaires. Du même avis, M. Laurent Gonnet, senior spécialiste du secteur financier de la Banque mondiale, a suggéré quelques idées, lors d'une réunion- débat organisée au siège de la Banque mondiale à Tunis. Le financier n'avance pas de solution figée pour les banques publiques, mais il soutient que «les autorités tunisiennes ont besoin d'une estimation de la qualité réelle des crédits, de la valeur réelle des garanties ainsi que des forces et des faiblesses des trois banques publiques». Sans chercher à prédire les résultats du full-audit et les décisions du gouvernement, le spécialiste avance quelques alternatives plausibles. La première consiste à transformer ces banques publiques en banques de développement qui, ainsi, continueraient leur rôle de soutenir les politiques de développement de l'Etat. Il est à rappeler que ces banques publiques avaient eu le mérite d'avoir accompagné et favorisé le développement économique du pays sur une longue période en finançant soit l'économie globalement, à l'image de la STB (entreprises publiques, commerce extérieur et intérieur, artisanat...), soit un secteur déterminé, comme l'agriculture pour la BNA, soit l'habitat pour la Caisse nationale d'épargne-logement, transformée ultérieurement en Banque de l'Habitat, ou la PME pour la Société nationale d'investissement devenue Banque de développement économique de la Tunisie (Bdet), ou encore le tourisme pour la Cofit, devenue Banque nationale de développement touristique, avant que ces deux dernières ne soient absorbées par la STB. Pour la deuxième, les autorités chargent une équipe ou une entreprise de gérer ces banques, par le biais d'un contrat de gestion, sans pour autant céder les parts de l'Etat. A l'échelle internationale cette alternative est la moins prisée. Elle se limite, souvent, au recrutement de dirigeants et de compétences confirmées pour assurer la mise à niveau du management de l'institution. A cet égard, les banques nationales, sous la tutelle du ministère des Finances, trouveraient du mal à recruter ces managers. Déjà, les entraves aux recrutements d'administrateurs externes dans ces banques en ont donné un avant-goût. La troisième est une cession d'un bloc des actions des banques à un partenaire stratégique. Toutefois, techniquement, le partenariat stratégique sera plus compliqué à identifier et à mettre en place pour trois institutions de faible taille à l'échelle internationale, que pour une seule de taille plus respectable. Sur le terrain, l'histoire du rachat de l'ancienne Banque de Sud par un groupe bancaire étranger a montré des résultats probants. L'expert insiste sur l'apport financier et technique du partenaire stratégique. «Un apport financier, c'est sûr ! Il faut qu'il mouille sa chemise», réitère-t-il. De plus, l'apport technique est de nature à mettre à niveau les compétences du personnel, les procédures de travail et la structure organisationnelle de l'institution. Pour ce qui est de la fusion, il est plutôt favorable à une restructuration séparée des banques avant une fusion à terme. «Une restructuration compétitive», qualifie-t-il. Par ailleurs, la fusion permet de constituer un pôle bancaire public de taille respectable, mais la taille n'a jamais entraîné systématiquement la performance. Les dysfonctionnements de fond relatifs à la faiblesse de la dotation de ces banques en ressources humaines de qualité, d'inadéquation de leurs systèmes d'information, d'absence de culture du risque ne seront pas réglés par la simple fusion des trois institutions. Mais il convient de préciser qu'un projet de fusion bien planifié, au niveau stratégique, opérationnel et qui renforce une culture commune d'entreprise, permet de doter la nouvelle entreprise d'une «taille critique» qui renforce la place de la banque sur le marché local et lui permet de jouer le rôle de «global players» surtout au niveau régional et international. Avec sa présence sur les marchés étrangers, la banque pourrait aider l'entreprise tunisienne à renforcer sa présence sur le marché international.