Dans l'entreprise, on peut donc mourir physiquement, moralement, intellectuellement et autres. Mourir ou s'acheminer lentement, mais inéluctablement vers l'une ou l'autre des morts déjà citées. C'est sans aucun doute la mort morale qui est la plus atroce parmi toutes ces fins aussi déplorables les unes que les autres. Il va sans dire que par «mort morale», nous entendons la disparition du «sens moral» chez le salarié toutes catégories confondues (exécution, maîtrise, encadrement supérieur), comme chez les détenteurs du capital, mais nous nous intéresserons à la perte du sens moral au cours et du fait de la vie en entreprise et suite aux situations quotidiennes vécues dans l'entreprise même. Résultat, propagation de l'injustice au sein de l'entreprise, la pire des situations qui puisse arriver à un groupe. Et qui dit injustice dit atteinte aux droits. Certains, plus que d'autres, sont exposés à ces risques et finissent souvent par y succomber. Tout devient alors permis. Mensonge, délation, faux témoignage, falsification… autant d'attitudes et de comportements négatifs qui ouvrent la voie à de graves problèmes relationnels. Ces derniers déboucheront à leur tour sur des problèmes organisationnels et managériaux pouvant devenir eux aussi graves et compromettre ainsi les performances de l'entreprise et son avenir. L'idée là est que certains peuvent perdre le sens moral à cause de situations récurrentes, à des cadences plus ou moins intenses et plus ou moins rapprochées. Certains, pour se protéger des agressions de ceux qui veulent grimper dans la hiérarchie en tordant le cou aux valeurs morales positives, se retrouvent hélas eux aussi en train de faire de même avec lesdites valeurs. D'autres, parce que repoussés à cause de propositions indécentes (sexuelles ou autres), réagissent en fabriquant de toutes pièces des rumeurs parfois attentant à l'honneur et à l'intégrité de leurs protagonistes. Une troisième catégorie succombe aux bassesses, disons par dévouement à un clan jugé fort ou allant le devenir et surtout au chef de ce clan. Bien sûr, dans la perspective de gains conséquents qui pourraient parfois s'avérer de simples miettes. Même ceux qui choisissent de rester en retrait par rapport à cette jungle verront leur sens moral s'émousser car le fait de se taire, après avoir été témoin d'une quelconque injustice est aussi une atteinte à la morale qui, en se répétant, ne peut que tuer le sens que chacun est tenu d'avoir de celle-ci. L'entreprise deviendra alors le creuset de tous types de violence. Ceux-ci feront vite de se retourner contre elle et, de là, porter atteinte à sa vie. Sans trop nous attarder sur les catégories qui sont par ailleurs nombreuses, disons tout de suite que cette injustice omniprésente signera la mort d'une valeur importante, l'appartenance à l'entreprise. Elle ouvre ainsi la porte, en plus de la démotivation, vrai fléau qui mine la productivité, à des crimes envers celle-ci (l'entreprise). Parmi eux, le fait de porter atteinte à l'image de l'entreprise, d'aider ses concurrents (absence de loyauté) autrement que dans la perspective du gain, disons par pure vengeance, le fait de bâcler le travail, les sabotages… La perte du sens moral due à plusieurs causes, telles que la cupidité, la lâcheté, la jalousie, la volonté de domination… peut donc causer la perte d'une entreprise. C'est le top management qui doit veiller à ce que ce fléau ne s'empare pas de l'entreprise. Il doit être toujours à l'affût des situations pouvant dégénérer en perte du sens moral, intervenir pour arrêter toute forme d'injustice et la faire suivre du couple punition-réparation. Punition de l'agresseur, réparation pour l'agressé. Le top management est tenu donc de mettre fin et de prévenir toute forme d'injustice et de violence en donnant l'exemple et en plaçant l'intérêt suprême de l'entreprise au-dessus de toute autre considération. Une lourde responsabilité qui nécessite, à côté des qualités morales indiscutables, des mécanismes efficaces pouvant briser le cercle vicieux des violences, favoriser la transparence des décisions, l'écoute constructive, les garde-fous contre toutes les formes d'abus, y compris celui, tellement complexe et sournois, de pouvoir.