Peut-on obtenir du beau jeu sur des terrains qui ressemblent à un champ de patates? «Une pelouse catastrophique, incroyable!». Deux ou trois fois, l'entraîneur du Club Africain, le Néerlandais Adrie Koster, reprenait sa remarque pour qualifier la surface sur laquelle venait de se produire son équipe, devant l'Union monastirienne. Il n'en revenait pas! Il ne pensait pas vraiment qu'en l'an 2013, on puisse encore pratiquer du foot de haute compétition dans un tel bourbier. Et qu'au bout de trois jours de fiévreuses investigations, on finirait par se rabattre sur une aire de jeu moyenâgeuse, décrépite, lépreuse et au final dangereuse pour la santé des joueurs. Le stade Ben Jannet de Monastir étant fermé, l'affiche USM-CA était annoncée une fois à Hammam-Sousse, une autre à Jammel, tantôt à Ksar Helal, tantôt à Mahdia. Il n'y a, en fait, aucune exagération sur la bouche des dirigeants de la Ligue professionnelle quand ils décrivent l'embarras dans lequel ils se retrouvèrent pour désigner un stade. Comble d'improvisation : ce n'était que vendredi que l'on décida d'avancer la partie pour le lendemain (car elle devait se jouer dimanche) à Ksar Helal. Pour des raisons sécuritaires, nous dit-on. Dans une Ligue passée depuis 1996 au régime pro, cela fait incontestablement désordre! Cet épisode traduit à certains égards les misères de l'infrastructure sportive. La moitié des stades sont fermés, soit pour travaux, soit parce qu'ils ne sont pas homologués. Suffit-il de multiplier les enceintes, les terrains gazonnés, les salles couvertes...? Longtemps, on avait misé sur la quantité au détriment de la qualité, oubliant que nos stades se trouvent à des années-lumière de ceux d'Europe, ou même d'Egypte, du Maroc... à un moindre degré, naturellement. Longtemps, on a négligé le volet vital de l'entretien, du suivi, de la maintenance, de la conservation... Et l'entretien? A cet égard, il n'y a qu'à voir dans quel état se trouvent les installations du stade de Radès, douze ans après son inauguration. Au sein du département de tutelle, réserver un office à l'entretien de l'infrastructure sportive relève d'une profonde conscience de l'importance de ce chapitre. Malheureusement, l'indécence le disputant au ridicule et le ridicule à l'indécence, la compétition paie aujourd'hui le prix de cette longue descente aux enfers d'une infrastructure relookée uniquement à certaines occasions, dont les plus importantes ont été les Coupes d'Afrique des nations 1994 et 2004 organisées par notre pays. Rien qu'au niveau de la Ligue 1, la seconde ville du pays, Sfax, attend depuis une éternité l'édification d'un complexe sportif moderne, le Stade Tunisien guette fiévreusement une bonne nouvelle touchant au complexe du Bardo, le gazon du stade 15-Octobre de Bizerte est «pitoyable», celui de Kairouan, Béja... n'est pas mieux loti. Bref, en plus de pelouses d'un autre âge, aucun confort, pas de commodités dans les gradins. L'infrastructure sportive accuse un retard considérable. Sans une œuvre de modernisation et de consolidation à ce niveau-là, le sport national ne peut pas décoller...