La Caisse nationale de retraite et de prévoyance sociale a enregistré un déficit de 200 millions de dinars au cours de l'année 2013. Son système de fonctionnement date d'avant la Révolution. Le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux a organisé, à l'occasion de la Journée mondiale de la justice sociale, célébrée le 20 février de chaque année, une conférence scientifique autour du thème «Sécurité sociale : réalités et défis» qui devait être sanctionnée, selon le programme proposé, par des recommandations. Celles-ci seront communiquées plus tard, selon les organisateurs. Les participants à cette conférence ont relevé que le système de sécurité sociale en Tunisie est non seulement devenu obsolète mais se caractérise par des défaillances au niveau de sa gouvernance. Le représentant du Ftdes envisage de mettre à contribution l'Ugtt pour l'élaboration d'une stratégie à long terme pour sortir de la crise et non recourir au rafistolage comme cela était toujours le cas. Pour sa part, le secrétaire adjoint de l'Ugtt, Abdelkarim Jrad, a mis l'accent sur le commerce informel qui est, selon lui, source de «nuisance» tant pour la fiscalité que pour les caisses de sécurité sociale dont le déficit est «alarmant», estime-t-il, proposant la mise à niveau du secteur de la santé et la recherche d'autres sources de financement pour ces caisses alimentées jusque-là par notamment les cotisations des salariés et les cotisations sociales patronales. Mehdi Ben Brahem, représentant du Haut commissariat aux droits de l'Homme, a indiqué que le rapport intitulé «L'approche basée sur les droits de l'Homme du système de sécurité sociale tunisien» qu'il a élaboré pour le compte du Hcdh a pour objectif principal d'imposer au système de protection sociale le respect de quatre principes d'ordre pratique relatifs à la transparence sur les programmes, le suivi et le contrôle de tous les acteurs, la non-discrimination des personnes concernées par les programmes sociaux et la participation de ces mêmes personnes à la mise en œuvre des différents dispositifs de protection sociale. Les avantages de cette approche est qu'elle met en place, selon Mehdi Brahem, «un système plus efficace dans la lutte contre la pauvreté et les inégalités, grâce à la création d'un cadre législatif consensuel obligeant les pouvoirs publics à respecter leurs engagements». L'intervenant ne nie pas les acquis, mais note qu'il existe un certain nombre de faiblesses comme par exemple le chômage et les congés prénataux qui ne sont pas couverts. La santé publique, maillon faible Badreddine Smaoui, directeur de la Caisse nationale de sécurité sociale a donné un aperçu historique sur l'évolution de «la sécurité sociale dans les secteurs étatique et privé», s'interrogeant au passage sur le développement de la sécurité sociale dans un pays qui vit actuellement dans une situation «fragile» tant politique que socioéconomique et propose d'ouvrir un débat national sur la question, d'autant plus que les inégalités entre les catégories socioprofessionnelles sont inquiétantes. «Il suffit à un député, un gouverneur ou un président de la République de travailler durant deux ans pour disposer d'une retraite complète. Alors qu'il faut à un ouvrier ou un employé une ancienneté de presque quarante ans pour obtenir une retraite intégrale», a-t-il précisé. «Le système de l'assurance maladie» a été abordé par Fawzi Ouertani, cadre à la Caisse nationale d'assurance maladie, qui a indiqué que le problème de l'assurance maladie est dans le système lui-même régi par une loi caduque datant du 2 août 2004. «C'est la filière publique qui pose un véritable problème. 74% des affiliés à ce système l'ont déserté pour rejoindre le secteur privé», a-t-il affirmé. Au sujet des «risques professionnels dans les secteurs étatique et privé», Adnen Hanchi, médecin à l'hôpital universitaire de Monastir, a parlé de la réparation de préjudices résultant des accidents du travail et des maladies professionnelles, attestant que seul le secteur privé assure une couverture de soins totale et d'ajouter que le maillon faible reste la réinsertion professionnelle. S'agissant des « équilibres financiers des caisses sociales», Khaled Zdiri, expert en sécurité sociale, a souligné l'importance des techniques de financement de ces caisses reposant sur les régimes de répartition, en l'occurrence le calcul de la retraite (une moyenne de dix ans pour les affiliés à la Cnss et le dernier salaire brut pour ceux de la Cnrps), recommandant, par ailleurs, la nécessité de mettre à l'écart le politique quant aux solutions à trouver pour les problèmes liés au secteur de la sécurité sociale. Il est à noter que la politique sociale en matière de sécurité sociale repose essentiellement sur les principes de l'extension de la couverture sociale à l'ensemble des catégories socioprofessionnelles, tout en améliorant la couverture réelle pour les catégories assujetties ; l'amélioration des prestations octroyées et le rapprochement entre les régimes de sécurité sociale, tout en préservant leurs équilibres financiers et la préservation du principe de la répartition solidaire. L'approche fondée sur les droits humains tels que la transparence, la participation et l'accessibilité proposée par le Haut Commissariat aux droits de l'Homme devrait aboutir, si elle est appliquée, à la mise en place d'un socle de protection sociale juste et équilibré.