La démarche gouvernementale se fixe des repères : booster le tourisme pour l'été, profiter de la conjoncture favorable pour séduire les investisseurs, et préparer en septembre la conférence des amis de la Tunisie De retour hier d'un voyage d'Etat en France et à peine quelques minutes après l'atterrissage de son avion sur le tarmac de l'aéroport Tunis-Carthage, le chef du gouvernement s'est prêté aux jeu des questions-réponses après une longue déclaration aux médias. Entre petites formules et des interludes soigneusement préparés, Mehdi Jomâa a présenté un bilan enthousiaste de son séjour parisien. "Je n'ai rien ramené dans les cartons", a-t-il pourtant dit. C'est que le chef du gouvernement n'est pas épris des grandes annonces, il attend que "les choses se précisent et se concrétisent". L'approche Jomâa en matière de relation bilatérale semble celle d'une relation "gagnant-gagnant". Il n'a cessé de le marteler depuis la capitale française: "Nous ne mendions pas, nous cherchons des opportunités de coopération" dans le cadre d'une "montée en gamme" à tous les niveaux. Même s'il se permet de manger des fricassés avec le bon peuple, le chef du gouvernement vise haut en comprenant qu'un pays doit se respecter pour espérer se faire respecter par les autres nations. Un tourisme transméditérranéen Cheval de bataille du gouvernement provisoire, le tourisme a été un des sujets évoqués lors de la visite de la délégation tunisienne en France. Jomâa revient avec une idée ambitieuse, celle d'associer l'image de la Tunisie à celle de la France. "Nous pourrions très bien imaginer des packages touristiques comprenant à la fois les deux destinations", a-t-il proposé à titre d'exemple, mais le label français accepterait-il de s'allier au label tunisien? D'autant plus que la situation environnementale est préoccupante, faisant dire à une journaliste présente que la Tunisie est comme une famille qui programme une fête sans rien préparer pour accueillir ses invités. Certains Français interrogés sur la question ont une image d'une "poubelle à ciel ouvert" de notre pays. "C'est un véritable problème, je l'admets, malgré nos efforts pour les campagnes de propreté, nous constatons que les citoyens ne suivent pas, a-t-il déploré. On jette par terre et on laisse dans la rue les déchets de construction". Se préparer pour recevoir nos amis La montée en gamme, Jomâa rêve de la voir se concrétiser sur le plan économique. D'après lui, la réunion avec le patron du Medef (l'organisation patronale française) et une soixantaine d'hommes d'affaires a été enrichissante. Toujours dans une logique gagnant-gagnant, le chef du gouvernement affirme que les investisseurs français sont tout aussi intéressés par le marché tunisien que le sont nos hommes d'affaires par le marché français. Jomâa espère ainsi drainer des IDE dans des domaines à forte valeur ajoutée, et pas seulement quelques chefs d'entreprises avides d'économies et à l'affût de travailleurs exécutants bon marché. Le chef du gouvernement a fait savoir qu'un congrès économique en Tunisie sera organisé en été 2014, et tentera de séduire les investisseurs, le tout dans l'objectif d'assurer une "transition économique". La démarche gouvernementale semble ainsi rythmée et cohérente: booster le tourisme pour l'été, profiter de la conjoncture favorable pour inviter des investisseurs, et préparer en septembre la conférence des amis de la Tunisie qui se tiendra à Paris. "C'est une grande conférence très importante pour la Tunisie, il nous faut nous y préparer et avoir une vision claire de ce que nous attendons de nos amis", a expliqué Mehdi Jomâa. Très confiant pour la suite, le chef du gouvernement rappelle que les fruits de sa visite américaine ne se sont pas fait attendre, citant en exemple le récent déblocage par la Banque mondiale d'un prêt de 250 millions de dollars. La sécurité et la question libyenne Même si Mehdi Jomâa fait remarquer que nos soldats n'ont pas démérité dans la lutte contre le terrorisme, il est bien évident que nos forces armées ont besoin d'un soutien logistique pour faire face au péril terroriste et "protéger la maison", selon le terme employé par le Premier ministre. Il a donc demandé à l'ami français de soutenir ce combat quotidien, par la fourniture d'équipements de précision et d'hélicoptères. Selon des sources diplomatiques au Quai d'Orsay, la France est disposée à mettre à la disposition de Tunis ce type de soutien matériel. D'un autre côté, Mehdi Jomâa a annoncé qu'une conférence autour de la Libye pourrait se tenir prochainement sous l'égide des Nations unies et avec la participation de l'ensemble des protagonistes libyens. La Tunisie l'a compris, la "protection de la maison" passe par la pacification du voisin libyen.