Le dialogue national économique, prévu le 28 mai 2014, se fera «sous la pression du temps et de l'urgence, et dans des conditions où prédominera la logique financière et des équilibres à court terme, qui demandent des mesures rapides réelles» L'initiative du dialogue national économique dont le lancement a été annoncé par la présidence du gouvernement, le 22 avril dernier, est «tardif, et intervient à un moment difficile caractérisé par l'intensité de la crise des finances publiques et l'exigence d'une loi de finances complémentaire pour l'année 2014 dans les plus brefs délais pour que l'administration publique puisse entamer la préparation de la loi de finance 2015», propos avancés par le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (Ftdes). Dans ces conditions, le dialogue, prévu le 28 mai 2014, se fera «sous la pression du temps et de l'urgence, et dans des conditions où prédominera la logique financière et des équilibres à court terme, qui demandent des mesures rapides réelles, qui sont, elles, liées à la bonne utilisation des ressources humaines et naturelles et l'amélioration des équilibres régionaux et autres». Le Ftdes considère que le dialogue national économique exige une démarche plus réfléchie afin d'éviter des solutions précipitées et injustes «ne rendant pas possible des choix stratégiques pour un modèle de développement alternatif». D'un autre côté, les dix thèmes proposés pour l'examen lors du dialogue national sont, d'après le Ftdes, insuffisants et ne couvrent pas tous les dossiers fondamentaux : l'endettement, le régime fiscal, la justice sociale, la sécurité alimentaire, l'énergie renouvelable, etc. «Ce choix repose sur une segmentation des questions économiques qui n'est pas compatible avec la volonté de définir un modèle de développement alternatif. Il manque ainsi une commission de diagnostic des insuffisances du modèle actuel. On ne peut procéder à la définition d'un nouveau modèle sans un diagnostic consensuel de l'actuel». Cette lecture critique sera approfondie au cours de la journée d'études qui sera organisée par le Ftdes, les 23 et 25 mai prochains, qui seront le début d'un processus de réflexion et de dialogue global sur un modèle de développement alternatif exigé et sur les choix stratégiques nécessaires qui permettraient d'envisager cette alternative, ainsi que les réformes fondamentales. Un pacte national en faveur de la productivité Par ailleurs, face à une multitude de contraintes et une situation délicate qui se caractérise par des conditions particulièrement difficiles, «une demande interne atone face à une inflation coriace, un investissement privé productif qui ne décolle pas, tandis que l'investissement public est plombé par des ressources budgétaires limitées et une capacité d'exécution largement entamée, on se rend de plus en plus compte que l'économie a besoin d'un véritable électrochoc sous la forme d'une restructuration. Cette restructuration ne peut venir que d'une augmentation sensible de l'indice de production», analyse formulée par l'Institut arabe des chefs d'entreprises. Or, il est acquis que les facteurs de production, en termes d'investissements et de recrutement, «risquent de demeurer inchangés durant quelque temps, d'où la nécessité de se pencher sur les gains de productivité que l'on peut envisager, surtout que la productivité a été, de l'avis de tous, fortement malmenée ces trois dernières années au niveau de la quasi-totalité des secteurs d'activité». A cet effet, la Tunisie, via ses autorités politiques, a tout intérêt à négocier un pacte autour d'un axe unique et fondamental pour redresser la croissance qui pourrait être la productivité. «L'Etat doit contribuer au pacte national à travers une amélioration de la productivité de l'administration, libérer les énergies et contribuer à accélérer la prise de décision en faveur de l'investissement, réduire les délais d'instruction des dossiers d'autorisation et alléger les procédures administratives qui bloquent l'initiative privée. Aussi, l'Etat, entrepreneur public, doit mettre en œuvre un programme de redressement en faveur de la productivité au sein des principales entreprises, dont les activités sont en lien avec les performances du secteur privé». A ce titre, l'Iace cite, à titre d'exemple, le Groupe chimique tunisien dont il faut relancer le niveau de production du phosphate et ses dérivés qui contribuent de manière directe et importante aux équilibres budgétaires du pays. De même, pour le secteur des transports et de la logistique, avec en particulier l'amélioration urgente et nécessaire des conditions du port de Radès, «dont les surcoûts liés aux mauvaises performances affaiblissent la compétitivité des entreprises tunisiennes, ou encore le secteur bancaire, dont la contribution à l'économie et à l'investissement n'est pas à la hauteur des niveaux requis». L'Iace met en exergue, également, le rôle prépondérant de l'Etat, appelé en tant que régulateur de l'économie, à mettre en place une stratégie de lutte contre le commerce parallèle qui introduit des distorsions au niveau du marché, de nature à compromettre tous les efforts en faveur de la productivité. La contribution de toutes les parties prenantes dans ce pacte en faveur d'une économie plus productif, est indispensable. «Des entreprises soumises à moins de prélèvements créeront plus de valeur et contribueront à l'amélioration des conditions de travail et du pouvoir d'achat des salariés. L'Etat se verra, en retour, substituer le manque à gagner dû à l'allégement fiscal par des recettes additionnelles suite à la relance de la consommation et des recettes fiscales directes». C'est dire qu'un tel accord doit être dicté par une vision stratégique des intérêts des divers partenaires économiques et sociaux visant à «offrir à la Tunisie une bouée de sauvetage économique salutaire, d'autant plus qu'un appel à un dialogue national consacré aux problèmes économiques de la Tunisie fait son chemin et semble être la seule alternative du moment, viable, pertinente et responsable».