Par M'hamed JAIBI Une véritable fièvre des candidatures souffle sur les partis politiques, à quelques semaines à peine des élections législatives devant initier la clôture de la transition démocratique. Or, nous ne voyons aucun programme, aucun débat d'avenir, aucune sérieuse perspective de réforme, les protagonistes semblant plus préoccupés par la laborieuse distribution du gâteau des candidatures que par la teneur de ce qu'ils proposeront aux électeurs. Et ce laisser-aller ne fait qu'attiser la bataille au sein de chaque parti, chaque militant prétendant personnaliser un brin de programme fondamental qu'il s'engagerait à mettre en œuvre s'il était élu. De sorte que la tendance n'est plus aux coalitions entre partis mais plutôt à un surplus d'émiettement pluraliste, tant les candidats à la candidature sont légion. Une éclosion démesurée d'ambitions qu'aucun parti ne pourra satisfaire et dont nous voyons déjà les méfaits quant à la présidentielles, avec une déroutante pléthore de candidatures fantaisistes et une flopée de prétendants porteurs des mêmes projets. Le fait est que l'absence au sein des partis d'un programme clair porté par tous les militants et engageant les candidats qui défendront ses couleurs entretient le flou sur les objectifs du parti et attise les rivalités entre sensibilités, groupes divers et militants. De sorte que s'engage un bras de fer sur les noms, qui remplace un débat sérieux sur les éléments du programme. Outre le fait qu'en l'absence de programmes distincts bien ficelés alimentant les débats et controverses, la campagne électorale va devoir dévier vers les luttes idéologiques et risque bien de rééditer le clivage surfait de 2011, entre «laïcs» et «défenseurs de l'Islam». Les citoyens ont pourtant montré leur rejet de cette bipolarisation idéologique et leur attachement à voir le pays s'atteler à la reconstruction économique et sociale, à la relance du développement et à la réalisation des objectifs de la Révolution. C'est-à-dire à un programme national bien concret qui gagnerait à être consensuel. C'est ce qui explique le soutien dont a bénéficié l'action menée par le gouvernement actuel, malgré ses hésitations et ses lenteurs. La Tunisie a besoin d'un bon programme d'avenir. Et d'abord de programmes multiples et variés soumis au débat lors de la campagne électorale. C'est de cette franche discussion entre partis soudés, chacun autour de son programme, entre états-majors partisans porteurs d'un programme cohérent, que pourra naître le programme consensuel pour l'ensemble du pays, celui que devra finaliser la future Assemblée, autour de la coalition majoritaire qui s'en dégagera.