Par M'hamed JAIBI La campagne électorale des législatives a démarré timidement, mais elle offre plus le spectacle d'une rixe surmédiatisée à propos des espaces d'affichage et de ladite «publicité politique» si décriée qu'un débat national méthodique pouvant guider l'opinion et donner au citoyen les moyens d'un choix rationnel entre la multitude désorientante des listes de candidats. La Tunisie est appelée à asseoir sa démocratie naissante et à armer son peuple de l'expertise voulue en matière politique pour un exercice magistral de sa souveraineté retrouvée. C'est un apprentissage difficile qui est, certes, mené avec plus ou moins de bonheur, depuis la Révolution, mais avec des magouilles, des mensonges, de l'agressivité et de l'invective surdimensionnés, qui désorientent l'opinion et apportent plus la lassitude et la déception que l'espoir de réformes rationnelles et de solutions convaincantes aux multiples problématiques qui se sont accumulées, s'ajoutant aux légitimes attentes qui avaient donné lieu à la Révolution. À moins de trois semaines du rendez-vous historique du 26 octobre, personne n'a la moindre idée de ce que nous réservent les urnes. Pire, aucun exposé méthodique des propositions programmatiques de l'éventail des partis et listes n'est aujourd'hui accessible aux électeurs. Certes, s'impose en filigrane l'impératif d'un choix de société entre modernisme et passéisme ou entre «progressisme» et «conservatisme», dans les multiples déclinaisons de leurs nuances, mais le débat entre programmes et entre propositions alternatives concrètes fait terriblement défaut, donnant libre cours à de mesquines escarmouches et des coups au-dessous de la ceinture. Que doivent penser les Tunisiens des recommandations du FMI et de la Banque mondiale, de l'âge de la retraite et du déficit des caisses sociales, de l'emploi par intérim et du Code du travail, de la fiscalité et de son rôle possible dans une meilleure répartition des fruits de la croissance...? Et, tout d'abord, des moyens pouvant relancer notre économie et rééquilibrer nos finances, sur la voie d'une croissance efficiente. Il est temps d'organiser le vrai débat et de responsabiliser l'opinion publique, afin que les choix qui étaient, durant cinquante ans, du ressort d'un président de la République autoritaire soient pleinement assumés par le peuple tunisien, désormais théoriquement maître absolu de son destin. M.J.