Au commun des mortels, on peut faire preuve d'indulgence à l'égard de celui qui use du mensonge pour se débrouiller dans la vie. Mais point de circonstances atténuantes pour ceux qui se présentent en leaders et postulent aux plus hautes marches du pouvoir. C'est le plus mauvais exemple qu'on puisse donner à la société et aux jeunes. Il est de ces phénomènes de société qu'on ne peut passer sous silence ou feindre d'ignorer pour ne pas les dénoncer et condamner, surtout quand ils sont empreints d'une coloration politique et dont les desseins inavoués cherchent à attirer la sympathie des gens pour les avoir dans son camp. Le mensonge est de ces phénomènes les plus dangereux qui s'apparentent de nos jours à une véritable gymnastique dont les politiques de notre pays usent dans la gestion des affaires du pays et surtout dans leurs campagnes électorales. Celle de 2011 a battu tous les records en la matière. Que de promesses ont été faites au bon peuple des électeurs, que de chimères leur ont été vendues! Chaque parti et personnalité, lorgnant des sièges à la Constituante, y allait de son mieux pour appater le plus grand nombre de gens. On a tout vu, tout entendu. De celui qui va monter des projets grandioses qui allaient changer la face de contrées entières, d'un deuxième qui promettait le logement et le transport gratuits, d'un troisième qui allait créer des centaines de milliers de postes d'emploi et éradiquer le chômage une fois pour toutes, etc. Tout était beau dans le meilleur des mondes, surtout pour ceux d'entre les Tunisiens qui avaient cru en ces belles promesses dont les auteurs se présentaient en honnêtes citoyens brimés et victimes de l'autocratie qui a régné sur le pays. Le halo de «militantisme» dont ils s'entouraient était leur fonds de commerce. Ils en ont fait le plus mauvais usage pour atteindre leurs objectifs, mais le pire pour le pays, parce qu'ils ont tout simplement menti aux Tunisiens pour leur extorquer leurs voix. Pouvoir et opposition étaient logés à la même enseigne, car l'un comme l'autre ont confisqué le bel espoir, né du soulèvement de 2010/2011. Un halo mensonger ! Mais les Tunisiens, auxquels on promettait monts et merveilles, ont vite fait de découvrir la grande supercherie dont ils étaient victimes pour se rendre à l'évidence que tout n'était que belles paroles sans lendemains. Ils ont compris qu'ils ont été bernés par des professionnels du mensonge qui ont mis à contribution le halo dont ils se sont entourés pour accéder au pouvoir et l'exercer, oubliant chemin faisant tout ce qu'ils avaient dit et pris comme engagements. Les réactions ne se firent pas attendre partout dans le pays et qui étaient d'ailleurs à la mesure de la grande désillusion. Des personnalités de tout bord ont été pris à partie pour être souvent ridiculisées, voire insultées et priées de retourner d'où elles venaient. Et pourtant, on n'a pas fini d'user du même langage mensonger ! La dernière campagne des législatives nous a permis de constater qu'on n'a pas retenu la leçon, en continuant à promettre sans décence. Mis à part quelques postulants aux sièges du futur parlement, tout le monde ment, comme si faire de la politique c'est mentir. Dans la plupart des programmes présentés surtout au volet social qui constitue le souci majeur de la population, au vu de la précarité dans laquelle végètent des pans entiers de la société, des promesses qui ne seront nullement tenues y figurent. On oublie ou on feint d'oublier qu'il s'agit là de programmes de gouvernement qui doivent être réalistes et tenir compte de la conjoncture économique point reluisante. Véritable gymnastique périlleuse à laquelle on s'adonne, alors qu'on se devait de tenir le langage de vérité pour que les Tunisiens sachent et se préparent à des lendemains difficiles, et pour que la déception ne soit pas une fois de plus au rendez-vous. La crise économique et celle sociale consécutive ne sont pas certes une fatalité, mais elles exigent des efforts pour lesquels on doit faire appel aux Tunisiens pour qu'ils se remettent au travail. Cela étant des programmes de gouvernement présentés aux électeurs par les partis en compétition, qu'en est-il alors de ceux des candidats à la magistrature suprême? Là aussi, on constate que la plupart des postulants à la présidence font du mensonge leur devise sans rougir ! Nous n'arrivons pas à comprendre qu'un président de la République, avec les prérogatives qu'il a et qui sont honorifiques, puisse se prévaloir d'un programme qui empiète sur le champ du gouvernement, en faisant des promesses économiques et sociales. Un peu de probité intellectuelle S.V.P ! Les deux premiers jours de la campagne présidentielle, à travers les meetings et les passages télévisés, ont suffi. Nous avons été tout simplement médusés devant la capacité mensongère de certains des candidats, comme s'ils étaient les véritables tenants de l'exécutif qui est, en fait, du ressort du chef du gouvernement, mis à part le volet diplomatique et les questions ayant trait à la défense nationale. Et encore, dans ces deux domaines, le chef du gouvernement a son mot à dire. Quand des postulants à la magistrature suprême s'exercent à une telle gymnastique, ils ne font tout simplement que tromper les électeurs. Ils ne sont pas en droit de le faire, la probité intellectuelle leur interdit de se présenter dans la peau de ceux qui détiennent les vraies rênes du pouvoir, qui sont ailleurs et de proposer des programmes dans des domaines qui ne sont pas de leur ressort. Même un candidat dont le parti sort vainqueur des législatives, et qui sera appelé à former le futur gouvernement, ne pourra s'adonner à un tel exercice, car ce parti sera appelé à composer avec d'autres familles politiques pour diriger le pays. Que dire alors d'un candidat qui n'a pas cette posture ? Ceci est, on ne peut plus condamnable, car là, on piétine toutes les valeurs nobles et on porte un coup irréparable à une République que nous voulons de droit et des institutions. Certains d'entre eux n'hésitent pas à user de faux pour falsifier l'histoire, d'autres vont jusqu'à faire douter les Tunisiens de leurs certitudes, de leur identité et de leurs acquis. Ignoble entreprise à laquelle nous assistons de la part de ceux qui sont censés donner le meilleur exemple. Peut-on dans ce cas reprocher aux petites gens d'user de mensonges et de tromperies pour faire valoir des droits qu'ils n'ont pas et d'en faire une pratique dans leur vécu quotidien ? Mis à part un ou deux postulants à la présidence qui ont su prendre de la hauteur et ont le profil exigé pour avoir situé la présidence de la République là où il faut sur l'échiquier politique. Ils se présentent en rassembleurs soucieux d'unir les Tunisiens sur un projet de société qui répond aux défis auxquels notre pays est confronté et qu'il devra relever avec le concours de tous, gouvernants, gouvernés, partis politiques, société civile et toutes sortes de corporations. La société tunisienne a cruellement besoin de cette trempe d'hommes et de femmes honnêtes et conséquents avec eux-mêmes et envers le peuple. Ceux qui ont choisi le chemin opposé ne font que se couvrir de ridicule et d'opprobre surtout. On ne construit pas l'avenir sur le mensonge, dont les conséquences sur le comportement des gens est ce qu'il y a de plus néfaste sur leurs rapports les uns avec les autres, rapports empreints de défiance et méfiance.