Un vrai cri d'alarme lancé par M.Morched Garbouj de l'association SOS Biaa : la situation environnementale en Tunisie n'est plus supportable et a un impact sur le cadre de vie des citoyens. A l'occasion du séminaire sur «les enjeux environnementaux en Tunisie : la gestion des déchets et des eaux usées» organisé à Tunis par «Friedrich Ebert Stiftung» et SOS Biaa, un état des lieux alarmant a été donné par plusieurs intervenants. M Garbouj a pris comme exemple les décharges contrôlées de Borj Chakir pour le Grand Tunis, d'Enkhila pour le gouvernorat de Nabeul et de l'Oued Laya pour celui de Sousse. Au cours de la période de février-mai 2014, un nouveau casier numéro 6 a été aménagé dans la décharge de Borj Chakir. Ce casier de fortune est considéré comme illégal, d'autant plus que le choix du site est discutable. En plus, il est situé à quelques mètres d'une route principale et à 100 mètres des habitations et des zones agricoles. Les berbacha (chiffonniers) sont toujours actifs dans ces casiers à la recherche d'objets de valeur pour les vendre. Au cours du mois d'octobre déjà, ce casier est saturé. D'où l'aménagement d'un nouveau casier (numéro 7) dont le choix du site est arbitraire, selon le même intervenant. Les protestations des habitants n'ont pas eu l'effet escompté. Des analyses d'échantillons de l'eau à El Attar ont été effectuées pour s'assurer que le lixiviat n'a pas eu d'impact négatif. Ecosystèmes fragiles Dans la décharge contrôlée d'Enkhila — qui se trouve près d'un barrage à moins d'un kilomètre —, on a constaté moins de lixiviat dans les cours d'eau. Le risque de pollution est réel. On a constaté une incapacité de gestion du lixiviat au cours du mois de mai 2014. Pour ce qui est de Oued Laya, un seul bassin de lixiviat est aménagé. L'année dernière, on a enregistré un débordement. Plusieurs puits appartenant à de petits agriculteurs ont été contaminés. M. Samir Meddeb de Nida Tounès a évoqué la politique environnementale en Tunisie, mettant en exergue le capital naturel limité et fragile de notre pays et qui est souvent surexploité localement dans les domaines de l'agriculture et de la pêche. Aussi, les rejets ne sont-ils pas totalement maîtrisés. Des poches de pollution significatives persistent encore comme c'est le cas à Gabès. La qualité de la vie est souvent approximative, selon l'orateur. Or, l'environnement constitue une vraie opportunité pour la création de nouveaux postes d'emploi. «L'environnement doit être intégré dans toutes les activités humaines et les politiques de développement», insiste M. Meddeb. La responsabilisation du pollueur est devenue nécessaire de nos jours dans le cadre du principe du pollueur-payeur. Le renforcement des capacités constitue également une condition pour l'amélioration de l'état de l'environnement aussi au niveau du secteur public que du secteur privé. L'entreprise et la société civile ont un rôle fondamental à jouer dans la préservation de l'environnement. L'objectif est de gérer durablement les ressources naturelles et des écosystèmes et ne pas les surexploiter. Il faut instaurer, de même, une production respectueuse de l'environnement, gérer harmonieusement le littoral et rationaliser la consommation de l'énergie tout en assurant la promotion des énergies renouvelables. Parallèlement, des mesures institutionnelles et organisationnelles doivent être prises pour améliorer les performances du dispositif institutionnel. Les mesures relatives à la lutte contre les nuisances sont aussi nécessaires, mais il faut fournir aux communes tous les moyens dont elles ont besoin pour bien assumer leur mission. Effectif réduit La commune de La Marsa est l'exemple type de la structure locale qui n'est plus en mesure de faire face aux nombreux défis. Selon M. Soufiane Bouslimi, cadre dans cette commune, depuis la révolution on a constaté un changement de configuration de l'espace avec des constructions anarchiques, des quartiers populaires non aménagés et beaucoup de déchets. Une partie des activités est privatisée. La commune — qui avait recours par le passé aux travailleurs de chantiers — manque actuellement d'ouvriers. En plus, près de 50% de l'effectif a 50 ans, ce qui ne lui permet pas d'effectuer certains travaux. Le taux d'encadrement n'est que de 2%. Le manque de matériel est également évoqué. Certains équipements en panne restent souvent des mois immobilisés à cause de la complexité des procédures administratives. L'acquisition d'un nouveau matériel nécessite une formation aux ouvriers qui vont l'utiliser, ce qui prend un certain temps avant sa mise en service au profit des citoyens. Même le transport des déchets est mis en cause dans la mesure où une grande partie des ordures sont perdues sur la route et contribuent à la pollution de l'environnement. Une longue attente des bennes pour décharger les déchets est constatée. La commune de La Marsa — qui collabore beaucoup avec la société civile — a décidé de mettre sur pied une unité de compostage après avoir élaboré une étude dans ce sens en intégrant les chiffonniers afin qu'ils contribuent, eux aussi, à préserver l'environnement. On a constitué, par ailleurs, un réseau de 20 communes pour une gestion efficace des déchets. M. Belgacem Mediouni, de la commune de Sidi Hassine estime, que l'effectif humain est réduit et on fait appel encore aux travailleurs des chantiers pour la gestion des déchets ménagers. La commune n'est pas capable de s'acquitter des charges dues au traitement des déchets et demande une subvention de la part de l'Etat pour qu'elle puisse poursuivre les activités d'enlèvement et de transport des ordures sous toutes leurs formes. A noter que le conseil régional n'est pas encore élu — comme l'a rappelé M. Khaled Bouraoui de Sos Biaa — mais travaille sur une période de cinq ans. Le ministère de l'Intérieur et le secrétariat d'Etat à l'Environnement avec leurs différentes structures sont les principaux intervenants dans l'environnement urbain. Or, malgré la multiplicité des intervenants, la situation environnementale est désastreuse.