Le discours sportif en général, et footballistique en particulier, demeure figé et rétrograde. Surprenant ! C'est fou l'unanimisme qui prévaut dans une bonne partie des médias et, particulièrement, sur les plateaux de télévision en ce moment. Non, nous ne parlons pas des débats politiques et autres, où ça «déménage» parfois et où tout le monde semble avoir brisé les chaînes qui le lient (au propre comme au figuré) avec le passé. Ce dont nous parlons, c'est le discours sportif et footballistique en particulier qui n'a pas bougé d'un iota et qui, pis encore, connaît un net recul ces derniers temps. Unanimisme, disions-nous, doublé d'une bonne dose de langue de bois. Unanimisme... Il faut dire qu'on est entr'amis et collègues, en l'absence étonnante et détonnante de journalistes sur nos plateaux télé. Alors, entre entraîneurs en quête d'un club ou alors des ex-joueurs et internationaux, on tient à ne pas égratigner et s'égratigner. Tout est bien dans le meilleur des mondes. Volet Equipe Nationale, Georges Leekens, la FTF et les joueurs peuvent, de ce fait, être tranquilles. C'est des «Notre Equipe Nationale peut aller loin»; «le groupe est solidaire»; «le sélectionneur a fait le choix de la continuité» et d'autres habituelles platitudes qui n'aident en tout cas pas le sélectionneur et les joueurs à se remettre en question. Faut-il en effet oublier, qu'en dépit de la qualification pour la CAN, plusieurs imperfections sont apparues lors des éliminatoires. Sur tous les plans. Défensif, offensif et surtout au niveau de l'entrejeu. Car voilà une équipe plutôt partie sur des bases prometteuses lors des matches amicaux, pour connaître bien des difficultés face à tous ses adversaires, pour finir avec des schémas de plus en plus conservateurs, cinq défenseurs (trois joueurs à l'axe central), deux pivots défensifs et l'absence d'un avant-centre nominal. Conservatisme... Leekens, lui, repart du principe qu'on ne change pas une équipe qui gagne (ou plutôt qui se qualifie), a repris le même groupe, est allé chercher (comme ses prédécesseurs) des solutions improbables à l'étranger et superbement ignoré les talents de notre championnat national, tirant au passage un trait définitif sur Hamdi Harbaoui qui aurait résolu bien des problèmes dans cette équipe et, sûrement, apporté le plus escompté à un secteur offensif en mal de buteur. Sur un plan technique, le onze bâti par Leekens souffre toujours de déséquilibre. La défense a flotté lors de toutes les rencontres disputées sous l'ère Leekens ; l'entrejeu est toujours coupé en deux avec deux pivots défensifs (Ragued et Nater) souvent collés à leur défense, et l'attaque penche dangereusement à gauche avec Chikhaoui, Msakni et Khlifa, alors qu'on retrouve à droite Khazri, le joueur le plus important de Bordeaux, celui par qui tout passe et sur lequel tout aboutit. On peut si on ose Ceci sans parler de Chikhaoui, contraint de revenir loin derrière pour aller chercher les ballons. Or, si nous partons du fait que cette équipe nationale n'est pas trop mal lotie derrière (ce qui reste à prouver), force est de constater que c'est la bouteille à l'eau à l'entrejeu et devant. Beaucoup de noms (Chikhaoui, Msakni, Khlifa, Ben Youssef...), mais très peu de consistance, de percussion et d'efficacité. Alors que tout le monde sait pertinemment que, pour atteindre le palier supérieur (quarts, demi-finales, finale, et victoire finale), il faut être fort devant. La solidarité, la continuité et tout ce que vous voulez, c'est bien mais dans une CAN où on joue sa peau à chaque match, il faut oser. Quitte à calculer un peu lors des matches de groupe mais, si on a la chance de passer en quarts de finale, il faut mettre le turbo par la suite. Cette équipe en a-t-elle les moyens? Oui, pour peu que Leekens mette de côté son conservatisme. Pour peu aussi que nos joueurs adoptent l'esprit CAN. L'Afrique se conquiert, elle ne s'offre pas !