L'équipe de Tunisie a besoin de l'implication sérieuse et efficace de sa ligne avant dans le nécessaire travail de récupération. Adieu Ebibeyin, bonjour Bata, la capitale économique de la Guinée Equatoriale. Après les misères endurées dans la ville hôte du groupe B, l'équipe de Tunisie va retrouver des conditions décentes de séjour dans la seconde cité de ce pays qui a pris au pied levé la tâche ardue d'organiser la 30e édition de la Coupe d'Afrique des Nations. Un défi risqué. Une charge qui, visiblement, dépasse ses capacités. Pour les Aigles de Carthage, l'air de ce pays qui présente la particularité d'être constitué d'une partie continentale et d'une autre insulaire, leur réussit plutôt bien, au moins au niveau arithmétique: 4 points en deux rencontres, le butin n'est guère négligeable. Surtout quand on voit les malheurs de l'équipe d'Algérie, donnée comme l'un des grands favoris du tournoi, battue avant-hier à la dernière seconde de son match face au Ghana et qui, avec ses 3 points, risque tout simplement l'élimination. Voilà pourquoi il ne faut surtout pas insulter l'avenir en escamotant tout ce qu'avaient pu réaliser jusque-là les Aigles de Carthage, notamment au niveau des résultats. Le jeu produit ne séduit pas, l'ensemble est lent, incohérent et emprunté, mais l'équipe est là, première de sa poule et qui n'aura besoin que d'un nul dans son dernier match demain (19h) devant la République Démocratique du Congo. Depuis les éliminatoires, elle paraît se satisfaire d'être réaliste et rigoureuse sans trop se soucier de la manière et de la qualité du jeu. A ce jeu-là, elle avait d'ailleurs terminé la phase éliminatoire invaincue en tête de sa poule (devant le Sénégal et l'Egypte, excusez du peu !). Deux questions se posent à ce niveau, à la veille de son dernier match qui sera décisif pour l'accès aux quarts de finale: -Primo, les copains de Yassine Chikhaoui peuvent-ils aller de cette façon-là, c'est-à-dire à coups de retournements spectaculaires de situation et de brefs et fulgurants réveils (les 20 dernières minutes face à la Zambie) ? Quand la phase des matches à élimination directe arrivera, sauront-ils adapter leur jeu lacunaire, essentiel et au final peu attrayant pour dompter de gros calibres à l'expérience consommée ? -Secundo, y a-t-il vraiment moyen d'améliorer la qualité technique des productions en procédant à quelques correctifs que ce soit dans le choix des hommes ou de la stratégie de jeu ? Chemin faisant, en cours de tournoi, ne faut-il pas d'ailleurs s'attendre à ce que les Aigles aillent crescendo, abandonnent leur frilosité et leurs doutes pour abattre leurs cartes et jouer franchement le jeu ? Pourtant, il ne faut pas être devin pour annoncer que le problème n'est pas uniquement d'ordre psychologique, qu'il s'agit en même temps d'une question de qualité technique, de talent. Notamment offensif, le talon d'Achille du football tunisien. Des difficultés accentuées par le forfait de dernière minute de Sabeur Khelifa et Fakhreddine Ben Youssef. Capables de monter en puissance Il y a en tout cas quelques joueurs qui n'ont toujours pas atteint leur meilleur rythme et qui peuvent se bonifier au fil des rencontres: le cas de Youssef Msakni jusque-là transparent (malgré sa passe décisive sur le but de la victoire face à la Zambie, ce qui reste insuffisant par rapport à l'énorme potentiel qu'on lui connaît), Wahbi Khazri qui n'a pas pris cette CAN du bon bout et parait se contenter d'attendre une balle arrêtée pour faire la différence, et surtout Yassine Chikhaoui qui a évolué durant les deux premiers matches un cran au-dessous, multipliant les déchets dans des choix techniques malheureux. Dans un style cent pour cent italien (réalisme exacerbé, jeu «essentiel», dépouillé et pas vraiment beau à voir, quitte à user du catenaccio-par exemple face au Cap-Vert durant la majeure partie de la rencontre, mais au final drôlement efficace comme modèle), cette cuvée a-t-elle une chance face à des équipes «joueuses» et offensives ? Paradoxalement, le salut nous paraît devoir venir d'une plus grande implication des demis offensifs et des attaquants au travail de couverture et de premier écran. Les nôtres perdent facilement le ballon, la défense est trop souvent livrée à elle — même, dangereusement exposée, toujours au bord de la rupture. Chikhaoui, Msakni, Khazri et le joueur de pointe, Akaichi, doivent apporter leur contribution. Jusque-là, celle-ci s'est révélée insuffisante. Les seuls pivots ne peuvent pas tout faire.